Les 8 commandements de McKinsey pour une reprise solide de l’activité

Les 8 commandements de McKinsey pour une reprise solide de l’activité

Dans les semaines à venir, et dans la perspective d’une sortie de crise, les entreprises devront résoudre une équation inédite, dont les inconnues sont encore extrêmement nombreuses.

Pour y voir plus clair, le cabinet McKinsey publie une étude intitulée «Amorcer le redémarrage – 8 axes pour sécuriser le retour à l’activité des entreprises». Les détails.

 

Par A. Elkadiri

 

Dans les quelques semaines à venir, et dans la perspective d’une sortie de crise, les dirigeants d’entreprises auront à résoudre une équation inédite dont les inconnues sont encore extrêmement nombreuses : face à la complexité des facteurs à prendre en compte, comment s’assurer de concevoir un plan solide et complet de retour à l’activité, intégrant l’ensemble des risques et maximisant les actifs disponibles ?

Afin de nourrir la réflexion, le cabinet McKinsey publie une étude intitulée «Amorcer le redémarrage-8 axes pour sécuriser le retour à l’activité des entreprises», dont voici les points essentiels.

1- Dresser une cartographie précise du redémarrage

Alors même que la crise a fait voler en éclats bon nombre de leurs repères, de leurs hypothèses et de leurs instruments de mesure ou de décision, les dirigeants d’entreprises se trouvent dans l’obligation de définir un cadre d’action solide dans un environnement extrêmement mouvant.

Selon McKinsey, l’approche la plus sûre consiste alors à développer une cartographie détaillée du redémarrage (pays par pays, site par site, segment par segment, client par client, produit par produit), afin de hiérarchiser les opportunités de relance. Cette cartographie «fera office de boussole pour orienter efficacement la production, la supply chain, les efforts marketing et commerciaux», soulignent les auteurs de l’étude.

Elle permettra également d’engager au plus tôt une réévaluation des investissements et des perspectives de repositionnement géographique de la chaîne de valeur (offshoring, nearshoring, relocalisations). Le cas échéant, il sera opportun dès le retour à l’activité de geler certains projets existants en la matière, jusqu’au moment où l’entreprise disposera de la capacité de passer ces plans au crible du nouveau contexte.

Cette cartographie doit s’appuyer sur un scénario de base, ainsi que quelques scénarios alternatifs intégrant des variables de condition de marché à fort impact, en particulier le risque de reprise des contagions. Il s’agira alors de tester le plan de redémarrage selon ces scénarios et de se préparer à une réallocation fluide des ressources si nécessaire.

Une telle cartographie devra couvrir deux grandes dimensions : d’une part, l’axe géographique et réglementaire, les calendriers de redémarrage variant nettement entre pays, et d’autre part, la segmentation de la base de clients, les entreprises devant clarifier dans leur plan les paramètres et hypothèses concernant leur clientèle, car la problématique se pose de manière très différente selon que l’activité est B2C ou B2B.

2 - Apporter les garanties de sécurité aux clients pour rétablir la confiance

Le traumatisme subi à travers la crise du Covid-19 combiné aux mesures de déconfinement va indéniablement ancrer de nouveaux réflexes sanitaires chez les clients et hausser considérablement leur niveau d’exigence et de vigilance quant à leur sécurité, anticipent les auteurs de l’étude. Les entreprises devront alors répondre à l’impératif absolu de fournir leurs produits et leurs services dans des conditions maximales de sûreté sanitaire, et le démontrer ou le faire savoir à leurs clients.

Dans ce sens, deux pistes d’actions doivent être envisagées : définir les condi tions garantissant une «safe experience» aux clients, et communiquer proactivement sur les mesures mises en œuvre hors du regard des clients, dans les back-offices, les sites de production ou de stockage.

3- Préserver la santé des collaborateurs tout en ravivant leur engagement

«Comme l’attestent nos dialogues avec les dirigeants d’entreprises, la sécurité et la santé de leurs collaborateurs ont été placées au sommet de leurs priorités, et ce dès les premières manifestations de la pandémie. Elles le demeureront sans aucun doute dans la perspective du redémarrage», indique McKinsey.

Permettre le retour au travail des salariés dans les meilleures conditions de prophylaxie représente un enjeu primordial pour rassurer et engager à nouveau les collaborateurs.

3 actions doivent être prises en simultané : sécuriser les collaborateurs sur le lieu de travail (prise de température à l’entrée des bâtiments, mise en place d’une quarantaine après un arrêt maladie, application des normes de distanciation sociale, respect des gestes barrière, mise à disposition des masques, recours à des ustensiles à usage unique, etc.); étendre les mesures de protection du personnel hors de l’entreprise; et remobiliser les collaborateurs. «Il conviendra de redonner du sens et un cap clair à l’action de tous», résument les experts.

4- Revitaliser la demande de manière ciblée

L’un des tout premiers impératifs pour les entreprises consistera donc à réactiver leur base clients. Elles devront alors parvenir à stimuler la demande, en se prémunissant contre tout risque de déformer les modèles de prix ou, pire encore, d’alimenter une spirale déflationniste.

Dans ce sens, les entreprises doivent chercher les gisements de demande là où ils se trouvent en adoptant une logique d’investisseur : c’est-à-dire se tenir prêt à réallouer rapidement les dépenses de prospection et de marketing. Le deuxième impératif consiste à adopter un «pricing hautement tactique».

