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Microfinance : potentiel énorme vs marché faible

Microfinance : potentiel énorme vs marché faible

Les microcrédits dépassent à peine 0,8% de l’encours des crédits bancaires, contre 7% en Amérique latine et 5% en Afrique subsaharienne. Le secteur de la vcpeut jouer un rôle fondamental à travers le renforcement de l’inclusion financière. Entretien avec Lahcen El Amli, professeur universitaire.

 

Propos recueillis par C. Jaidani

Finances News Hebdo : Comment se présentent les indicateurs du microcrédit au Maroc ?

Lahcen El Amli : Pour répondre à votre question, commençons tout d’abord par exposer quelques chiffres rendant compte de la situation du secteur du microcrédit au Maroc à fin 2022. Ce sont les derniers chiffres disponibles présentés dans le rapport de la Banque centrale sur la Supervision bancaire concernant cette année. Composante particulière du système financier national, le secteur du microcrédit est le fait de 11 associations qui représentent 12% du nombre total des établissements de crédit en décembre 2022. Trois d’entre elles sont relativement de grande taille (total bilan, encours des crédits) et concentrent l’essentiel de l’activité du secteur. Il s’agit de la Fondation populaire pour le Microcrédit relevant du périmètre de la Banque Centrale Populaire, la Fondation Ardi, du Crédit Agricole du Maroc, et l’association Al Amana. Toujours à fin 2022, le réseau du secteur compte 1.678 points de vente à travers le territoire national. Il est concerné par un total bilan de l’ordre de 9,7 milliards de DH (Mds de DH), en nette augmentation par rapport à 2020 (8,6 Mds de DH). L’encours brut des crédits avait atteint 8,4 Mds de DH, en légère augmentation comparativement à 2021 (8,2 Mds de DH) et 2020 (8,1 Mds de DH); l’encours moyen de crédits s’est élevé à 10.500 DH en 2022 contre 9.800 DH en 2021.

 

F.N.H. : Qu’en est-il de la structure des crédits ? 

L. E. A. : L’examen de la structure des crédits montre que  : i- plus de 98% sont distribués par les 4 plus grandes associations; ii- les crédits sont essentiellement destinés à la microentreprise (79% contre 77% en 2021) suivie par l’habitat social, stable à 14%; iii- les crédits en milieu urbain représentent 70% contre 68% en 2021; iv- la prédominance des crédits individuels  : leur part s’élève à 87% contre 13% pour les prêts dits solidaires. Les créances en souffrance des associations de microcrédit ont totalisé 606 millions DH (MDH) en 2022, en baisse de 28,1% par rapport à 2021, soit un taux de risque de 7,2%, en nette amélioration par rapport à 2021 où ce taux a été de 10,3%. Les créances en souffrance sont couvertes par des provisions à hauteur de 60%, contre 48% en 2021. Les créances sur les établissements de crédit et assimilés, constituées principalement par des dépôts auprès des banques, s’élèvent à 319 MDH, soit 3,3% seulement du total actif de l’ensemble des associations de microcrédit à fin 2022. L’endettement bancaire des associations de microcrédit s’est établi à 5,4 Mds de DH, représentant 68% de leurs ressources. L’essentiel de cet endettement (90%) concerne les banques locales. Les fonds propres des associations de microcrédit (AMC) ont été de 2,5 Mds de DH, soit 26% du total passif du secteur contre un ratio de 9,3% pour l’ensemble des banques, 9,48% (12.123 MDH/127.856 MDH pour les sociétés de financement et 10,19% (6.672 MDH/ 65.481 MDH) dans le cas des sociétés de crédit à la consommation.

 

F.N.H. : Mais l’activité reste fragile…, elle est toujours maintenue à travers le soutien de l’Etat ?

