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Tribune. Le PJD, un populisme sans populistes

Tribune. Le PJD, un populisme sans populistes


Malgré le désintérêt apparent des citoyens et l’actuelle apathie consécutive à la gestion anxiogène de la Covid-19, quelques heures nous séparent d’un rendez-vous historique, celui des élections législatives de 2021. Historique pour bien des raisons. 

 

Premièrement, parce que notre parenthèse «populiste» consécutive aux printemps arabes va probablement être close, au profit d’une nouvelle ère dont on peut à peine esquisser les contours.

Le PJD, puisqu’il faut appeler un chat un chat, a eu suite à un rendez-vous inopiné avec l’histoire en 2011, la possibilité et la chance historique de diriger le gouvernement sur deux mandats consécutifs. Cela, dans le cadre d’une Constitution lui offrant des prérogatives ô combien plus larges que celles de ses prédécesseurs.

Une décennie pour changer les choses en profondeur, une décennie pour démontrer que les slogans et les envolées lyriques ne pourront jamais remplacer des compétences et une vision politique cohérente, articulée et ambitieuse. Une décennie qui a laissé à bon nombre de citoyens un arrière-goût amer, celui d’une décennie gâchée. Mais l’heure du bilan, du vrai, celui de la sanction populaire, a enfin sonné.    

Car les choses ont cependant grandement changé depuis 2011. La virginité politique a disparu et Abdelilah Benkirane qui fut une figure de proue du parti et un grand rhéteur devant l’éternel s’est formellement retiré de la scène politique, même s’il continue de tirer ici et là quelques ficelles, la magie des débuts, celle des vœux pieux et de l’espérance, a disparu. 

Un populisme sans populistes, c’est un peu pour le dire trivialement, comme du pain sans gluten. C’est sympathique du dehors mais ça manque de saveur et d’élasticité. C’est politiquement indigeste !

Quant au bilan autant économique que plus récemment sanitaire, aucun alibi, ni les crocodiles ni les démons ou autres fantômes, ne sauraient justifier un tel manque de vision, d’ambition et de compétences. Ayant été à la tête de deux gouvernements «patchwork», le PJD a fait le choix, ou plutôt, a été contraint par manque de compétence de céder les ministères les plus vitaux (Industrie, économie, …), ceux où la marge d’erreur ne pardonne pas, à d’autres, pour se concentrer sur un autre agenda, le leur. Celui d’un entrisme dans l’administration, dans les niveaux subalternes des rouages de l’Etat et du blocage de certaines réformes vitales au niveau législatif sous couvert de conservatisme et par pur calcul électoral. Des pratiques propres au Trotskysme mais à la sauce locale.

Durant sa récente sortie sur les réseaux, Abdelilah Benkirane, dans le sillage de son frère de lutte, Driss El Azami El Idrissi, a décidé de jouer son va-tout en lançant des attaques ad hominem contre Aziz Akhannouch. La pratique est peu glorieuse mais les deux sont assez grands pour régler leur compte devant les tribunaux. Mon propos est ailleurs, puisque Benkirane a quand même prononcé une phrase on ne peut plus véridique en disant : «On ne peut tromper les Marocains deux fois de suite». C’est vrai Si Benkirane, et peut-être est-il temps d’en saisir toute la teneur à ses propres dépens. 

Car les Marocains ne tolèreront désormais plus d’être mangés à la sauce de la rhétorique religieuse. Le Maroc est en crise, des millions de Marocains souffrent du chômage, de la précarité, du désespoir et d’un manque cruel de visibilité, le pragmatisme sera probablement le mot d’ordre de ces élections, autant dans l’abstention de certains que dans le «vote sanction» des autres.

Mais disons-le clairement, si la magie a certes déserté le camp du PJD, elle n’a cependant pas trouvé pour autant refuge dans un autre parti. Loin de là. Il en résulte que de mon point de vue, le principal intérêt de ces élections serait tout simplement de s’enlever politiquement une épine du pied, faute de pouvoir proposer une alternative politiquement crédible.

Ainsi, excusez de l’euphémisme mais garder le meilleur ou le moins mauvais de ce qu’on a, tout en évacuant politiquement et sur le terrain des compétences le pire, me semble être la solution la plus souhaitable pour enclencher une nouvelle dynamique politique, avec son lot de contradictions, de changements et de possibilités nouvelles.

Une logique du moindre mal à laquelle  nous sommes malheureusement de plus en plus habitués, en attendant des jours meilleurs, ou en se donnant les moyens de les construire. Quelqu’un a dit un jour que «la meilleure façon de prédire l'avenir est de le créer».

 

 

Par Rachid Achachi

 

 

 

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