Le Maroc, bien que reconnu pour ses avancées dans le domaine des énergies renouvelables, doit encore relever d'importants défis pour optimiser son efficacité énergétique et renforcer sa sécurité énergétique.
Par Désy M.
La Stratégie énergétique nationale (SEN) 2009-2030, lancée sous l'impulsion du Roi Mohammed VI, vise des objectifs ambitieux tels que l'atteinte de 52% d'énergies renouvelables dans le mix électrique d'ici 2030. À ce jour, des progrès notables ont été réalisés, avec une augmentation de la part des énergies renouvelables de 32% en 2009 à 44,3% en août 2024.
Cependant, Zineb El Adaoui, Premier président de la Cour des comptes, a souligné lors d'une séance plénière au Parlement que plusieurs faiblesses persistent, notamment le manque d’une stratégie claire d’efficacité énergétique. Pourtant définie comme une priorité nationale, cette composante du secteur de l’énergie peine à atteindre les objectifs. Malgré les ambitions de réduire la consommation énergétique de 20% d'ici 2030, le taux d'économie d'énergie enregistré n'atteint actuellement que 5,8%.
Du même avis que la Cour des comptes, Saïd Guemra, expert consultant en énergie, précise que «durant la période 2010- 2020, nous devions réaliser grossièrement 1% d’économie d’énergie par an. Arrivé à 2020, nous devions prouver dans les règles de l’art de la mesure et la vérification, une économie de 10%, qui devait représenter la somme des économies réalisées sur cette période. A ce jour, nul ne peut prouver cette économie».
Ce retard s'explique par des moyens financiers limités, des textes d'application de la loi n° 47.09 non publiés, et l'absence d'incitations adaptées pour encourager les secteurs énergivores, comme l'industrie et le transport, a affirmé le Premier président de la Cour des comptes. Au début du mois de janvier, Leila Benali, ministre de la Transition énergétique et du Développement durable, a réaffirmé, lors d'une réunion de la Commission de contrôle des finances publiques à la Chambre des représentants consacrée à la gouvernance financière de la gestion de l'Agence marocaine pour l’efficacité énergétique (AMEE), l’engagement de son département à améliorer la situation. Lors d'une réunion parlementaire, elle a détaillé une nouvelle approche intégrant des mesures d'efficacité énergétique dans les projets d'investissement et les dépenses publiques.
Cette stratégie, en accord avec les recommandations du nouveau modèle de développement, vise également la création de 100.000 emplois dans le secteur énergétique d'ici 2030. La ministre a, à cet égard, fait savoir qu'une économie d'énergie de 6,58% avait été enregistrée en 2020, selon les données de l'AMEE, qui s’attèle actuellement à actualiser cet indicateur. Elle a également révélé que les études requises ont été menées pour l’élaboration de plans régionaux d'efficacité énergétique et de décarbonation dans toutes les régions du Royaume. Ce qui permettra, selon la ministre, d'assurer la réhabilitation énergétique des collectivités territoriales en particulier, et de réaliser des économies significatives dans leur consommation énergétique.
S’agissant du cadre réglementaire de l'efficacité énergétique, Leila Benali a annoncé que d’autres textes d'application sont en cours de finalisation, ayant trait notamment à la révision des seuils de consommation énergétique fixés par le décret relatif à l’audit énergétique obligatoire, ainsi qu'à l’élaboration d’un projet d’arrêté définissant les performances énergétiques minimales des systèmes d’éclairage. S’agissant des compétences de l'AMEE, la ministre a indiqué qu'un projet de loi est en cours d'examen pour élargir les missions de l'Agence, de manière à devenir plus autonome et plus performante. Précisant que cette réforme institutionnelle vise à renforcer la gouvernance de l'Agence, en adoptant les meilleures pratiques en matière de gestion, de suivi et d’évaluation des programmes d'efficacité énergétique.
Pour le Docteur Saïd Guemra, «les investissements dans les renouvelables peuvent être largement baissés, si une entreprise, ou même un Etat, arrive à baisser ses consommations grâce à la sobriété et l’efficacité énergétique». Il reste toutefois «confiant quant à la bonne volonté de tous les opérateurs du secteur de la transition énergétique pour redresser une situation qui trouve ses racines dans le passé», a-t-il conclu.