Le marché de l'emploi demeure un talon d'Achille pour l'économie marocaine. Malgré des initiatives ambitieuses, des stratégies savamment annoncées et la multiplicité des programmes, le taux de chômage reste toujours à des niveaux encore élevés.
C’est pourquoi un budget de 14 milliards de dirhams, destiné à la promotion de l’emploi, a été mobilisé au titre de la Loi de Finances 2025. C’est pourquoi également, face à l’urgence de la situation, une réunion dédiée a eu lieu mardi dernier à Rabat, sous la présidence du chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, à laquelle ont pris part l’ensemble des départements ministériels concernés, le haut-commissariat au Plan, la CNSS et l’Office de la formation professionnelle et de la promotion du travail.
Objectif : faire le point sur les mesures pratiques contenues dans la feuille de route relative au secteur de l’emploi, que le gouvernement compte annoncer dans les meilleurs délais pour renforcer la dynamique du secteur. La ministre de l'Economie et des Finances, Nadia Fettah, l'a bien affirmé : «une stratégie claire sera dévoilée dans les prochains jours pour traiter le dossier de l’emploi à court terme (jusqu’en 2026), mais également pour créer des opportunités d’emploi durables». Cette forte mobilisation de l’Exécutif est légitimée par les réalités du terrain ?
Le dernier rapport du haut-commissariat au Plan (HCP) sur la situation du marché du travail au troisième trimestre 2024 met en effet les pieds dans le plat : 213.000 emplois créés en un an, et pourtant le chômage grimpe à 13,6%, atteignant un vertigineux 40% chez les jeunes de 15 à 24 ans. Un paradoxe ? Pas vraiment. Ces chiffres illustrent les failles structurelles d'un marché de l'emploi mal adapté à la dynamique économique du pays.
L’essentiel des emplois créés vient des services, qui génèrent principalement des postes précaires, et du BTP, vulnérable aux cycles économiques. La jeunesse marocaine se retrouve ainsi enfermée dans un cercle vicieux: le taux de chômage des diplômés atteint presque 20%, mettant en évidence une inadéquation criante entre les formations académiques et les besoins du marché. Les programmes comme «Idmaj» ou «Awrach», bien qu'ambitieux sur le papier, peinent à résoudre le problème structurel du chômage. Mais le problème de fond reste évidemment économique : avec une croissance qui stagne autour de 3%, comment espérer résorber un chômage massif ?
Le Nouveau modèle de développement ambitionne une croissance moyenne de 6% à l’horizon 2035. Mais l’économie marocaine, encore trop dépendante du secteur agricole, avance au rythme des récoltes céréalières. La diversification économique tarde à se concrétiser, tandis que les investissements dans les PME, censées être le moteur de la création d'emplois, restent timides. Face à ce constat, Nadia Fettah réaffirme l'engagement du gouvernement : «nous nous focalisons sur des mesures concrètes pour dynamiser l'emploi, en particulier dans les PME et le monde rural».
Des mots rassurants, mais qui se heurtent à une réalité têtue : le marché de l’emploi ne saurait se satisfaire de solutions ponctuelles, mais a plutôt besoin d’un véritable tournant économique et sociétal pour bâtir une économie capable de répondre aux ambitions de sa jeunesse.
Par F.Z Ouriaghli