Le premier semestre 2025 offre un tableau contrasté du marché mondial des smartphones : d’un côté, une stabilité relative portée par les géants historiques et, de l’autre, un continent africain en pleine mutation.
Par K. A.
Le marché mondial des smartphones entame l’année 2025 dans un contexte marqué par une stabilité prudente, mais aussi par des disparités régionales qui dessinent les contours d’un secteur à la croisée des chemins. Selon les données consolidées de Canalys publiées fin juin, près de 297 millions d’unités ont été expédiées au premier trimestre 2025. Cette stabilité globale masque des enjeux complexes.
Les tensions géopolitiques dans plusieurs régions, les fluctuations des politiques tarifaires et des chaînes d’approvisionnement fragiles incitent à la prudence chez les acteurs. Toutefois, dans cet environnement contrasté, l’Afrique confirme son rôle de locomotive de la croissance, en s’imposant comme un marché stratégique et porteur d’avenir.
Hiérarchie inchangée
Au premier trimestre, la hiérarchie mondiale des fabricants reste inchangée. Apple, Samsung et Xiaomi concentrent ensemble plus de la moitié des volumes mondiaux, avec respectivement 19,1%, 19% et 13,9% de parts de marché. Cette suprématie traduit un paysage très polarisé, dans lequel les marques premium continuent d’exercer une forte attraction malgré les incertitudes économiques.
«Le marché mondial des smartphones est devenu un oligopole où les trois leaders ont su conjuguer innovation produit, maîtrise des coûts et maîtrise de la chaîne logistique. Leurs investissements massifs dans la recherche et développement et les campagnes marketing leur garantissent une forte visibilité, particulièrement sur les segments milieu et haut de gamme», explique Dr. Marie Dufour, analyste en télécommunications chez TechInsight Research. Cette tendance se retrouve dans les performances des marchés émergents d’Asie du sud-est, où la demande reste soutenue. L’Indonésie, la Thaïlande et les Philippines tirent leur épingle du jeu grâce à une population jeune et connectée, attirée par des modèles à la fois performants et accessibles.
L’Afrique, un marché en pleine révolution
À l’inverse, c’est sur le continent africain que la croissance la plus marquée s’affiche. Les expéditions ont atteint 19,4 millions d’unités au premier trimestre 2025, soit une progression de 6% sur un an, selon les chiffres de Canalys. Ce dynamisme illustre un changement profond : le smartphone devient le principal accès à Internet pour une population jeune et urbaine, dans un contexte où les infrastructures fixes restent limitées.
L’Égypte fait figure de locomotive avec une hausse spectaculaire de 34% des ventes. L’Afrique du Sud affichent aussi des progressions solides, respectivement de 16% et 14%. En revanche, le Nigeria, plus grand marché du continent, souffre d’un recul de 7%, conséquence directe d’une crise économique qui freine le pouvoir d’achat.
«L’Afrique est un terrain fertile pour les fabricants qui savent s’adapter aux réalités locales. Transsion, avec ses marques Tecno, Infinix et iTel, est un exemple probant : ses produits abordables, aux batteries longue durée, répondent parfaitement aux besoins du consommateur africain», souligne Dufour. En effet, Transsion détient désormais 47% du marché africain, suivi par Samsung avec 21% et Xiaomi à 13%.
La marque chinoise Honor fait une percée remarquable, avec une croissance de plus de 280% de ses expéditions en un an, portée par des modèles innovants et compétitifs. La dynamique africaine, qui consolide un volume estimé à 38-40 millions d’unités sur le premier semestre, constitue un point d’appui majeur pour les acteurs du secteur, souvent confrontés à la saturation ou à la décroissance dans d’autres zones.
Néanmoins, plusieurs défis subsistent, à commencer par la nécessité d’améliorer la couverture réseau 4G et 5G, l’accessibilité financière pour les consommateurs et la lutte contre les importations parallèles et la contrefaçon, qui représentent encore une part significative des ventes dans certains pays. Sur le plan mondial, la prudence reste de mise. Les constructeurs observent les évolutions géopolitiques avec attention, notamment les tensions liées aux droits de douane et aux régulations américaines sur certaines marques chinoises, qui pourraient affecter les chaînes d’approvisionnement et les coûts.