Entretien avec Sidimohamed Abouchikhi, Directeur général de Creditinfo Maroc
Les données alternatives provenant des grands facturiers permettront de combler l’absence d’historique d’informations pour les clients non bancarisés.
La disponibilité de ce type d’information donnera la possibilité aux établissements de financement de s’ouvrir, avec moins d’appréhension, sur une nouvelle clientèle.
Propos recueillis par M.D
Finances News Hebdo : Comment le Credit Bureau peut-il faciliter l’accès au financement des autoentrepreneurs et des porteurs de projet, sachant qu'il y a quelque temps vous aviez annoncé sur nos colonnes le lancement d’une panoplie de nouveaux services (scoring client, solutions de monitoring et d’alerting) et de nouveaux produits qui concernent la TPE, le recouvrement et le consommateur direct ?
Sidimohamed Abouchikhi : Les créanciers évaluent la solvabilité des demandeurs de crédit et de prêt en fonction de deux critères de base : la capacité financière ou la capacité de rembourser un prêt, et la volonté de rembourser celui-ci.
L'objectif fondamental d'un système d'évaluation du crédit est de s'attaquer aux asymétries d'information, ce qui est crucial pour déterminer la capacité et la volonté de remboursement.
L'information sur le crédit peut donc être extrêmement précieuse pour les créanciers pour des évaluations améliorées et fondées.
Creditinfo contribue à faciliter l’accès au financement, y compris pour la TPME, en offrant sur le marché des services à très haute valeur ajoutée (VAS) tels que le score pour les particuliers et les entreprises, le screening des portefeuilles par le monitoring et l’alerting ainsi que des solutions de decisioning et l’analytics.
Ces solutions permettent aux établissements de crédits de mieux connaitre leurs clients en leur proposant des offres adaptées à leurs besoins et à moindre coût. D’autres solutions verront le jour très prochainement, d’autant plus que la demande est de plus en plus croissante sur l’information traitée.
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F.N.H. : Aujourd'hui, les banques sont-elles suffisamment outillées pour accompagner comme il se doit les jeunes porteurs de projet, les diplômés, les TPME et les autoentrepreneurs, tout en maîtrisant les risques d’insolvabilité ?
S. A. : Le secteur des TPE-PME au Maroc, qui représente 95% du tissu économique national, est majoritairement dominé par l’informel ne justifiant pas de données financières ou de businessplans permettant aux banques une meilleure analyse du risque dans un cadre de plus en plus contraignant par des dispositifs réglementaires et prudentiels. Alors que la majorité des crédits aux particuliers sont actuellement formatés et industrialisés et peuvent même être digitalisés, ce qui est déjà le cas pour certains établissements de la place.
Le financement des TPME nécessite plus de proximité et une meilleure connaissance du besoin en termes de financement. Dans ce sens, le rôle de la banque en tant que partenaire ne se limite pas seulement à mettre à disposition des fonds mais également d’accompagner les jeunes entrepreneurs en apportant du conseil et du suivi.
Ainsi, les moyens humains et les solutions de Big data (tel que Creditinfo VAS) seront de plus en plus sollicités pour recueillir et analyser des données autres que financières de type qualitatives ou comportementales qui pourront combler le manque d’informations financières.
Cela étant dit, l’exigence de transparence de la part des TPME et du respect des engagements vis-à-vis de leurs créanciers reste primordiale. Le succès et la réussite des TPME sont intimement liés à la solvabilité et au comportement financier de leurs dirigeants.
F.N.H. : Au regard du récent appel royal aux banques, n'est-il pas opportun d’intégrer les données dites alternatives détenues, entre autres par les fournisseurs d'eau, d'électricité et les opérateurs télécoms dans l'activité du Credit Bureau au Maroc ?
S. A. : Il est indéniable que les données alternatives, provenant des grands facturiers tels que les opérateurs télécoms, les fournisseurs de services publics (eau et électricité), les compagnies d’assurances ou autres, permettront de combler l’absence d’historique d’informations pour les clients non bancarisés.
La disponibilité de ce type d’information donnera la possibilité aux établissements de financement de s’ouvrir, avec moins d’appréhension, sur une nouvelle clientèle (particuliers et TPME), ne disposant pas d’historique bancaire, mais justifiant de bonnes habitudes de paiement, et ce tout en réduisant le recours aux garanties.
Pour Creditinfo, l’intégration de ces données nous permettra d’activer et d’enrichir notre offre au marché par de nouveaux services comme le mobile score et la détection de la fraude.
F.N.H. : Enfin, au regard de tout ce qui précède, quel est l'avenir de Credit Bureau en lien avec la digitalisation progressive des services financiers au Maroc ?
S. A. : Comme vous le savez, le Credit Bureau est un organisme de collecte, auprès des organismes financiers, des sources publiques et des grands facturiers, des données disponibles sur les antécédents de crédit ou de paiement d'un emprunteur.
De même, le Credit Bureau commercialise les informations traitées auprès d'établissements de crédit ou autres établissements commerciaux.
De ce fait, la digitalisation est une opportunité pour cette industrie car de nouvelles sources d’information sont de plus en plus disponibles et sollicitées. Pour le cas du Maroc, nous ne sommes qu’au début de l’utilisation de la metaData et nous devrons doubler les efforts pour profiter des avantages qu’elle offre. ◆