Frédéric Philibert, associé Directeur général du bureau de Casablanca
- Le cabinet Ailancy, spécialiste du conseil en organisation et management dans les métiers de la banque, de la finance et de l’assurance, vient d’inaugurer ses bureaux casablancais pour y déployer ses activités au Maroc et sur le continent.
- Frédéric Philibert, associé Directeur général du bureau de Casablanca, détaille les ambitions marocaines et africaines du cabinet, ainsi que les transformations actuellement en cours au sein du secteur bancaire marocain. Entretien.
Finances News Hebdo : Le cabinet français Ailancy, qui a absorbé le cabinet marocain Latitude Consulting, inaugure son nouveau bureau casablancais. Comment s’est fait le rapprochement entre les deux entités ?
Frédéric Philibert : Ailancy est un acteur majeur du Conseil en management et organisation en France. Le cabinet est aujourd'hui structuré autour de 3 business team : banque de détail et services financiers spécialisés (SFS), banque d'investissement et assurance.
Le cabinet marocain Latitude Consulting a été créé en 2011 au Maroc et nous opérons depuis 3 ans dans le Royaume sur des projets d’envergure, avec le cabinet français Ailancy. Ce dernier a été sollicité par de grands groupes français pour repenser et redynamiser les activités de leurs filiales au Maroc et en Afrique.
Cette expérience a notamment consisté à définir la stratégie sur 5 ans d’un grand acteur bancaire au Maroc. Ailancy a alors réfléchi à une implantation durable dans le Royaume pour être encore plus proche de ses clients.
Le 2 novembre 2017, nous avons signé la prise de participation d’Ailancy dans Latitude Consulting et, depuis, nous avons doublé nos effectifs. Des équipes françaises interviennent avec nous sur les projets au Maroc, et nous avons consolidé l’effectif avec certains consultants experts indépendants.
Aujourd’hui, notre équipe compte 32 personnes, qui interviennent pour le Maroc ou sur le reste du continent.
F.N.H. : Peu de temps après la fusion, Ailancy a obtenu le statut Casablanca Finance City. Pourquoi avoir sollicité ce label ?
F. Ph. : Notre état d’esprit est d’accompagner nos clients là où ils veulent aller. Il s’avère que la structure française du cabinet travaille essentiellement avec des banques françaises très présentes en Afrique.
Par ailleurs, au Maroc, nous travaillons avec les banques panafricaines, qui elles-mêmes sont très engagées en Afrique.
Il était donc totalement naturel pour nous de solliciter le statut CFC pour pouvoir accompagner nos clients sur le continent.
Le dossier CFC contient un certain nombre d’exigences auxquelles nous nous plions parce que nous avons cette ambition africaine.
F.N.H. : Vous êtes particulièrement actif au sein du secteur bancaire local. Quelles sont les problématiques du moment pour ces établissements ?
F. Ph. : Il y a d’abord les thématiques orientées technologie. On se rend compte que pour un certain nombre d’établissements, on arrive sur une fin de cycle concernant toutes les anciennes technologies qui ont été installées il y a quelques années.
Les banques ont donc décidé de se rééquiper en équipements qui soient plus en pointe, en termes d’ergonomie, de solutions légères…, ainsi qu’en termes d’outils qui vont couvrir les besoins de la transformation digitale.
Ensuite, autre sujet à la mode : nous voyons que certaines banques commencent à penser leur stratégie sur un horizon de 5 ans, avec des plans 2020-2021. Ces plans stratégiques se déclinent en plusieurs projets de transformation pour atteindre les objectifs fixés.
F.N.H. : Que pouvez-vous nous dire sur les sujets liés à la distribution qui semblent être une préoccupation majeure actuellement pour les banques ?
F. Ph. : Les sujets liés au réseau, à l’animation et l’efficacité commerciale, et la manière dont les banques adressent leur clientèle marocaine, sont des thématiques très prégnantes actuellement.
Les ouvertures d’agences ont beaucoup décéléré ces dernières années. La phase d’expansion et la volonté de bancariser est en train de se tasser. Nous sommes en train de toucher un plafond de verre.
Les banques, après plusieurs années de gros développements en nombre d’agences, prennent aujourd’hui de la hauteur, pour finalement étudier la rentabilité de ces réseaux.
La grande majorité des banques locales se pose de plus en plus de questions sur la thématique de la banque de détail classique (retail banking): sommes-nous aux bons endroits, les agences sont-elles rentables, avons-nous suffisamment de clients, etc. ?
Les banques peuvent se dire finalement que sur un réseau de 500, 1.000 agences ou plus, il y a certainement eu des loupés. On se rend compte que certaines agences, après 8 à 10 ans d’existence, ne sont toujours pas rentables.
Il y a un questionnement sur le repositionnement d’une partie du réseau, voire de sa rationalisation. Cela ne veut pas forcément dire une diminution du nombre d’agences, mais il s’agit plus d’un repositionnement du réseau.
Tout le monde le voit : le Maroc est en mouvement, des quartiers nouveaux se construisent un peu partout, de nouvelles villes se créent, des gens aisés quittent les centres-villes et s’installent en proche banlieue, etc. Le recensement général de la population au Maroc n’a lieu que tous les 10 ans (le dernier a eu lieu en 2014), en Europe, c’est tous les ans. En 10 ans au Maroc, il se passe énormément de choses.
Des études que nous avons menées récemment montrent qu’au Maroc, quand un réseau bancaire atteint une certaine taille critique, à peu près 10% des agences les plus performantes génèrent autour de 40% à 50% du PNB retail de la banque, tandis que 10% des agences les moins rentables génèrent moins de 3% du PNB.
Il y a donc quelque chose à faire pour rationaliser et optimiser son réseau de distribution. ■
Propos recueillis par A. E