La Stratégie nationale de développement durable (SNDD) a permis de renforcer la convergence entre les stratégies sectorielles pour parvenir à un développement durable et inclusif.
Quatre ans après son adoption, l’Exécutif est à pied d’œuvre pour dessiner les contours d’une refonte de la SNDD.
Par M. Boukhari
Adoptée le 25 juin 2017 par le Conseil des ministres sous la présidence du Roi Mohammed VI, la Stratégie nationale de développement durable (SNDD) porte l’ambition d’accélérer la transition du Maroc vers une économie verte et inclusive d’ici 2030 et apporter une réponse concrète aux engagements internationaux du Maroc. Quatre ans après sa mise en œuvre, la Commission nationale du développement durable (CNDD), lors de sa réunion tenue en juin 2022 sous la présidence du chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, a mandaté l’autorité gouvernementale chargée de l’environnement pour procéder à son évaluation en tenant compte des nouvelles donnes nationales et internationales.
Revenant sur l’évaluation de la SNDD, la ministre de la Transition énergétique et du Développement durable, Leila Benali, a récemment passé en revue les différentes réalisations relatives à son implémentation. Il s’agit notamment de la dynamique enclenchée favorisant l’adhésion de l’administration aux enjeux de cette Stratégie et du développement durable en général, la gouvernance instaurée en vue d’un échange fluide entre les départements et la mise en place d’une plateforme digitale permettant plus d’efficience dans le suivi de la mise en oeuvre. En revanche, Said Chakri, expert en environnement, développement durable et changement climatique, a relevé certaines limites qui, d’après lui, ont entravé la bonne mise en œuvre de la SNDD. «La Stratégie nationale de développement durable est basée sur 7 enjeux.
Néanmoins, si l’on compare ces derniers avec les 17 objectifs de développement durable (ODD) des Nations unies, on constate que plusieurs n’ont pas été pris en compte au niveau de la SNDD. L’autre point très important est que ladite stratégie a été élaborée du haut vers le bas et non pas d’une façon concertée ou approuvée par l’ensemble des acteurs», a-t-il expliqué. La SNDD renaît de ses cendres En vue de combler certaines lacunes relatives à son exécution optimale, en particulier les indicateurs de performance et la convergence entre les cadres de la SNDD et les ODD, Benali a préconisé la mise en place d’une stratégie qui contribue à la réalisation des orientations du nouveau modèle de développement (NMD) et son inscription dans la durabilité à l’horizon 2035.
Il est également question de définir une vision intégrée et intersectorielle, dans une logique de convergence des politiques et stratégies publiques. Et ce, afin de renforcer les synergies nécessaires à la réalisation des priorités nationales en matière de développement durable, en sus de l'identification d’objectifs mesurables (cibles et indicateurs) jalonnés dans le temps. Pour Said Chakri, la décision concernant la refonte de la SNDD est tout à fait légitime, puisqu'il est primordial aujourd’hui d’harmoniser celleci avec les ODD.
«Plusieurs connaisseurs de la SNDD s’accordent à dire qu’elle couvre seulement 70% des objectifs de développement durable. De plus, plusieurs handicaps et contraintes bloquaient sa mise en œuvre, et notre plus grande crainte est que les mêmes erreurs se reproduisent dans cette refonte. D’où la nécessité d’impliquer l’ensemble des acteurs, notamment les acteurs étatiques, la société civile, les ONG, les médias, le secteur privé, mais aussi les citoyens dans cette opération. Cette stratégie devrait normalement concerner tous les secteurs et ne pas être uniquement l’apanage du ministère de la Transition énergétique et du Développement durable. Il faudrait se pencher également sur la déclinaison de la SNDD au niveau des régions et communes. Cela passe en l'occurrence par une inclusion des enjeux de développement durable au sein de leur plan de développement», a-t-il détaillé.
Les assises régionales Constituant une phase importante de la refonte de la SNDD, les assises régionales sur le développement durable ont été lancées lundi 13 mars dans la région de Laâyoune-Sakia El Hamra. Celles-ci devraient par la suite prendre place dans les différentes régions du Royaume. Lesdites assises s'assignent comme objectif d’aborder les thématiques de développement durable qui sont au cœur des préoccupations de chaque région et de veiller à leur articulation avec les orientations stratégiques de la future SNDD. En outre, la ministre a insisté sur l’importance de ce processus consultatif qui, selon elle, mobilise toutes les parties prenantes, que ce soit au niveau central ou territorial. Le but étant d’asseoir les bases d’un développement plus durable.
«Cette étape de concertation, qui sera menée avec la participation de tous les acteurs et intervenants locaux, territoriaux, publics et privés, sera l’occasion d’analyser la situation pour jeter les jalons d’une bonne gouvernance à travers la décortication des enjeux du développement durable dans chaque région. Il s’agit aussi de la définition des priorités ainsi que de la proposition de solutions capables de faire du développement régional un développement global, équilibré et durable», a souligné Leila Benali En parallèle, une plateforme de consultation citoyenne interactive (www.noussahimo.gov.ma) sera mise en place pour recueillir les avis et opinions des citoyens au Maroc et à l’étranger, afin d’assurer la réussite de ce chantier stratégique. Au terme de ce processus de concertation, une assise nationale devrait être organisée durant l'été pour présenter la version actualisée de la SNDD, qui prendra en compte les conclusions des différentes consultations et la feuille de route de sa mise en œuvre, a fait savoir la ministre.
Un pour tous, tous pour un
L’élaboration de la future SNDD s’appuie sur les instances de pilotage stratégique existantes que sont la Commission nationale de développement durable (CNDD), présidée par le Chef du gouvernement, et le Comité de suivi de la SNDD (CS-SNDD), présidé par la ministre de la Transition énergétique et du Développement durable. Le suivi opérationnel de son élaboration s’appuie, quant à lui, sur la mise en place d’une Unité de gestion du projet (UGP) et d’un Comité opérationnel. Qui plus est, l’expert en environnement, estime qu’il est important d’adopter une approche participative basée sur l’intelligence collective et garantissant l’implication de tous pour réussir la transition du Maroc vers une économie verte et inclusive.
«Pour avoir une stratégie efficace, il est nécessaire de privilégier trois aspects essentiels : l’aspect technique, en mettant en place une technologie capable de répondre aux besoins en question, le financement ainsi que la mobilisation et la sensibilisation à l’importance de l’économie verte. Les citoyens marocains doivent savoir qu’il est question d’une vision durable et de changements qu’il va falloir pérenniser. Les responsables sont appelés à leur tour à mener des actions concrètes et faire en sorte que la SNDD soit bien exécutée», a-t-il dit.
En ce qui concerne la loi-cadre n° 99-12 portant Charte nationale de l'environnement et du développement durable, elle devrait, selon Said Chakri, être révisée de manière à ce que l’ensemble des acteurs, notamment les collectivités territoriales et le secteur privé, soient obligés de la décliner sur le terrain et d’adopter la culture de l’économie verte. En somme, à travers l’actualisation de la SNDD, les responsables ambitionnent d’en faire un levier capable de consacrer la justice sociale, consolider le développement humain, réduire les disparités sociales et territoriales, promouvoir la condition des femmes et des enfants et assurer le droit au développement des générations futures.