Grâce à la nouvelle usine de Sidi Bennour, la capacité totale de production de sucre blanc du groupe a atteint 2,5 millions de tonnes par an. A l’international, il est aujourd’hui présent dans plus de 80 pays, avec un volume cumulé d’exportation de plus de 5 millions de tonnes depuis le début de l’activité export. Entretien avec Hassan Mounir, Directeur général de Cosumar.
Propos recueillis par C. Jaidani
Finances News Hebdo : Comment se présente la campagne sucrière quand on sait que la saison a connu à son démarrage un déficit hydrique important ?
Hassan Mounir : Malgré un contexte climatique marqué par la rareté des précipitations dans plusieurs périmètres sucriers, la filière sucrière nationale, portée par le Groupe Cosumar, affiche une dynamique volontariste et structurée, en parfaite coordination avec les autorités publiques et les agriculteurs partenaires. Pour cette campagne, nous avons emblavé 40.000 hectares de plantes sucrières, soit une augmentation de plus de 50% par rapport à l’année précédente. Cette expansion témoigne à la fois de la confiance renouvelée des producteurs, du soutien des pouvoirs publics et de l’organisation rigoureuse mise en place par le groupe. Le cumul des précipitations de la campagne agricole 2024/25 se situe à 236 mm contre 157 mm la campagne précédente, soit une amélioration de 50%. Depuis janvier 2025, l’amélioration des conditions climatiques se traduit déjà par de meilleures performances agricoles et annonce une progression notable de la production locale de sucre blanc pour la campagne en cours. Le Groupe Cosumar, en tant qu’acteur majeur de la filière, a mis en place un dispositif complet dédié à la campagne. Plus de 500 millions de dirhams ont été alloués à la sécurisation des intrants agricoles (semences, engrais, produits phytosanitaires). Par ailleurs, les appuis financiers de l’État viennent renforcer l’attractivité économique de la culture sucrière, réduisant sensiblement l’impact des charges des agriculteurs et améliorant leur rentabilité. L’ensemble de ces efforts s’inscrit dans la stratégie du Groupe et qui vise à garantir une production locale compétitive, à renforcer la souveraineté alimentaire du pays et à assurer un développement rural durable. La campagne en cours incarne cette ambition, appuyée par un accompagnement technique permanent sur le terrain et une infrastructure industrielle capable d’absorber cette montée en charge dans les meilleures conditions.
F.N.H. : Quelles sont les réalisations en matière d’agrégation ?
H. M. : Cosumar a fait de l’agrégation le socle de son modèle agricole, consolidé au fil des décennies par une collaboration étroite et structurée avec les agriculteurs partenaires. Ce modèle repose sur une vision intégrée de la production agricole, associant accompagnement technique, soutien financier, innovation technologique, appui logistique et social. Cette approche a valu au Groupe Cosumar une reconnaissance de la FAO dès 2009. Aujourd’hui, plus de 80.000 agriculteurs bénéficient de ce dispositif, dans le cadre de contrats d’agrégation de cinq ans. Ce partenariat s’articule autour de plusieurs volets complémentaires : • Un encadrement technique de proximité, assuré par nos 120 ingénieurs et techniciens agronomes, mobilisés sur le terrain pour optimiser les itinéraires techniques, la sélection variétale et l’irrigation de précision. • Un soutien financier structurant, à travers le financement des semences, des engrais, du matériel agricole et des prestations mécaniques. En moyenne, Cosumar injecte chaque année près de 3 milliards de dirhams dans le monde rural. • L’adoption du Smart Blender, des drones et d’un ensemble de technologies de pointe par le Groupe a permis une réduction significative des coûts à l’hectare, de l’ordre de 30%. Résultat : une baisse marquée des charges à l’hectare de 40% depuis 2008, accompagnée de gains de productivité notables. • Une rémunération plus importante, à travers un prix d’achat contractuel garanti, revalorisé à deux reprises en 2024 par l’Etat, sur intervention de l’interprofession. Au-delà de la performance économique, le modèle d’agrégation Cosumar s’inscrit dans une logique de développement humain. Le Groupe accompagne les agriculteurs et leurs familles via des programmes d’alphabétisation, d’accès à la santé, de parrainage scolaire et d’actions sociales spécifiques (OMRA, bourses, retraite adaptées). Il contribue ainsi activement à la structuration d’une classe moyenne agricole. Enfin, l’innovation est au cœur de cette dynamique. La digitalisation de l’amont agricole à travers la plateforme Attaissir permet une traçabilité complète - des semis au paiementet une gestion optimisée des ressources. L’introduction des drones, de l’IA et des smart technologies dans le suivi des cultures a permis une réduction de 30% des intrants et une amélioration des rendements. À travers ce modèle d’agrégation résilient et évolutif, Cosumar contribue à moderniser la culture sucrière nationale, à renforcer la souveraineté alimentaire du Royaume et à consolider la compétitivité de l’ensemble de la filière, dans un esprit de partenariat durable avec le monde agricole.
F.N.H. : Où en est le programme de développement industriel du Groupe ?
