CDG Capital fait jouer le levier de la RSE pour en faire une réelle opportunité d’innovation et de développement des affaires.
Le point sur ce chantier titanesque avec Laila Mikou, directrice en charge du Développement durable au sein du groupe.
Propos recueillis par A. Hlimi
Finances News Hebdo : Quelle place occupe la RSE dans la stratégie de CDG Capital ?
Laila Mikou : La RSE occupe une place centrale au sein de la banque, totalement en accord avec notre mission de banque de financement et d’investissement au service du développement durable de l’économie nationale et de son marché financier. Portée au plus haut niveau de l’entreprise, notre démarche RSE irrigue toutes les sphères de nos activités et nous nous appuyons au quotidien notamment sur les 17 objectifs de développement de l’ONU et sur la norme ISO 26000 pour guider notre action. Dans un premier temps, nous avons mis en place un dialogue constructif avec nos parties prenantes internes ou externes, qu’il s’agisse de nos clients, de notre actionnaire la CDG, de nos collaborateurs, de nos fournisseurs, de nos partenaires, les régulateurs et les médias.
Ce dialogue constitue le socle de notre démarche RSE, renforçant ainsi notre positionnement de partenaire de confiance. Un de nos axes principaux est de bâtir un modèle de financement durable grâce à notre engagement dans le soutien aux initiatives nationales de développement, dans la lutte contre le changement climatique et dans la prise en compte des critères environnementaux, sociaux et genre dans nos processus décisionnels. Ce modèle de finance durable a pris tout son sens suite à la crise sanitaire, qui a fortement impacté le tissu économique national, avec des dommages économiques et sociaux.
Chez CDG Capital, nous pensons que l’une des forces de la finance durable est de penser l’entreprise dans son écosystème, de prendre en compte l’ensemble de ses interdépendances, qu’il s’agisse de ses fournisseurs, ses clients, ses partenaires, ses actionnaires. Ainsi, consciente de l’importance de la relation donneur d’ordreTPME pour assurer la croissance et les emplois, CDG Capital a accompagné un acteur industriel pour mettre en place un nouveau modèle de financement des PME en écosystème. Nous prônons, par ailleurs, l’exemplarité dans la conduite de nos affaires. En effet, en tant qu’organisme financier, nous sommes conscients que les sujets d’éthique, de gouvernance et de transparence sont primordiaux. Nous avons gravi récemment une nouvelle étape en intégrant un administrateur indépendant à notre Conseil d’administration afin de permettre aux organes de direction de profiter de ses expertises, de bénéficier d’un regard externe éclairé et d’enrichir les débats en toute indépendance.
Nous avons également l’ambition de créer un environnement favorable à l’épanouissement des talents, et ce grâce notamment à la mise en place d’un dialogue social de qualité, d’une politique de rémunération et d’évolution basée sur des principes équitables, d’un environnement de travail favorable à la santé et à l’équilibre, tout en nous engageant en faveur de la diversité et de l’égalité des chances. A ce titre, nous avons la ferme conviction que les collaboratrices ont toutes leurs places au sein de la banque, comme l’atteste la répartition équitable hommes/femmes au sein du «Comex» de CDG Capital. Enfin, nous nous attachons à soutenir nos communautés et à préserver notre environnement. Nous nous sommes engagés à mesurer et à minimiser notre impact environnemental grâce à la réalisation du bilan carbone et à accroître notre impact sociétal par les activités de mentorat réalisées par les collaborateurs de la banque, notamment en faveur des étudiants de la Fondation marocaine de l’étudiant (FME).
F.N.H. : Dernièrement, vous avez obtenu l'attestation de maturité avancée ISO 26000 au niveau le plus élevé sur votre démarche RSE. Quelle est la particularité de cette attestation, comment l'avez-vous obtenu et pourquoi est-ce important pour vous ?