L. E. A. : Le secteur du microcrédit a clôturé l’exercice 2022 avec un résultat net cumulé de 132,2 MDH, contre une perte cumulée de 55,4 MDH en 2021. Il importe de mentionner que ce résultat net de 2022 a été soutenu par une opération de subvention accordée par l’Etat de 179 MDH ayant compensé 50% des intérêts intercalaires supportés par les autorités au titre des créances reportées lors de la crise du Covid 19. Six associations de petite taille étaient concernées par des résultats déficitaires en 2022. Le plafond des crédits que peuvent accorder les AMC à leur clientèle est fixé à 150.000 DH. Dans le cadre des efforts visant la modernisation du secteur, la loi 50-20 a introduit d’importantes nouveautés dont l’introduction de la possibilité de constitution des institutions de microfinance sous deux formes juridiques distinctes  : la forme de société anonyme, en tant qu’établissement de crédit et la forme associative, en tant qu’organisme assimilé à un établissement de crédit. La loi prévoit également l’extension du champ d’activité des IMF  : outre l’octroi de microcrédits, elle autorise les IMF à exercer les activités de collecte des dépôts, d’opérations de la micro-assurance et de la fourniture à leur clientèle de prestations de conseil, de formation et d’accompagnement technique en matière de microfinance. Telles sont quelques données de base décrivant la structure et le niveau d’activité du secteur du microcrédit à la fin de 2022.

 

F.N.H. : Comment se décline l’évolution du secteur ?

L. E. A. : Il faut savoir que ce secteur a connu une évolution que l’on peut décomposer, grosso-modo, en trois phases : • Une phase de croissance pouvant être qualifiée de forte et qui s’étale depuis la naissance du microcrédit au début des années 1990 jusqu’en 2007 : l’encours des crédits entre 2001 et 2007 est passé de 100 MDH à 5,3 Mds de DH, soit un accroissant de 5.200% sur toute la période considérée. Le nombre de clients servis par les AMC (associations de micro-crédit) a évolué de 133.139 en 2001 à 1.315.703 en 2007, soit un accroissement de l’ordre de 888% sur la période. Le portefeuille à risque (PAR) de 30 jours et plus (PAR>30), principale mesure du risque concernant le secteur, affichait un taux de 1,9% en 2007, en dessous de la moyenne mondiale qui était de 2,7% (MIX, 2010). A l’issue de cette phase, le secteur marocain du microcrédit a été décrit comme le fleuron du marché de la microfinance dans le monde arabe(1). • une deuxième phase s’est étalée entre 2008 et 2011 et au cours de laquelle le secteur du microcrédit au Maroc a traversé une période de crise. A partir de 2008, le secteur s’est confronté à une crise majeure due à l’insolvabilité des clients. A l’origine de cette crise se trouve avant tout :

i- la forte croissance de l’activité qui n’a pas été maîtrisée; la concurrence forte entre les AMC a débouché sur des faiblesses dans les contrôles internes et a contribué à l’émergence de l’endettement croisé (un client bénéficie de plusieurs prêts auprès de plusieurs AMC);

ii- des politiques de crédit laxistes;

iii- la défaillance des systèmes d’information et de gestion. L’encours des crédits qui était de 5,32 Mds de DH en 2008 a baissé à 4,6 Mds de DH en 2011, soit une baisse de 16%. Le nombre de clients qui était de 1.315.703 en 2007, a baissé à 1.230.192 en 2008 puis à 797.700 en 2011. Le PAR >30 est passé de 1,9% en 2007 à 5,1% en 2008, 10,6% en 2009, puis à 7,4% en 2010 et à 6,2% en 2011.

Au cours de cette même phase, l’Etat a pris des mesures visant le sauvetage et le redressement de ce secteur, mesures qui vont être renforcées au cours de la troisième phase. Ces mesures sont allées dans plusieurs directions  : l’élévation de la transparence, l’amélioration de la gouvernance des AMC, le contrôle du surendettement, la sécurisation de la liquidité et le développement du cadre réglementaire du secteur. La Banque centrale a joué et joue un rôle central dans l’action de redressement et de relance du secteur : mise en place en 2009 du «Crédit bureau officiel» auquel toutes les AMC sont tenues de se conformer et de fournir toutes informations relatives aux crédits, mécanisme de refinancement des concours octroyés par les banques au secteur, supervision de l’activité des AMC, incitation des banques à financer les AMC, etc.

