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Fiscalité des zones franches : Le Maroc moins accommodant que ses voisins

Actualité Finance - Les zones franches: La Tunisie devance le Maroc

 

Certains pays de la région proposent des incitations fiscales dans les zones franches encore plus attrayantes que celles offertes par le Maroc.

Le Royaume poursuit ses efforts pour se conformer aux standards européens.

 

Par Badr Chaou

Actualité Finance - Les zones franches: Les propostions de nos voisins sont plus attrayantes

En vue de renforcer son ouverture économique et dynamiser les investissements, le Maroc a mis en place des régimes fiscaux préférentiels dans ce qu’on appelle les zones franches, onshore et offshore. En effet, les entreprises qui s’y installent bénéficient de plusieurs incitations fiscales et avantages offerts en matière douanière et d’exportation, comme notamment l’exonération illimitée de la TVA sur les produits et services.

Toutefois, le contexte d’internationalisation des relations économiques a incité à plus de rigueur et de conformité fiscale de la part des pays qui souhaitent drainer les capitaux étrangers. Ainsi, certaines mesures mises en place par le Maroc déplaisent à l’Union européenne (UE), ce qui lui a valu de se retrouver dans la fameuse liste grise des paradis fiscaux.

«Nous savons bien que dans ces zones industrielles, il existe une multitude d’avantages accordés. L’impôt sur les sociétés bénéficie à titre d’exemple d’une exonération durant les 5 premières années d’exploitation. Par la suite, un taux de 8,75% est applicable. Il y a aussi des exonérations sur les acquisitions de terrains pour la réalisation de projets d’investissement», nous rappelle un expert sur le sujet.

D’autres incitations sont également proposées, nous confirme la même source : «au niveau de l’impôt sur le revenu, ces zones proposent une exonération sur les 5 premiers exercices de l’activité et un abattement de 80% à la fin des cinq premières années».Actualité Finance Maroc - Les zones franches

Des propos confirmés par les informations disponibles sur le site de MedZ (parc industriel). Les parcs offshore gérés par MedZ proposent notamment un taux effectif d’IR réduit à 20%, l’impôt sur les sociétés de 0% pendant les 5 premières années et une réduction de 50% les années suivantes, en plus d’une exonération de la TVA sur les exportations des parcs offshore. C’est précisément ce type d’incitations, ainsi que d’autres, qui ont remis en cause le respect de la réglementation internationale des zones franches au Maroc.

 

Actualité Finance - Les zones franches: Ce que pratiquent d’autres pays

Les incitations accordées par le Royaume en vue de renforcer sa compétitivité peuvent certes raviver le débat autour de la conformité fiscale imposée par l’UE. Toutefois, de l’avis des experts, le Maroc s’est surtout inspiré des pratiques existantes dans d’autres pays.

Pour Arji Adelaziz, président de la Commission juridique, fiscale et sociale de la CFCIM, «le Maroc n’a rien créé. Il s’est juste inspiré de ce que pratiquent plusieurs pays. Les zones franches existent dans la plupart des pays en voie de développement comme le Mexique, le Brésil ou la Chine, et même dans certains pays avancés comme les USA ou la France avec ses ZFU».

En effet, si l’on compare le Royaume avec des pays qui ont pu bénéficier de la grâce de l’Union européenne et sortir de la liste grise des paradis fiscaux, tels que la Tunisie, on peut dire que le Maroc mériterait également le même traitement. Car, les mesures incitatives proposées par les zones offshore en Tunisie sont bien plus importantes que celles effectives au Maroc, et dans le meilleur des cas similaires.

A titre d’exemple, en Tunisie l’exonération totale de l’IS est sur 10 ans pour les sociétés créées avant le 1er janvier 2019 au moment où le Maroc a fixé la durée d’exonération à 5 ans. De même, les zones franches en Tunisie proposent une réduction de 50% à partir de la 11ème année, alors que le Maroc a statué sur les taux en vigueur à partir de la 5ème  année d’activité de l’entreprise ou une réduction de 50% à partir de la même année, mais seulement sur certains parcs industriels.

