Les 100 jours d’El Othmani : Le casse-tête d’Al Hoceima

Les 100 jours d’El Othmani : Le casse-tête d’Al Hoceima

 

 

Les troubles dans la province d’Al Hoceima, très mal gérés d’ailleurs, monopolisent pour l’instant l’action gouvernementale. Ils ont conduit à mettre en veille les autres urgences auxquelles doit faire face le Royaume.

 

 

Dévoilé le 5 avril dernier, le gouvernement El Othmani va bientôt boucler ses 100 jours. Ces 100 jours suffisent-ils pour juger un gouvernement et dresser son bilan ? Evidemment que non. Tout au plus permettent-ils aux citoyens de se faire une petite opinion sur les ministres, les actes qu’ils posent et si, globalement, les initiatives prises s’inscrivent dans l’esprit de la déclaration gouvernementale. Rappelons-le, le chef du gouvernement, Saad Eddine El Othmani, avait articulé son programme autour de 5 axes majeurs :

- le soutien du choix démocratique, des principes de l'Etat de droit et de la loi et la consécration de la régionalisation avancée;

- le renforcement des valeurs de la transparence, la réforme de l'administration et la consécration de la bonne gouvernance;

- le développement du modèle économique, la promotion de l’emploi et du développement durable;

- Le renforcement du développement humain et de la cohésion sociale et spatiale;

- le renforcement du rayonnement international du Maroc au service de ses causes justes dans le monde.

Mais le contenu de son programme gouvernemental aura été vivement critiqué par l’opposition. Selon cette dernière, ledit programme ne s'inscrit pas dans une perspective politique claire, manque d'objectifs déterminés et ne présente pas d’agenda précis pour sa mise en application. Ainsi, le groupe parlementaire du Parti authenticité et modernité (PAM ) et son allié, le parti de la Gauche verte, ont noté que le chef du gouvernement a présenté «une déclaration et non pas un programme gouvernemental, tel que le stipule l’article 88 de la Constitution, avec à l’appui des indicateurs chiffrés et précis dans le temps et dans l'espace et des objectifs basés sur des projets concordants et cohérents, ainsi que des mesures concrètes pour leur mise en application».

Le groupe parlementaire a estimé que le programme ne répond pas méthodologiquement aux normes internationales en vigueur, consistant essentiellement en l’adoption de stratégies intégrées sur les plans politique, économique et social, dotées du coût financier nécessaire et appuyées par des résultats prévisibles, «ce qui nous permettra en tant qu’opérateurs politiques et institution législative et de contrôle, de suivre et d’évaluer objectivement les réalisations accomplies, dans le respect du principe constitutionnel de lier la responsabilité à la reddition des comptes».

 

Trois mois plus tard…

 

Après trois mois, pratiquement rien du programme gouvernemental n’a réellement pris forme. Il faut dire qu’à peine El Othmani et son équipe ont pris fonction qu’ils ont eu à gérer le dossier Al Hoceima. Gérer ? C’est peut-être trop dire. Car ce dossier a été visiblement négligé, voire traité de manière très laxiste, au point de devenir une grosse épine dans le pied du gouvernement. En privilégiant le colmatage des brèches au lieu de trouver des solutions aux revendications sociales et économiques légitimes des populations, il a contribué à pourrir la situation, rompant la confiance ténue qui existait entre les élus et les protestataires. Aujourd’hui, la parole politique est devenue inaudible dans le Rif. Comme cela a été prouvé par les échecs successifs des délégations ministérielles envoyées pour tenter d’instaurer le dialogue avec les populations.

Même les annonces pour pacifier les esprits rebelles n’ont suffi à apaiser les tensions. Début juin déjà, El Othmani annonçait une enveloppe budgétaire de 50 milliards de dirhams allouée au Programme national 2016-2022 de lutte contre les disparités sociales et territoriales dans le monde rural, qui devrait permettre de résorber les déficits enregistrés en matière d'infrastructures et de services sociaux dans ces régions.

En définitive, ce qui devait arriver arriva. Le Roi a tapé fort sur la table pour que le gouvernement prenne conscience de l’urgence d’éteindre le feu qui brûle dans cette province depuis plusieurs mois. Le 25 juin dernier, mécontent et déçu de la non exécution dans les délais impartis des projets inscrits dans le grand programme de développement d’Al Hoceima, Manarat Al Moutawaset, le Souverain a décidé de priver de congés annuels les ministres concernés. Il a aussi donné ses instructions afin de mener les enquêtes et les investigations nécessaires sur la non-réalisation des projets programmés, déterminer les responsabilités et soumettre un rapport en la matière dans les plus brefs délais. Aujourd’hui, au sein du gouvernement, c’est le branle-bas de combat. On parle et on agit Al Hoceima (sic !), province devenue la priorité des priorités.

Au point qu’on en oublie des réformes cruciales comme celle relative au système de compensation ou encore celle des retraites. Après la réforme paramétrique du régime des pensions civiles, qui n’a pour objectif que la consolidation de sa santé financière à court et moyen termes, il est urgent en effet d’enclencher la seconde phase : la réforme globale du système de retraite national, susceptible de garantir sa viabilité à long terme.

Actuellement, une seule réforme semble avoir été menée jusqu’au bout : il s’agit de celle du régime de change, portée par la Banque centrale. Mais son entrée en vigueur, prévue ce début juillet, a été ajournée par le gouvernement, sans explications convaincantes.

Finalement, que retenir des premiers mois de cette législature ? Pas grand-chose, mais deux constats majeurs s’imposent :

- El Othmani, pour le premier dossier chaud auquel il a été confronté (Al Hoceima), a fait preuve de beaucoup de fébrilité;

- le chef de gouvernement a fait main basse sur le travail accompli depuis plus d’un an par la Banque centrale pour migrer vers un régime de change flexible. ■

 

D. William

 

 

 

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