Voilà plusieurs semaines que l’on évoque une stagnation de la baisse des taux des crédits immobiliers. Surtout depuis qu’Abdellatif Jouahri, Wali de Bank Al-Maghrib, a sifflé la fin de la guerre des taux que se livraient les banques commerciales depuis plusieurs mois.
Bank Al-Maghrib a en effet adressé une lettre au GPBM (Groupement professionnel des banques au Maroc) rappelant les banques à l'ordre sur «la concurrence anarchique» qu’elles se livrent sur les taux, mettant en péril la rentabilité et la solidité du secteur.
Ce rappel à l’ordre de la Banque centrale devrait avoir pour conséquence une remontée des taux pratiqués, notamment sur le crédit à l’habitat.
Il y a encore quelques mois, précisément durant le premier trimestre 2017, «les clients marocains ont pu obtenir des taux à un niveau historiquement bas. Ainsi, certains clients ont pu accéder à des taux variables de 3,5% sur 20 ans, de 4,3% fixes sur 15 ans et de 4,5% sur 25 ans. Ce sont des records jamais atteints au Maroc», rappelle Yassine Lahlou, Directeur général de meilleurtaux.ma, spécialiste du crédit immobilier.
Suite à ce rappel à l’ordre de Bank Al-Maghrib, de nombreuses banques menacent d’augmenter leurs taux dans les semaines à venir.
«Ces taux pourraient alors atteindre les niveaux pratiqués il y a deux ans, c’est-à-dire proches de 5% sur 20 à 25 ans», ajoute Y. Lahlou. Une remontée qui se fera de manière progressive.
Cette analyse est corroborée par les dires de Baldoméro Valverde, Président du Directoire du Crédit du Maroc (CDM), au micro de Boursenews. Valverde explique qu’il «faut s’attendre a un retour à des taux plus proches de ceux que l’on a connu auparavant». En langage plus direct, on dirait que les soldes sont bel et bien finis.
Ces mots ont d’autant plus de résonnance qu’il faut garder à l’esprit que le Crédit du Maroc est la banque à l’origine de la première démarque sur les taux des crédits immobiliers. C’était déjà en juin 2015. A l’époque, le groupe bancaire a lancé une offre quasi imbattable à 4,5% pour les taux fixes. En juillet, le CDM en remettait une couche, avec une offre à 3,99% pour les taux variables, obligeant les autres établissements de crédit à suivre, malgré eux, la tendance.
Cette parenthèse qui aura donc duré près de 2 ans se referme, rattrapée par les «menaces» qui pèseraient sur la rentabilité des banques.
«A la lumière des résultats des banques, il y a un tassement au niveau du PNB avec un recul de la marge d’intermédiation. Le gouverneur a appelé les établissements de crédits à la vigilance, à juste titre, pour que la compétition entre les banques ne mette pas en danger la solidité du secteur», analyse Valverde.
«Tout le monde était conscient que cela allait trop vite et trop loin, d’où un retour à un niveaux de taux normal», poursuit-il.
Néanmoins, se félicite le président du CDM, «un grand nombre de marocains a pu acheter un logement grâce à cette baisse des taux».
Cette remontée annoncée des taux posent à présent deux questions : l’effet prix va-t-il compenser l’effet volume au niveau de la marge d’intermédiation des banques ?
Deuxièmement, la hausse des taux ne va-t-elle pas freiner la relative reprise des ventes de l’immobilier constatée notamment sur les majors du secteur (Addoha par exemple a pu réaliser un niveau de pré-ventes au premier trimestre 2017 au-dessus des prévisions) ?