Ajoutons à cela la liberté de transfert des changes sans visa préalable et le libre rapatriement de dividende à partir des zones franches tunisiennes. Cette situation incite à un questionnement, surtout que la Tunisie a été l’un des premiers pays à sortir de la liste des paradis fiscaux... un mois après son «inscription».

Autre exemple :  l’Egypte, qui ne figure sur aucune liste des paradis fiscaux de l’UE, et qui pourtant propose une multitude de mesures fiscales incitatives dépassant de loin celles instaurées par les zones industrielles au Maroc.

Si l’on s’en remet à la lettre économique d'Egypte, une publication mensuelle du Service économique du Caire, traitant des zones offshore baptisées «zones économiques spéciales» (ZES) arrêtée à mai 2018, nous remarquons qu’elles proposent aux sociétés qui y sont établies l’exemption totale de droit de taxes sur les importations. De même, les ZES ne sont soumises ni à la loi sur les droits de timbre ni à aucun type de taxes ou d'impôts indirects. Les intérêts des prêts accordés aux sociétés établies dans une ZES sont également exemptés sans limite de durée.

Par contre, la situation demeure différente entre les pays européens et le Maroc. D’après le portail de l’économie, des finances, de l’action et des comptes publics français, les avantages fiscaux aux entreprises sont notamment permis aux zones franches urbaines territoires entrepreneurs (ZFU - TFE). Ces zones sont destinées à l’exercice d’une activité industrielle, commerciale ou artisanale, plafonnée à 50 salariés. Parmi les conditions imposées, le capital ne doit pas être détenu pour plus de 25% par une entreprise de plus de 250 salariés, il faut avoir au moins 50% des effectifs en CDI ou CDD d’au moins 12 mois et être résident en zone ZFU-TFE. 

Sont inéligibles aux exonérations les entreprises exerçant dans l’industrie lourde, à l’image de l’industrie automobile, navale, sidérurgique ou encore le transport routier de marchandises. Cette différenciation est tout à fait concevable à l’aune de la divergence entre les deux tissus économiques.

 

Actualité Finance - Les zones franches: Le Maroc tente de se défendre

Entre l’adhésion aux mesures anti-BEPS (Erosion de la base d’imposition et de transfert de bénéfices) et la suppression du régime fiscal spécifique aux banques offshore, le Royaume n’a donc ménagé aucun effort en vue de se conformer aux standards européens en matière fiscale.

Le pays a tenté, mais en vain, de clarifier ses spécificités auprès de ses interlocuteurs européens.

Lors du maintien du Maroc dans la liste grise des paradis fiscaux de l’UE, le patron du fisc, Omar Faraj, nous avait confié que «comparativement à d’autres pays considérés comme paradis fiscaux, le Royaume, à travers ses zones franches, crée de la valeur ajoutée réelle d’un point de vue économique, notamment à travers des usines comme celle de Renault-Nissan de Tanger. Les paradis fiscaux, au vrai sens du terme, sont connus pour abriter des coquilles vides ne créant pas de richesses économiques, et ayant pour seule mission de faire transiter des flux financiers».

Pour Arji Adelaziz, «les  avantages accordés par le Maroc sont un simple renoncement à collecter l’impôt pendant une durée limitée de 5 années. C’est donc un sacrifice que consent le contribuable marocain en faveur des IDE dans le but de créer de l’emploi et collecter des devises étrangères».

Par ailleurs, ajoute-t-il, «le Maroc ne bénéficie pas de subventions étrangères pour développer ses zones franches. Or, tous les pays qui adhèrent à l’Union européenne bénéficient de subventions européennes. Les exemples les plus criants sont l’Espagne, le Portugal et la Grèce, mais nous avons aussi la France ou l’Allemagne, pays riches, qui bénéficient des subsides issus de la politique agricole commune (PAC)».

Toutefois, d’après nos interlocuteurs, les mesures d’exonération de la taxe professionnelle, l’exonération des droits de douane pour les biens acquis par les gérants étrangers… sont parmi les éléments qui posent problème, et qui sont, entre autres, derrière le maintien du Maroc dans la liste grise.

 

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