Comme dans un étrange effet de balancier, les relations entre les deux rives de la Méditerranée viennent de connaître un mouvement de va-et-vient qui va participer à réécrire une nouvelle équation politique régionale. Paris s’ouvre sur Rabat tandis que la crise, déjà mutique, s’installe durablement entre Madrid et Alger. La concomitance de ces deux événements, leur étrange synchronisation indiquent leurs imbrications. Entre ces pays européens et le Maghreb, les lignes sont en train de bouger, manifestement en faveur du Maroc. Longtemps attendue, la position du nouveau ministre des Affaires étrangères français, Stéphane Séjourné, a fini par s’exprimer. Il est vrai qu’elle s’est faite d’une manière étrange et inédite.
La révélation par le biais de la presse de directives données par Emmanuel Macron à son ministre des Affaires étrangères Séjourné de s’investir personnellement dans l’amélioration des relations entre la France et le Maroc. Un bon signal de Paris en direction de Rabat qui révèle par la même occasion l’existence de contacts renouvelés entre les deux pays pour parvenir à un compromis politique qui mettrait fin à cette longue crise francomarocaine.
Pour les plus hésitants, il est difficile au jour d’aujourd’hui de faire la part des choses entre un exercice de communication politique d’un nouveau ministre qui cherche à se faire bien voir après une prise de fonction inattendue et un vrai choix diplomatique de la part du Palais de l’Elysée de véritablement crever l’abcès qui empoisonne les relations entre Rabat et Paris. Le baromètre pour solder cette crise est clair pour tout le monde. Une reconnaissance pleine, entière, sans forfaitures de la souveraineté du Maroc sur son Sahara. Comme pourrait le dire un certain proverbe, les promesses n'engagent que ceux qui les formulent. Le Maroc, qui a le temps pour allié, est confortablement installé dans une posture de «Wait and see».
Tandis que des vents optimistes soufflent actuellement sur l’axe Rabat - Paris, les relations entre l’Algérie et l’Espagne viennent de connaître un nouvel épisode de crise qui risque sérieusement de compliquer les rapports entre les deux pays. En jeu, une annulation très peu diplomatique d’une visite que le ministre des Affaires étrangères espagnol, José Manuel Albares, à l’invitation de son homologue algérien Ahmed Attaf. Cette visite avait pour objectif de tenter de clore le grand chapitre des divergences qui tournait autour du reproche fait par Alger à Madrid d’avoir reconnu la souveraineté marocaine sur le Sahara.
L’annulation de cette visite a fait couler beaucoup d’encre sur ses motivations. Le régime algérien espérait profiter de cette visite pour arracher une déclaration espagnole indiquant que Madrid est revenue sur son approche pro-marocaine. Ce que le ministre des Affaires étrangères espagnol Albares aurait fermement refusé, redisant avec encore plus de force le choix souverain et irréversible de Madrid. Cette posture espagnole a profondément choqué le régime algérien dont certains cercles s’accrochaient désespérément à l’idée d’un recul ou d’un revirement. Le drame politico-médiatique qui s’est joué autour de cette annulation, renseigne sur la détérioration des relations entre le régime algérien et l’Espagne, et souligne avec beaucoup de force l’isolement de plus en plus grand de l’Algérie dans son environnement régional.
Il révèle aussi qu’Alger a perdu son bras de fer avec Madrid et illustre l’échec de sa politique de chantage à l’encontre de son voisinage sur le Sahara marocain. Cette nouvelle crise entre Algériens et Espagnols est de nature à avoir un dommage collatéral pour Alger. Elle pourrait impacter la vision et les choix que Paris serait en train d’élaborer pour tenter de normaliser ses rapports avec le Maroc à travers une reconnaissance du Sahara sur le mode américain. La diplomatie française ne l’a pas fait jusqu’à présent parce que freinée de l’intérieur par le tropisme algérien du président Macron. La multiplication des crises et des tensions régionales provoquées par le régime algérien pourrait désarmer ses dernières réticences et lui permettre de regarder ce régime algérien avec beaucoup plus de réalisme et de vérité.
Par Mustapha Tossa journaliste et politologue