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Covid-19/ Variants: l’immunité collective est-elle possible ?

Covid-19/ Variants: l’immunité collective est-elle possible ?

Les quelques variants émergents de SARS-CoV-2 constitueraient une menace sur l'efficacité des vaccins contre le Coronavirus.

Ces nouveaux variants ont vraisemblablement une influence sur l’immunité collective.

Dr Tayeb Hamdi, chercheur en politiques et systèmes de santé et vice-président de la Fédération nationale de la santé, nous apporte son éclairage de scientifique.   

 

Propos recueillis par Ibtissam Z.

 

Finances News Hebdo : Quel risque portent les variants sur les vaccins et, par conséquent, sur l’immunité collective ?  

Dr Tayeb Hamdi : Le taux des personnes qu’il faudrait vacciner dans une société pour avoir l’immunité collective, se calcule généralement à partir du R0, c’est-àdire le taux de reproduction du virus. Par exemple, pour le coronavirus, son taux est de 3. Une personne peut donc affecter trois individus sans les mesures barrières et de distanciation. A partir de ce chiffre, 60% de la population doivent être immunisées pour atteindre l’immunité collective, avec une efficacité des vaccins qui n’est pas de 100%. Il faut donc 70 à 80% de personnes vaccinées pour atteindre cette immunité collective tant recherchée. Avec un variant qui est plus transmissible, comme c’est le cas maintenant, le fait qu’il soit plus transmissible, son taux de production (R0) n’est plus 3, mais plutôt estimé entre 4 et 5.

Pour arriver à l’immunité collective, le taux des personnes à immuniser sera donc encore plus élevé. Cela veut dire que plus on a un variant plus transmissible, plus le pourcentage des personnes à vacciner sera plus conséquent et donc plus élevé pour atteindre l’immunité collective. D’un autre côté, certains variants nous compliquent déjà la tâche en déjouant l’immunité acquise par la vaccination ou par la maladie. C’est le premier point à soulever. Le 2ème concerne notre guerre contre cette pandémie, du fait que nous avons des variants et qu’ils peuvent mettre à l’épreuve l’immunité post-vaccinale et même l’immunité post-maladie.  Il est plus que jamais nécessaire de préserver les acquis et maintenir les mesures barrières.  Cette guerre doit continuer à être basée sur les mesures préventives individuelles et collectives pour éviter au maximum le risque des mutations, jusqu’à l’obtention de l’immunité collective. 

 

F.N.H. : Actuellement, l’amélioration des vaccins est en cours de débat. On parle de versions améliorées, qu’en est-il ? 

Dr. T. H. : En effet, les chercheurs et les laboratoires travaillent pour mettre à jour des versions améliorées des vaccins actuels pour les rendre efficaces contre les nouveaux variants. Ainsi, plusieurs laboratoires sont en course pour trouver le précieux sésame. Peut-être nous aurons à vacciner encore davantage avec des rappels. L’utilisation de plusieurs marques de vaccins est aussi une voie en cours d’exploration. 

 

F.N.H. : Avec le nombre important de mutations, d’autres variants peuvent-ils émerger ? Et comment peut-on riposter ?  

Dr. T. H. : Il est vrai que ces nouveaux variants du SARS-CoV-2 ont un rôle dans l'évolution de la pandémie. C’est important de surveiller les variants, car ils apparaissent à chaque fois qu’on avance dans une pandémie. Nous avons des gens qui sont immunisés contre la Covid-19 et qui ont des anticorps, nous avons aussi des personnes vaccinées qui ont des anticorps. Résultat :   cette cohabitation entre ces personnes immunisées avec le virus qui circule toujours, crée ce qu’on appelle la pression immunitaire ou bien la pression de sélection. C’est-à-dire que le virus circulant cherche à contourner ces anticorps et on se retrouve de plus en plus avec des mutations qui déjouent ces anticorps et donc l’immunité. Généralement, on dit qu’à partir d’un taux de 25% de population immunisée, on rentre dans la phase de pression vaccinale ou immunitaire. Cela fait donc émerger les variants.

