► Chanson de tous les métissages, élégante et heureuse quand même, grâce à sa générosité ainsi que son reggae très construit.
Comment va la compagnie ? Très bien, elle est en confinement - sans doute. Elle se deconfinera bientôt.
Shauit, Ouahid -sorti miraculeusement des griffes de l’oubli- et leurs acolytes regardent, comme les musiciens du monde entier, passer les heures à l’abri du virus, sans savoir à quelle date ils pourront reprendre le chemin des scènes.
Certes, il y a toujours une actu dans leur arc. En l’occurrence la mise en ligne de la session live «Tatmine» où musique d’ici et d’ailleurs se confrontent dans une chaleureuse harmonie.
Le choix des deux figures étonne ? De quoi collisionner les univers moyennant artistes totalement contrastés. Shauit et Ouahid, relevant de pays différents, se tiennent dans un même mouchoir spatial : musique.
Les unir n’a, à première vue, pas grand sens ? Erreur, car il faut justement ici voir et chercher ce qui rapproche et place les deux icones dans un registre -plus ou moins- en friche, négligé qu’avec leurs voix et instruments ils tentent d’arpenter : reggae.
La première vision est celle d’un «Zamane (ère)» en déréliction. Au terme de rythmes et de boucles, certains sortent hagards. Secousse mystique. Ainsi, qui pour anticiper que les sonorités africaines ainsi que celles froides et sophistiquées québécoises puissent si bien dialoguer ? Techniquement, c’est parfait. Esthétiquement, on est proche du nihilisme reggae.
Ici, une composition étoilée : Ahmed Ouahid chronique les maux (voix), Shauit donne vie au morceau (guitare), Amine Saylani remplit l’ensemble (clavier), Martine Labbé assure les cuivres (bugle), Alain Burr éclate son groove (basse) et enfin Hippolyte Koutouan manifeste la cadence (cajón). Le tout conçoit un son humide comme le mouchoir d’une veuve.
Cette rencontre, fruit de la collaboration maroco-canadienne, sobrement intitulée «de Maliotenam à Kénitra » - réalisée par Pasa Musik en partenariat avec La Boîte interculturelle et 3ZEM-, a permis aux deux groupes (Shauit et Wachmn’hit) d’effectuer beaucoup de déplacements entre le Maroc et le Canada. Ils se sont produits à Kénitra puis à Montréal avec trois représentations. Gracieuses.
Par R.K.H