Il s’agit à la fois d’assurer les conditions matérielles et psychologiques qui permettent aux clients de réaliser leurs achats, de créer des conditions commerciales favorables à un rebond de la consommation, mais également d’éviter une situation dangereuse dans laquelle une pression simultanée sur les prix de la part des fournisseurs et des clients mettrait en difficulté les entreprises sur l’ensemble d’une chaîne de valeur.

En outre, les entreprises se doivent de «solvabiliser la demande des clients cœur». Une fois les ventes sécurisées, il convient en effet d’apporter une aide pragmatique aux clients et fournisseurs en difficultés financières en leur accordant, de manière très ciblée, des facilités de paiement ou des extensions de délais.

Enfin, les entreprises doivent veiller à optimiser le mix marketing. Les directions marketing doivent s’assurer que l’offre est en adéquation avec les transformations de la demande provoquées par la crise.

5- Orchestrer la réinitialisation des opérations et de la supply chain

Le redémarrage optimal des opérations conditionne un retour sur le marché à la vitesse désirée pour servir la demande accumulée lors du confinement, sans aller plus vite que le rythme de la reprise. Il sert aussi de catalyseur pour apporter des améliorations jusqu’alors reportées, prévient les risques d’enlisement dans la situation de crise et consolide fortement la position concurrentielle.

Plusieurs prérequis doivent être réunis pour cela : sécuriser la chaîne logistique sur les approvisionnements stratégiques, muscler la capacité de l’entreprise à prévoir la demande et à la satisfaire, déterminer un phasage de la reprise, site par site, et rassurer l’ensemble des partenaires sur la fiabilité des opérations.

6- Mettre en place les sousjacents technologiques du 6retour à l’activité

Depuis le début du confinement, les CIO et CTO ont beaucoup œuvré afin de permettre le basculement massif et soudain vers le télétravail, dans les meilleures conditions d’efficacité pour les collaborateurs et de cybersécurité pour les entreprises.

Ils ont dû, dans des délais extrêmement serrés, déployer de nouveaux outils collaboratifs à distance et solidifier les infrastructures SI de l’entreprise soumises à de fortes augmentations de charge. Sur le front des technologies, trois actions prioritaires doivent être lancées afin d’assurer avec succès le redémarrage, estime McKinsey : pérenniser les solutions d’urgence pour les mettre au service des nouveaux besoins des clients et des collaborateurs, mettre à la disposition des métiers les données permettant de faciliter la remise en marche de l’entreprise, et repenser le portefeuille des projets en cours et les dépenses.

Sur ce dernier point, les CIO et CTO doivent re-prioriser en conséquence leurs programmes, projets et achats technologiques, afin de satisfaire un double objectif : participer à l’effort de réduction de la base de coûts de l’entreprise, tout en absorbant la charge des nouveaux investissements technologiques nécessaires au redémarrage.

7- Piloter étroitement le redémarrage

La priorité en la matière consistera dans un premier temps à accroître la rapidité et la sûreté de la prise de décision. Il s’agit ensuite de donner l’impulsion par l’usage optimal du Working capital et des marges de financement.

Le pilotage du fonds de roulement nécessite une attention toute particulière afin de s’assurer que les cash-flows seront suffisants pour parer aux chocs de la crise et de la relance, quels que soient les scénarios. Les entreprises doivent ainsi modéliser leurs données financières dans chaque scénario et identifier systématiquement les facteurs susceptibles de porter atteinte à la liquidité. Pour chacun de ces facteurs, les entreprises peuvent déterminer les mesures appropriées afin de préserver leurs marges d’actions financières.

En effet, la phase du redémarrage risque d’accentuer encore la tension sur les liquidités. Les fournisseurs et les clients, euxmêmes à la recherche de fonds de roulement, exerceront une pression en vue de bénéficier de modalités de paiement avantageuses. Il conviendra d’y répondre de manière ciblée.

8- Identifier les sources de création de valeur nées de la gestion de crise à pérenniser et réinvestir dans la relance

Nombre d’entreprises disposant de la faculté de poursuivre au moins partiellement leur activité durant les périodes de confinement, ont dû concevoir et adopter en quelques jours un modèle de fonctionnement «sous contraintes» radicalement nouveau.

Certaines ont ainsi réussi à faire pivoter dans de larges proportions leurs activités. Des acteurs, en particulier dans les services professionnels, sont parvenus à porter en quelques jours leur taux de télétravail de 5 à 90 %. Par ailleurs, dans bon nombre de situations, la crise a été l’occasion de resserrer puissamment les liens avec les grands clients et de solidifier l’écosystème de fournisseurs.

De la traversée de cette épreuve collective, beaucoup d’entreprises peuvent ainsi attendre l’ancrage de relations partenariales très fortes avec toutes les parties prenantes de leur environnement. Sur certains segments d’activité, des gains de productivité (en termes de délais ou de coûts) et d’agilité ont ainsi été réalisés de manière spectaculaire.

Pour les dirigeants, il importe aujourd’hui de déterminer, parmi ces évolutions imposées par les circonstances, celles qui ont pu être génératrices de valeur tant sur les plans financiers qu’opérationnels et humains. Certaines d’entre elles pourraient en effet être intégrées à leurs futures réflexions sur la réorganisation du travail et la réinvention du modèle opérationnel.

Enfin l’innovation, aussi bien de process que de produits, a parfois progressé de manière considérable pendant la période de confinement. Ces gisements de performance nouvelle pourraient être réinvestis au profit de la reprise des activités, et contribuer à enrichir à plus long terme les actifs matériels et immatériels de l’entreprise, conclut McKinsey

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