H. M. : Le Groupe Cosumar poursuit un travail permanent d’adaptation et de modernisation de son outil industriel, en réponse aux besoins croissants du marché national et aux exigences de performance, de qualité et de durabilité. L’approche retenue repose sur l’amélioration continue de l’ensemble des maillons industriels, avec une attention particulière portée à la compétitivité, à l’efficacité énergétique et à l’intégration logistique. La mise en service récente de la nouvelle raffinerie de Sidi Bennour, dédiée au raffinage du sucre brut importé, s’inscrit pleinement dans cette dynamique. Cette infrastructure moderne, avec ses 500.000 tonnes par an, vient renforcer les capacités industrielles du Groupe qui atteignent désormais une production totale de sucre blanc de 2,5 millions de tonnes par an. Cette évolution permet au Groupe de mieux répondre à la demande locale, de soutenir l’activité export et de consolider sa position en tant qu’acteur industriel de référence, tout en intégrant des critères élevés de performance et de durabilité. Parallèlement, des investissements ciblés, pour une enveloppe de 10 milliards de dirhams, ont permis de consolider les performances des sites industriels existants, tant sur le plan de la productivité que sur celui de l’efficacité environnementale. Plusieurs projets structurants ont été réalisés : • Modernisation des équipements pour une meilleure performance énergétique. • Optimisation logistique, avec notamment la mise en place d’un port sec sur le site de Casablanca destiné à fluidifier les flux et à renforcer la réactivité des opérations de chargement et de distribution. • Renforcement de la capacité de stockage, désormais portée à 1 million de tonnes, assurant une continuité d’approvisionnement sur l’ensemble du territoire.
F.N.H. : Comment se décline votre stratégie en matière de préservation de l’environnement ?
H. M. : L'engagement du Groupe Cosumar en matière d’environnement repose sur une démarche structurée, progressive et ancrée dans la durée. Elle vise à conjuguer performance industrielle, responsabilité sociétale et efficacité environnementale à travers quatre leviers principaux : la gestion de l’eau, l’efficacité énergétique, la réduction de l’empreinte carbone et la valorisation des coproduits. Sur le plan de la gestion hydrique, Cosumar a mené des efforts significatifs. En dix ans, la consommation d’eau industrielle a été réduite de 50% dans la raffinerie de Casablanca, 73% dans les sucreries de betterave et 64% dans celles de canne. Sur le plan agricole, le Groupe œuvre pour la généralisation de l’irrigation goutte-à-goutte, et a implanté 29 stations météorologiques, permettant une irrigation pilotée, économe et plus efficace. En matière énergétique, Cosumar a engagé une dynamique continue d’optimisation. Depuis 2016, l’empreinte carbone du Groupe a diminué de 50%, notamment grâce à l’adoption de technologies propres, comme le séchage solaire de la pulpe, évitant à lui seul l’émission de plus de 57.000 tonnes de CO2, et à l’amélioration du rendement des équipements industriels. La stratégie environnementale repose aussi sur un modèle d’économie circulaire pleinement opérationnel. En 2023, 365.000 tonnes de coproduits ont été valorisées : pulpe transformée en aliments pour bétail, bagasse utilisée comme biocombustible, et mélasse redirigée vers l’industrie de la levure. Enfin, Cosumar agit également sur le terrain, en accompagnant les agriculteurs partenaires vers des pratiques plus durables : adoption de l’irrigation de précision, utilisation de l’énergie solaire dans les exploitations, recours aux drones pour le suivi agronomique, et diffusion des bonnes pratiques via des programmes de formation. Signataire du Pacte Qualit’Air de la CGEM et membre de la Fondation Mohammed VI pour la Protection de l’environnement, Cosumar s’inscrit dans une logique de transparence, de mesure et d’amélioration continue de son impact environnemental, avec des indicateurs suivis selon les meilleurs standards internationaux.
F.N.H. : Quelles sont vos ambitions de développement à l’international ?
H. M. : Le développement à l’international constitue un levier important de création de valeur pour le Groupe Cosumar. Grâce à la mise en service industrielle de la nouvelle raffinerie de Sidi Bennour, dédiée au raffinage du sucre brut importé, la capacité totale de production du Groupe atteint désormais 2,5 millions de tonnes de sucre blanc par an. Cette extension industrielle a permis de renforcer les capacités export du Groupe. En 2024, les ventes à l’international ont progressé de 10%, portées par une meilleure disponibilité industrielle et une optimisation de l’appareil logistique. Le sucre marocain produit par Cosumar est aujourd’hui présent dans plus de 80 pays, avec un volume cumulé d’exportation de plus de 5 millions de tonnes depuis le début de l’activité export. Le Groupe ambitionne désormais d’atteindre, dans un avenir proche, le seuil d’un million de tonnes exportées en une seule année. Dans cette dynamique, Cosumar continue d’examiner des opportunités de diversification et de développement, tant au niveau national qu’international, avec une ambition claire : consolider sa position parmi les opérateurs sucriers intégrés les plus compétitifs à l’échelle internationale.