L. M. : La particularité de cette attestation est que, d’une part, elle s’appuie sur un référentiel international (ISO 26000) en tenant compte des spécificités liées à notre secteur d’activité. Ainsi, l’évaluation menée par le cabinet Vigéo Eiris a couvert 7 domaines : les droits de l’Homme, les relations et conditions de travail, l’environnement, la loyauté des pratiques, les questions relatives aux consommateurs, les communautés et le développement local, et pour finir la gouvernance. D’autre part, elle évalue la maturité du dispositif RSE selon trois piliers : la pertinence des politiques (visibilité, d’exhaustivité et de portage), la cohérence de leur déploiement (processus, moyens et reporting) et l’efficacité des résultats (indicateurs et avis des parties prenantes).
Par ailleurs, cette évaluation a été réalisée sur la base d’une analyse documentaire robuste, d’entretiens individuels avec le management et d’entretiens collectifs avec les collaborateurs et les délégués du personnel; ce qui a permis in fine d’obtenir un rapport détaillé intégrant les points forts et les axes d’amélioration de la banque. Nous sommes fiers d’avoir obtenu une attestation de maturité avec un score de 65 sur 100, plaçant ainsi la banque à un niveau de maturité RSE avancé, le plus haut niveau sur l’échelle de notation du cabinet Vigeo-Eiris. Ce score est une reconnaissance du chemin parcouru par CDG Capital en tant que banque responsable pleinement engagée à répondre aux attentes de ses parties prenantes, et une incitation à poursuivre nos efforts pour réaliser plus d’impact sociétal positif.
F.N.H. : Pensez-vous que le secteur financier marocain a réellement intégré les problématiques RSE dans son fonctionnement ? Si oui, comment cela se matérialise-t-il ? Sinon, que reste-t-il à faire ?
L. M. : Tout d’abord, l’on peut constater que les principales banques de la place ont toutes mis en place une politique RSE visant à concilier performances économiques, sociales et environnementales de manière volontaire. Parallèlement, elles se sont dotées de moyens humains et organisationnels pour assurer le déploiement de cette politique. Nous pouvons noter un engouement du secteur financier à intégrer la dimension RSE depuis la publication de la feuille de route pour l’alignement du secteur financier marocain sur le développement durable à l’occasion de la COP22.
Plus récemment, l’AMMC a joué un rôle dans l’accélération de l’adoption par les banques des meilleures pratiques en termes de RSE, avec la publication d’un guide en 2017, puis d’une circulaire en 2019 imposant le reporting extra-financier aux sociétés cotées et aux émetteurs d’appel public à l’épargne. A noter que l’indice Casablanca «ESG 10» comprend 10 entreprises de la Bourse socialement responsables vigoureusement sélectionnées, dont 4 institutions bancaires. Tous ces éléments témoignent du degré de maturité du secteur bancaire par rapport à l’intégration de la dimension de la RSE.
F.N.H. : Pensez-vous que RSE et performances financières peuvent aller de pair ?
L. M. : On peut penser de prime abord que l’investissement dans la RSE peut grever la performance financière de l’entreprise du fait des coûts additionnels générés par la mise en place d’actions responsables dans le domaine du capital humain, de la réduction de la consommation énergétique et de la protection de l’environnement, etc. En réalité, l’analyse montre que les entreprises socialement responsables sont plus performantes que leurs pairs, car elles sont, d’une part, plus en phase avec leur écosystème (relations stables avec les fournisseurs et les collaborateurs). En étant plus à l’écoute des besoins de leurs clients, elles développent une forte capacité d’innovation pour créer de nombreux produits, de nouveaux marchés ou de nouveaux procédés.
Ensuite, l’intégration de la RSE permet de générer des économies résultant de l’éco-efficience (ex : baisse de la consommation énergétique) et de la réduction des risques juridiques liés à des procès ou des amendes, suite à une meilleure couverture de tous les risques, dont les risques environnementaux et sociétaux. Enfin, une entreprise socialement responsable attire plus facilement les capitaux, car elle crée plus de confiance. En somme, la RSE constitue une réelle opportunité d’innovation et de développement des affaires, en plus d’autres bénéfices liés à une meilleure gestion des risques, à la fidélisation des clients et à l’attraction et la rétention des talents, ce qui contribue à une meilleure performance financière.