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Agences bancaires : Pourquoi les ouvertures décélèrent

Agences bancaires : Pourquoi les ouvertures décélèrent

 

- Le réseau bancaire ne s’est étoffé que de 105 agences en 2017, bien loin des 300 annuelles enregistrées à la fin des années 2000.

- L’essor du digital ainsi que des considérations d’ordre financières et commerciales expliquent cette décélération.

 

 

Il y a quelques semaines, Fréderic Philibert, associé Directeur général du bureau casablancais du cabinet Ailancy, spécialisé dans le retail banking et les services financiers, expliquait sur nos colonnes que «les sujets liés au réseau bancaire, à l'animation et à l'efficacité commerciale sont des problématiques prégnantes actuellement. La phase d'expansion et la volonté de bancariser sont en train de se tasser. Nous sommes en train de toucher un plafond de verre». Il ne croyait pas si bien dire.

Cette tendance au net ralentissement du rythme d'ouverture d'agences s'est plus que vérifiée en 2017. Si l'on se fie aux statistiques publiées très récemment par la Division de la supervision bancaire (DSB), relevant de Bank Al-Maghrib, le nombre de guichets n'a progressé que de 1,7% en 2017, contre une hausse de 2,3% en 2016, et 9% en moyenne au cours de la période 2007/2016.

En 2017, seulement 105 agences additionnelles ont vu le jour. C'est 39 de moins qu'en 2016; 119 qu'en 2015.

Si l'on ne comptabilise que les agences ouvertes par les banques conventionnelles, on retombe à 61 nouveaux guichets (44 agences participatives ont ouvert à fin 2017, 82 à fin juin 2017).

On est bien loin des 300 ouvertures d'agences annuelles qui ont caractérisé la période de conquête des banques à la fin des années 2000.

 

L'avènement du multicanal (e-banking, m-banking, banque direct), l'essor du digital et l'apparition de nouvelles expériences client expliquent bien sûr en partie, le fait que les établissements bancaires mettent le holà sur le réseau physique.

La DSB y fait référence d'ailleurs dans son rapport lorsqu'elle relie ce ralentissement au «contexte de digitalisation des services bancaires et d'usage croissant de la technologie». Mais il serait réducteur d'expliquer cette tendance par la seule technologie. D'autres paramètres, d'ordre économiques notamment, entrent en jeu.

Il faut garder à l'esprit qu'une ouverture d'agence est particulièrement gourmande en charges d'exploitation. Or, dans un contexte de contraction des marges, de forte sollicitation des fonds propres (Bâle III, IFRS 9) et d'investissements lourds consentis par les groupes bancaires, que ce soit pour prendre le virage du digital, réussir le lancement des banques participatives ou procéder à la refonte de leurs systèmes d'information, les banques sont plus regardantes à la dépense, et procèdent à des arbitrages.

D'ailleurs, du fait de ces investissements, le coefficient d'exploitation du secteur s'est détérioré en 2017 de 1,3 point à 50,6%, et ce malgré le nombre réduit d'ouvertures d'agences.

 

Prendre de la hauteur

 

Plutôt que d'agrandir un réseau déjà bien étoffé (près de 6.400 guichets bancaires couvrent le territoire national, contre moins de 2.500 en 2006), les banques vont plutôt y faire le ménage. Après la course à la taille critique que se sont livrés les grands établissements de la place pendant près d'une décennie, l'heure est désormais à l'évaluation de ce réseau. Autrement dit, faire une pause pour faire les comptes.

Comme nous le disait Fréderic Philibert, «les banques, après plusieurs années de développement en nombre d'agences, prennent aujourd'hui de la hauteur pour finalement étudier leur rentabilité». Et constater par exemple que certaines agences, après 8 ou 10 ans d'expérience, ne sont toujours pas rentables. D'où le questionnement actuel sur le repositionnement du réseau, sa rationalisation, voire son optimisation.

Une statistique intéressante, livrée par notre interlocuteur, illustre cet impératif de rationalisation : «Des études que nous avons menées récemment, montrent qu'au Maroc, quand un réseau bancaire atteint une taille critique, à peu près 10% des agences les plus performantes génèrent autour de 40% à 50% du produit net bancaire retail de la banque, tandis que 10% des agences les moins rentables génèrent moins de 3% de ce PNB».

Il est donc normal que la grande majorité des banques s'interroge aujourd'hui sur la thématique de la banque de détail classique : sommes-nous aux bons endroits ? Les agences sont-elles rentables ? Avons-nous suffisamment de clients ?

Rationaliser ne veut pas pour autant dire diminuer. Le réseau physique, notamment au Maroc, a encore de beaux jours devant lui. Ce repositionnement augure plutôt de ce à quoi ressemblera la banque de détail de demain : une banque crosscanal, sans cloisons entre les différents modes de distribution.

 


Affinement du taux de bancarisation

Officiellement, le taux de bancarisation au Maroc avoisine les 70%. L’exploitation de la centrale des comptes bancaires mise en place par Bank Al-Maghrib permet dorénavant d’affiner cette statistique. Cette méthode permet en effet de calculer un indicateur de bancarisation neutralisant l’impact de la multi-bancarisation (personnes détenant plusieurs comptes bancaires) et se limitant aux comptes des particuliers par rapport à la population adulte (dont l’âge est supérieur à 15 ans).

D’après la Banque centrale, il ressort un taux de l’ordre de 56% au Maroc contre près de 62% au niveau de la moyenne mondiale. Ce taux varie selon les caractéristiques individuelles, telles que le genre, l’âge et la catégorie socio- professionnelle. Ainsi, selon les mêmes données de la centrale des comptes  bancaires, 77% des hommes adultes possèdent un compte auprès d’une banque, contre 37% de femmes.


 

A. Elkadiri

 

 

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