La dernière phase commence en 2012, elle peut être qualifiée de phase de relance. Suite à la réactivité des pouvoirs publics (gouvernement, Banque centrale) et aux efforts déployés par les AMC en matière de gouvernance, le secteur a pu sortir de la crise et renouer avec la croissance des crédits, bien que dans des rythmes de progression de loin moindres que ceux de la première phase. Ainsi, entre 2012 et 2022, l’encours des prêts est passé de 4,6 à 8,4 Mds de DH, soit un taux d’accroissement global de 83%. Le nombre de clients a connu d’abord une progression entre 2012 et 2017, en passant de 808.112 à 937.599, puis une baisse par la suite à 905.456 en 2019 et à 795.000 en 2022. Le réseau s’est contracté de 1.770 en 2020 à 1.678 en 2022 (effet de rationalisation et d’optimisation des coûts). Le résultat net des AMC qui était de 0,17 Md de DH en 2012 est passé à 220 MDH en 2019 avant de s’établir en 2020 à – 246 MDH (suite à la décélération de l’activité, couplée avec le report des échéances et à la montée des risques) et à – 55,4 MDH en 2021, avant de monter à 132,2 MDH en 2022. En somme, la baisse d’activité, la faible croissance des crédits, le recul du nombre de bénéficiaires, la contraction du réseau et des effectifs employés, caractérisent l’évolution du secteur au cours des dernières années. Il faut souligner que cette évolution a lieu dans un contexte que caractérise une succession de crises avec leurs impacts négatifs sur sa reproduction : Covid 19, sécheresse chronique, inflation… C’est grâce à la réactivité des pouvoirs publics (mesures de soutien financier, réformes du secteur pour sa modernisation et sa relance, contrôle du secteur par Bank Al- Maghrib…) et aux diverses mesures entreprises par les AMC (gouvernance, maîtrise des risques, etc.), que le secteur avait évité de s’engouffrer dans une crise profonde pouvant déboucher sur la chute de plusieurs acteurs, en particulier les AMC de petite taille. Toutes ces actions et mesures ont été à l’origine d’une meilleure maîtrise de la croissance des crédits et des risques.

 

F.N.H. : Quels sont les points faibles à relever dans le secteur ?

L. E. A. : De nombreux points faibles sont à relever, on note particulièrement : • le taux de pénétration du marché du microcrédit demeure faible, et ce malgré un potentiel énorme sur ce plan. Le nombre de clients servis à fin 2022 n’a été que de 795.000, un chiffre qui est très en dessous de l’objectif de plus de 3.000.000 clients à l’horizon 2020 prévu dans le cadre de la stratégie nationale de microfinance (BAM, rapport sur la supervision bancaire 2012). En 2020, seules 34% des communes rurales sont couvertes par le réseau des AMC. Pour les communes urbaines, le taux est de 66%. En 2020 toujours, seuls 32% des ruraux ont un microcrédit, contre 68% en milieu urbain. • Les taux d’intérêt pratiqués par les AMC sont élevés  : entre 18 et 24% (calculs personnels sur la base des taux mensuels pratiqués par certaines associations); entre 18 et 37% (Mounia HDA et Zineb HDA, La microfinance au Maroc  : origines et développements, 2022); entre 30 et 35% (Lahcen Oudoud, ‘’En méforme, le microcrédit à la recherche d’un nouveau souffle, Site le 360, 01/02/2024); • retards dans l’application de la loi qui a étendu le champ d’intervention des AMC à d’autres produits : collecte de l’épargne, micro-assurance… • la forte concentration des crédits  : selon le rapport de BAM sur la supervision bancaire de 2022, plus de 98% des crédits sont distribués par les 4 plus grandes associations.

 

F.N.H. : Quel rôle peut jouer ce secteur dans le développement de l’économie sociale ?

