Légalisation du cannabis: «Les agriculteurs doivent en être les premiers bénéficiaires»

Légalisation du cannabis: «Les agriculteurs doivent en être les premiers bénéficiaires»

Le développement de l’activité doit créer tout un écosystème au profit de l’économie locale. Il est indispensable de maintenir, et même de renforcer les activités alternatives à la culture du cannabis. Entretien avec Chakib Khayari, coordinateur du Collectif national pour l’usage médical et industriel du cannabis.

 

Propos recueillis par C. Jaidani

Finances News Hebdo : L’initiative de légalisation du cannabis pour une utilisation cosmétique ou médicale répond-elle à vos aspirations ?

Chakib Khayari : L’initiative de légalisation du cannabis à des fins cosmétiques et médicales représente une avancée importante, mais elle reste incomplète. Bien qu’elle réponde en partie à nos attentes en permettant l’exploitation légale de cette plante à fort potentiel économique et médical, il est nécessaire de renforcer la position des cultivateurs traditionnels dans cette chaîne de valeur. Pour que cette initiative soit pleinement satisfaisante, il est crucial de mettre en place des programmes de subvention et une fiscalité adaptée, afin d’aider les coopératives de cultivateurs à réduire leurs charges de production, tout en augmentant leurs gains. Ces mesures permettraient de consolider leur rôle dans l’économie légale, leur offrant ainsi une meilleure intégration. En soutenant directement ces acteurs locaux, nous pourrions créer une économie alternative durable où les exploitants seraient les premiers bénéficiaires, plutôt que de concentrer les avantages uniquement sur les industries pharmaceutiques et cosmétiques.

 

F.N.H. : Quelle serait sa portée sociale et économique ?

Ch. Kh. : La légalisation du cannabis pourrait avoir une portée sociale et économique considérable, à condition qu'elle soit bien encadrée et qu'elle inclue tous les acteurs concernés. D’un point de vue économique, cette initiative pourrait ouvrir la voie à une nouvelle industrie légale, générant des revenus substantiels pour l’État par le biais des taxes et des impôts. Le développement de ce secteur pourrait attirer des investissements nationaux et étrangers et créer de nombreuses opportunités d’emploi, notamment dans les régions traditionnellement dépendantes de la culture du cannabis. Ces emplois ne se limiteraient pas à la culture elle-même, mais engloberaient également la transformation, la distribution, etc.

 

F.N.H. : Faudrait-il maintenir les activités alternatives à la culture du cannabis ?

Ch. Kh. : Oui, il est indispensable de maintenir et même de renforcer les activités alternatives à la culture du cannabis. La diversification agricole doit rester une priorité pour éviter que les régions dépendantes du cannabis ne subissent les fluctuations du marché ou les effets d’une régulation plus stricte. Les initiatives de cultures alternatives, bien que souvent peu efficaces dans le passé, doivent être revisitées et intégrées dans une stratégie globale de développement durable. Le cannabis peut jouer un rôle central, mais il ne doit pas être la seule solution économique pour ces régions. Selon le communiqué du ministère de la Justice concernant la grâce royale accordée aux cultivateurs de cannabis, l'objectif n'est pas uniquement de permettre aux habitants de se limiter à des activités de culture, mais aussi de les encourager à s'engager dans d'autres secteurs économiques. Ce communiqué souligne que le développement de ces régions doit se faire à travers une variété d'activités économiques, prouvant ainsi que les régions concernées sont en phase avec un plan de développement global et diversifié. En intégrant différentes activités économiques, on favorise non seulement une meilleure résilience face aux variations du marché, mais on crée également des opportunités d'emploi et de croissance dans divers secteurs, ce qui est crucial pour un développement équilibré et durable.

 

F.N.H. : Votre collectif estil pour la consommation du cannabis dans un cadre organisé comme l’ont fait certains pays, à l’instar de la Hollande, l’Espagne ou la Suisse ?

Ch. Kh. : Notre collectif n’a pas encore pris de position définitive sur la consommation récréative du cannabis, mais nous sommes profondément engagés dans la promotion d’un débat national sur cette question. Nous croyons que la mise en place d’une approche responsable, bien encadrée et organisée pourrait apporter des bénéfices significatifs, en régulant un marché qui existe déjà de manière informelle tout en minimisant les risques d’abus. Les expériences de pays comme les Pays-Bas, l’Espagne et la Suisse démontrent qu’il est possible d’encadrer la consommation de cannabis de manière à réduire les impacts sociaux négatifs, tout en tirant parti des opportunités économiques et sociales qu'elle peut offrir. Dans ce cadre, nous avons lancé un appel pour l’ouverture d’un débat national sur la consommation récréative du cannabis, en collaboration avec des activistes de la société civile issus des régions traditionnellement cultivatrices de cannabis. Nous avons également sollicité des rencontres avec les partis politiques pour les inviter à participer à ce débat. Nous nous appuyons sur les recommandations du Conseil économique, social et environnemental (CESE) ainsi que sur celles de la Commission spéciale sur le nouveau modèle de développement, qui soutiennent l’ouverture d’une discussion approfondie sur cette question. L’objectif est de créer un espace de dialogue inclusif où toutes les parties prenantes puissent exprimer leurs préoccupations et proposer des solutions qui répondent aux réalités marocaines, tout en tirant parti des meilleures pratiques internationales. 

 

 

 

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