◆ L’activité économique au Maroc résiste à l’environnement économique mondial malgré un léger recul de la croissance d’un trimestre à l’autre.
◆ Le secteur industriel marocain sauve la mise, d’après les économistes.
◆ L’absence de signaux de relance inspire inquiétude sur les perspectives.
Par : Badr Chaou
L’environnement économique international est, comme chacun le sait, en proie à de fortes turbulences. L’économie mondiale est marquée par un ralentissement de sa croissance et une persistance de grandes incertitudes liées notamment au Brexit, à la guerre commerciale sino-américaine, ainsi qu’aux tensions politiques opposant les Etats-Unis à l’Iran.
D’après les dernières données disponibles, au second trimestre de 2019, la croissance est en décélération d’un trimestre à l’autre, passant de 2,7% à 2,3% aux Etats-Unis, et de 1,2% à 1,1% dans la zone Euro. Dans une note récente, la banque d’investissement suisse UBS dit s'attendre désormais à une croissance de l'économie mondiale de seulement 2,5% en rythme annuel dans les prochains trimestres contre 3,2% précédemment.
Dans ce contexte peu porteur et anxiogène, l’économie marocaine tente, tant bien que mal, de résister, d’autant que le recul de la demande européenne, partenaire historique du Maroc, continue de peser.
«Nos principaux alliés économiques sont aujourd’hui en stagnation, suite au resserrement de la croissance aux États-Unis. Quand les Etats-Unis ne font pas de croissance, l’Europe a du mal à en faire, et puisque les pays de l’Union européenne sont nos principaux partenaires, cela se répercute sur notre économie», nous explique Youssef Abouali, enseignant chercheur en économie.
Ceci explique, entre autres, le relatif affaissement des exportations du Maroc. «Les Européens sont actuellement en crise économique, cela conduit à une baisse de la consommation. Cela, bien évidemment, ne reste pas sans impact sur le volet commerce international du Royaume», nous indique notre interlocuteur.
L’industrie, un secteur à soutenir
En dépit de cette crise générale, où la croissance du pays accuse un recul au second semestre pour s’établir à 2,6% contre 2,8% au premier, plombée essentiellement par le secteur de l’agriculture, qui représente pas moins de 15% du PIB, l’activité économique au Maroc est restée globalement bien orientée au second semestre.
Les données de l’enquête mensuelle de conjoncture de Bank Al-Maghrib dans l’industrie révèlent une amélioration de la production entre les premier et deuxième trimestres passant de 74,7% à 75%, ainsi qu’une hausse du taux d’utilisation des capacités de production (TUC).
«Ce résultat peut se justifier grâce aux secteurs industriels avec l’aéronautique et l’automobile notamment, et celui du tourisme aussi. Ils ont eu à eux trois une contribution non négligeable dans l’économie du Royaume. Ce sont les secteurs porteurs des prochaines décennies, sur lesquels il est primordial pour le Maroc de focaliser toute son attention et de soutenir, en termes de financement, de formation et de fiscalité», poursuit Youssef Abouali.
Pour rappel, la progression de la valeur ajoutée des industries de transformation affiche, en glissement annuel, une croissance de 2,5% au premier trimestre. Ce comportement favorable s’est maintenu au deuxième trimestre 2019, comme en témoignent les derniers résultats de l’enquête de conjoncture de Bank Al-Maghrib dans le secteur. La progression observée à fin juin aurait concerné, particulièrement, les industries agroalimentaires et de la mécanique et métallurgie, note pour sa part la DEPF (Direction des études et des prévisions financières). En revanche, les secteurs de la chimie et parachimie et de textile et cuir auraient par contre accusé une baisse.
Par ailleurs, ce regain de forme du secteur secondaire s’est traduit par le comportement globalement favorable des échanges du secteur industriel avec l’extérieur, au terme des six premiers mois de 2019. En effet, la valeur des exportations de l’industrie alimentaire a enregistré une progression de 5,5%, celle de l’industrie aéronautique de 12%, des dérivés de phosphates de 4% et de l’automobile de 1,7%, indique la même source.
Pour ce qui est du tourisme, le nombre des arrivées s’est renforcé de 4,6% au terme des cinq premiers mois de 2019, tiré par une hausse de 4,5% des arrivées des touristes étrangers et de 5% de celles des MRE.
Malgré ces signaux rassurants, cela reste insuffisant pour envisager une réelle reprise de l’activité économique. D’après notre expert, «en l’état actuel des choses, on note une absence de signaux de relance de l’économie marocaine. En outre, le Maroc ne pourra pas toujours compter uniquement sur le facteur économique. Le facteur politique a aussi un grand rôle à jouer». Et de conclure: «les acteurs économiques marocains adoptent un caractère attentiste faute de direction économique claire, de perspectives réconfortantes, et de visibilité quant à l’avenir politico-économique du Royaume».