L. E. A. : Le secteur de la microfinance peut en effet jouer un rôle fondamental à travers le renforcement de l’inclusion financière, la lutte contre la pauvreté et la marginalisation, l’insertion des populations économiquement faibles, la création de l’emploi et l’amélioration des revenus de larges couches de la population qui sont marginalisées et vivant dans la précarité. La microfinance peut être à l’origine de la consolidation du tissu productif national à travers un financement adéquat et ciblé des très petites entreprises et des micro-entreprises. Elle peut favoriser l’amorce d’une dynamique productive au service du développement des territoires et de la création de la valeur. Elle peut agir comme un important levier pour le passage du secteur informel vers le secteur formel, avec toutes les implications que cette migration peut entraîner en matière de ressources pour le budget de l’Etat. Mais cela repose sur un certain nombre de préalables. Il faut tout d’abord mettre en place les mécanismes et les conditions favorables à l’augmentation du taux de pénétration du marché du microcrédit (développement des infrastructures notamment en milieu rural  : couverture des communes par le réseau du microcrédit, commercialisation des produits et accès aux marchés, formation et accompagnement des porteurs de projets, accès au financement…). Il faut également renforcer le fonds de garantie des crédits octroyés par les AMC et plus particulièrement au profit des AMC de petite taille. En troisième lieu, il y a lieu d’accorder une attention particulière à la question des taux d’intérêt qui pèsent lourdement sur les résultats des AMC et affectent leur reproduction. La fiscalité relative à la microfinance doit être bien adaptée et tenir compte de l’environnement global dans lequel fonctionnent les AMC. La diversification de la gamme des produits financiers (épargne, crédit, assurance, transferts de fonds…) est un axe majeur sur lequel l’ensemble des acteurs concernés doivent travailler pour permettre un développement conséquent du secteur de la microfinance et réduire sa forte dépendance vis-à-vis des bailleurs de fonds, les banques en particulier. Pour avoir un impact économique (augmentation de la production, création des revenus…) et social (amélioration du niveau de vie des populations…), un accompagnement avant (montage du projet) et après l’octroi des crédits (suivi de la réalisation des projets) s’impose pour plus d’efficience. Un autre problème, et non des moindres, est constitué par la non réalisation de l’objet pour lequel le crédit a été accordé. L’état de pauvreté dans lequel se trouvent les clients des AMC fait qu’une bonne partie sinon la totalité du crédit va à la consommation, une situation qui se trouve à l’origine des difficultés de paiement des crédits à l’échéance. Souvent, le client s’adresse à d’autres personnes qui lui prêtent de quoi rembourser ses crédits, ce qui est à l’origine d’un surendettement.

 

F.N.H. : Y a-t-il un impact du microcrédit sur les bénéficiaires ?

L. E. A. : C’est une question centrale et qui revêt un grand intérêt. Plusieurs études d’impact ont été menées aussi bien par les institutions de microcrédit que par les bailleurs de fonds et les chercheurs, en adoptant différentes méthodologies d’évaluation. Nombreuses sont celles qui ont montré que le microcrédit a eu globalement un impact positif en termes d’amélioration des revenus des bénéficiaires, de l’activité de production (extension de la capacité productive, amélioration de l’outil de production, de l’amélioration du niveau de vie et du bien-être des ménages (scolarisation des enfants, conditions de logements…). Mais d’autres études ont conclu au caractère limité de l’impact du microcrédit sur les bénéficiaires. Selon les discussions que j’ai eues avec des cadres et responsables d’agences de microcrédit, il se dégage que : • Dans le cas des microentreprises qui ont un minimum de formalisme (fonds de commerce, inscrits sur le registre national, autoentrepreneur, attestations de l’autorité locale…), dans une grande proportion l’impact est tangible : développement de l’activité, organisation, amélioration du revenu. • Dans un grand nombre de cas, les crédits sont affectés à la consommation ou à des dépenses familiales diverses (financement de la scolarité des enfants, remboursement d’un autre crédit, équipements de la maison, etc.) C’est l’exemple d’une femme qui se présente comme une entrepreneure  (couturière, broderie, micro agricultrice, éleveur, artisan…). Elle bénéficie du crédit en étant cautionnée par son mari ou un proche qui est fonctionnaire, la dette est bien garantie pour l’institution du microcrédit. Avant de conclure ces quelques idées sur l’impact du microcrédit, rappelons cette évidence  : l’accès au financement à travers le microcrédit peut, dans des conditions bien déterminées, contribuer dans une grande mesure à l’inclusion financière et la réduction de la pauvreté, mais il ne peut pas résoudre tous les problèmes liés à la question du développement. A côté du financement, il y a d’autres problèmes qu’il faut traiter à travers des moyens et mécanismes appropriés (formation et accompagnement des micro-producteurs, conditions de commercialisation de leurs produits, amélioration de l’infrastructure routière, des infrastructures de commercialisation, électrification, etc.).

 

F.N.H. : Comparativement aux autres pays, comment jugezvous l’expérience marocaine ?