Le meilleur exemple est la ville brésilienne de Manaus, qui pendant la première vague, avait vécu la contamination de la majorité de sa population, avec l’émergence du variant brésilien. Une autre explication de l’émergence des variants concerne les personnes qui ont une immunité faible (Sida par exemple). Le virus reste plus longtemps dans leur corps et il a le temps de s’adapter aux anticorps. Nous avons aussi le cas du traitement des malades immunodéprimés atteints de la Covid-19 par des anticorps de convalescents, c’est la sérothérapie. Il s’agit de prendre les anticorps de personnes guéries pour traiter les gens malades, qui ont un problème immunitaire. Ils ont un covid long qui dure des semaines ... En conclusion, cela finit par créer l’émergence des variants. 

 

F.N.H. : Qui dit variant, dit souches ou encore mutations et lignées. Devant ce foisonnement de termes très prisés actuellement, cela prête forcément à la confusion. Expliqueznous ces appellations et leurs différences ?  

Dr. T. H. :  Dès qu’un virus rentre dans la cellule humaine, il l’infecte. Ensuite, il se multiplie et se duplique en millions et millards de copies et à chaque fois il y a une multiplication du virus. C’est comme une photocopie, des fois il y a des erreurs de multiplication. La copie n’est pas tout à fait conforme à l’original, c’est ce qu’on appelle une mutation. Le Coronavirus est fait sur approximativement 30.000 bases, avec près de 10.000 acides aminés qui produisent 20 protéines. On peut schématiser en comparant le Coronavirus à un livre de 30.000 lettres. A chaque fois qu’il y a une multiplication, il y a le risque d’avoir une erreur. Or, les mutations sont un phénomène qui est normal dans la vie d’un virus. Il faut savoir que pour la covid-19, il y a plus de 40.000 mutations depuis son apparition à ce jour.

Parfois, ces mutations n’ont aucun intérêt et aucune influence. Mais parfois elles sont importantes, car elles changent les caractéristiques du virus. Les mutations peuvent être en faveur de l’homme, du fait que le virus devient moins contagieux et finira par disparaître. Mais des fois, ces mutations peuvent être en faveur du virus, ces derniers deviennent plus virulents, et donc plus contagieux. C’est pourquoi l’OMS classe les variants par le nom de «Variant of Concern» (VOC), qui signifie variant préoccupant. Quand nous avons un ensemble de virus qui possèdent ces mêmes mutations, cela nous donne une lignée et dans cette lignée on trouve un groupe de virus qui ont les mêmes caractéristiques, ce qui nous donne un «variant». Un variant quand il adopte beaucoup de changements, et que ça influence énormément sur ses caractéristiques, il change complètement de face, cela nous donne une souche.

 

De quoi le Sars-CoV-2 se compose
Le génome de Sars -CoV-2 se compose d'un filament d'ARN, qui porte 29.981 bases codant pour 9.860 acides aminés, conduisant à la production de 20 protéines. On dénote ainsi 4 protéines dites «structurelles» : 
• la protéine Spike : elle se fixe au récepteur ACE2 des cellules-cibles et qui est au cœur de la recherche vaccinale (une spicule virale est formée de 3 protéines S agglomérées).
• la nucléoprotéine ou nucléocapside : (N) enveloppe et protège l'ARN viral.
• la protéine d'enveloppe : (E)
• la protéine de membrane : (M) constitue avec S et E, l'enveloppe virale. Le génome de Sars-CoV-2 code également 16 protéines dites «non structurelles». Ces dernières jouent un rôle primordial dans le détournement de la machinerie cellulaire en faveur du virus. Ces fameuses protéines participent dans la production et la maturation de l'ARN viral.      

 

 

 

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