Les recommandations des assises de 2015 ne sont pas encore prises en considération. L’arsenal juridique a pris un coup de vieux.
Par C. Jaidani
Le Maroc s’est lancé depuis des années dans de vastes programmes de développement impliquant des stratégies sectorielles très ambiteuses, à l’image du Plan d’accélération industrielle ou du Plan Maroc Vert (PMV). Au niveau de l’habitat, le pays veut réduire le déficit de logement. C’est pourquoi après le programme du logement social, un dispositif prévoyant des aides directes au profit des acquéreurs vient d’être lancé.
Le foncier joue un rôle clef pour la réussite de tous ces programmes. Conscient de cet enjeu, l’Etat s’efforce de concrétiser une politique dédiée afin de répondre adéquatement aux besoins des opérateurs socioéconomiques. Les assises du foncier, organisées fin 2015, se sont penchées sur le sujet. A l’issue de cet événement, le gouvernement a demandé au Conseil économique, social et environnemental (CESE) de diligenter une étude. Cet organisme a livré son avis en 2019.
«Pratiquement, toutes les branches d’activités sont pénalisées par la rareté ou la hausse du coût du foncier. Quand il est disponible à prix abordable, il est soit peu ou mal équipé soit très loin des zones d’activité. Dans certaines régions à fort potentiel agricole, il existe des terrains très fertiles, mais qui ne sont pas dotés de périmètres irrigués comme la Chaouia, considérée comme le grenier du Royaume. Pour l’immobilier, la problématique est plus accentuée dans les grandes agglomérations. Les promotteurs sont contraints de chercher dans les périphéries pour trouver des terrains à un coût compétitif, particulièrement pour les logements de type social ou dédiés à la classe moyenne», souligne Mohamed Alaoui, expert en immobilier.
Concernant l’industrie, Alaoui précise que l’offre foncière dans le secteur est assez conséquente, et ce grâce aux efforts déployés par les autorités pour élargir l’assiette afin de proposer des terrains équipés et bien aménagés dédiés aux opérateurs. Parfois, il existe des disparités interrégionales et aussi sectorielles qu’il faut combler. Et de noter que «la politique foncière au Maroc reste essentiellement focalisée sur le milieu urbain, marginalisant le milieu rural. Des statuts juridiques hérités du passé demeurent toujours en vigueur, pénalisant l’investissement. Huit ans après les assises du foncier au Maroc, les recommandations formulées ne sont pas encore prises en considération. L’avis du CESE à ce sujet est clair et explicite, prônant une feuille de route avec un échéancier précis».
L’expert en immobilier explique que «la réforme de la politique foncière revêt de nombreux aspects, notamment législatifs, comme la refonte des textes liés à l’expropriation, aux lotissements, les dérogations accordées dans la construction. Il est question aussi de revoir en profondeur la gestion du foncier public qui est un important levier pour booster l’offre de terrains. L’arsenal existant actuellement a pris un coup de vieux».