L. E. A. : Relevons tout d’abord que l’expérience marocaine de microfinance s’est considérablement enrichie au fil du temps et particulièrement au cours des deux dernières décennies grâce notamment à l’effort soutenu de réglementation et d’organisation et au soutien régulier des pouvoirs publics. Ces derniers en ont fait un canal de lutte contre la pauvreté et l’exclusion et un vecteur puissant de l’inclusion financière. Dans le cadre de différentes études, les auteurs ont souligné le caractère de développement avancé du secteur de la microfinance au Maroc, au sein des pays arabes et des pays MENA. En 2010, on pouvait lire dans un article de la Banque mondiale sur la microfinance dans le monde arabe, que «le Maroc, en particulier, se distingue comme le marché de la microfinance le plus mature de la région (MENA) avec les niveaux d’infrastructures les plus hauts en termes de dotation en personnel et des réseaux de succursales et la plus grande base de l’actif et du portefeuille de prêts. En outre, le marché marocain a été parmi les premiers dans la région à introduire une loi réglementant le secteur en 2000».  Dans sa conclusion d’un article intitulé : «La microfinance au Maroc : origines et développements», les auteurs écrivent, en se référant au rapport MIX-Market 2015 que «le Maroc possède l’un des secteurs de la microfinance les plus puissants et les plus dynamiques de la région MENA». (Mounia HDA et Zineb HDA, 2022). De notre part, nous jugeons utile d’introduire quelques observations. S’il n’y a aucun doute que le secteur de la microfinance a pu se faire une place dans le système financier national et sert un nombre non négligeable de clients, il y a lieu de savoir que les microcrédits dépassent à peine 0,8% de l’encours des crédits bancaires, contre 7% en Amérique latine et 5% en Afrique subsaharienne (source  : Peter MCConaghy, «Développer la microfinance dans les pays arabes». Blog Banque mondiale, 29 août 2023). Sur un autre plan, le potentiel de développement des différents secteurs économiques (petite et micro-agriculture, artisanat, pêche, services, commerce…) et de la population que la microfinance peut toucher et servir, est énorme. Un long chemin reste à parcourir par la microfinance au Maroc pour pouvoir mieux exploiter ce grand potentiel.

 

F.N.H. : Quels sont les éléments sur lesquels il faut capitaliser pour développer ce secteur ?

L. E. A. : Pour insuffler une dynamique au secteur et lui permettre de jouer véritablement un rôle de vecteur d’inclusion économique et financière de larges couches de la population, il faut entreprendre un certain nombre d’actions allant dans différentes directions : • renforcer les dispositifs d’évaluation des dossiers de crédit avant et après l’octroi de ce dernier. Cela est de nature à aider à bien connaître sa clientèle et mieux maîtriser les risques; • accélérer la transformation des AMC en Institutions de micro-finance (IMF) offrant à la clientèle d’autres produits dont notamment la collecte de l’épargne (dépôts), la micro-assurance, le transfert des fonds, le conseil à la clientèle. Cela va permettre aux IMF d’améliorer considérablement leur activité et leurs résultats ainsi que leur contribution au développement; • faire bénéficier les IMF d’un régime fiscal approprié tenant compte de la dimension des risques qu’elles supportent; • revoir la réglementation relative aux créances en souffrance et augmenter la durée de la radiation des créances; • améliorer la formation du personnel et contribuer à l’éducation financière des clients; • renforcer le fonds de garantie des prêts des institutions de microfinance; • couvrir les communes non touchées par les IMF et plus particulièrement celles disposant d’un fort potentiel en matière de création d’activités génératrices de revenus.

 

F.N.H. : Le secteur bancaire a-t-il un rôle à jouer pour accompagner ce secteur ?

L. E. A. : Les banques peuvent apporter leur contribution à trois niveaux  : 1- au niveau du financement des IMF en apportant davantage de concours financiers à ces dernières pour développer leur activité et toucher plus de clients et de territoires; 2- au niveau des taux d’intérêt  : tout en tenant compte des risques, les banques sont appelées à consentir des prêts aux IMF à des taux d’intérêt préférentiels pour pouvoir à leur tour accorder des crédits à leurs clientèles à des niveaux supportables; 3- pour les banques ayant leurs IMF, étendre leur réseau aux communes non touchées et disposant d’un fort potentiel en matière de création d’activités. Il n’est pas difficile de montrer que les banques finiront par gagner de l’argent à la suite de cette participation car les fonds prêtés aux IMF serviront dans une bonne proportion à l’achat de matières premières, de matériel et d’équipements et autres intrants auprès de leurs fournisseurs. Or, ces derniers, du moins une grande partie d’entre eux, sont des clients des banques. Ces dernières profitent bien des opérations qu’engagent ces clients avec elles, aussi bien en termes de dépôts (ressources gratuites pour les banques) qu’en matière de crédits.

 

 

 

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