Les projets d’envergure que lance le Maroc à l’horizon 2030 devraient constituer un besoin entre 100 à 150 Mds de dollars. L’Etat compte sur une multitude de stratégies pour financer ses besoins.
Par A. Hlimi
Le Maroc a décidé de miser sur des projets d'envergure à l’horizon 2030, notamment les infrastructures sportives, les projets liés à l'habitat, les infrastructures de transport, touristiques, hydrauliques ou encore industrielles qui constituent des axes majeurs de développement.
Ces projets sont estimés entre 100 et 150 milliards USD à l'horizon 2030 par BMCE Capital Global Research, dont la directrice Equity, Dounai Filali, s’exprimait à l’occasion d’une rencontre à la Bourse de Casablanca. Ils devraient être financés par l'État, la coopération internationale et des financements privés. Dans le détail, les infrastructures sportives liées à la CAN 2025 et la Coupe du monde 2030 nécessiteraient, selon les estimations du bureau de recherche, entre 2 et 3 Mds de dollars.
La CDG, en tant que carrefour de l’épargne nationale, sera chargée de la structuration des financements. Et bien que ces échéances sportives soient en tête de liste en matière de médiatisation, force est de constater que d’autres chantiers vont demander encore plus de ressources. On parle notamment de la mise en œuvre de la stratégie industrielle 2030 (35 à 60 Mds de dollars), les infrastructures hydrauliques (40 Mds USD) ou encore les grands projets logistiques qui entrent dans la stratégie nationale du développement de la compétitivité logistique (3 Mds USD). Selon BKGR, ces projets seraient essentiellement financés par la coopération internationale et le concours du secteur privé.
L’Etat devrait, lui, cofinancer d’autres projets comme le programme de relance du logement social et la généralisation de la protection sociale, en plus d’une partie des financements liés aux infrastructures de transport. Selon Dounia Filali, cela ne devrait pas provoquer de pressions sur les finances de l’Etat et les taux obligataires, étant donné, d'une part, les délais de réalisation étalés sur plusieurs années. Et, d'autre part, le mix de financement choisi qui devrait soulager le Trésor en faisant contribuer le privé et les partenaires internationaux. Ces projets devraient permettre à la croissance du Maroc de s'améliorer au cours des prochaines années pour atteindre 6% à l'horizon 2035.
Vers un nouveau palier de croissance
Dounia Filali a profité de l’évènement pour dresser un tableau de la santé économique du Royaume. Selon l'experte, malgré une résilience notable face aux crises successives, les projections de croissance pour 2024 restent prudentes, oscillant entre 2,1% et 3,5% selon les estimations des différents organismes qui publient des prévisions économiques. Ce ralentissement est principalement attribuable à une contraction significative de la valeur ajoutée agricole, conséquence directe des conditions pluviométriques défavorables prévues pour l'année. Ainsi, le ralentissement de l'activité économique anticipé pour 2024 est en grande partie dû à une hypothèse de récolte céréalière limitée à 27 millions de quintaux. Le déficit budgétaire devrait, pour sa part, se stabiliser en 2024, principalement grâce à une augmentation des recettes fiscales et à une réduction des dépenses de compensation.
Selon la Banque centrale, cette stabilisation pourrait amener le déficit à -4% du PIB en 2025. Par ailleurs, S&P Global Rating a récemment amélioré la perspective du Maroc de «stable» à «positive», tout en maintenant la notation BB+, reflétant ainsi une confiance accrue dans la gestion macroéconomique du pays. Sur le front du commerce extérieur, une baisse des importations de 4% a été enregistrée à fin mars 2024, principalement due à une diminution de la facture énergétique. En parallèle, les exportations ont progressé de +3% pour atteindre 113,6 milliards de dirhams, portées par la performance du secteur automobile et la reprise des exportations de phosphates. Ces développements contribuent à maintenir les réserves de change à un niveau confortable, favorisant ainsi une meilleure résilience économique.
Transformation structurelle
Dounia Filali a invité le public à sortir la tête du guidon et à regarder les accomplissements de notre économie sur un horizon plus long. Selon elle, l'économie marocaine a connu une transformation structurelle significative au cours des dernières décennies. Les exportations de biens et services ont considérablement évolué, avec une diversification notable des secteurs exportateurs.
En 2023, l'industrie automobile représentait 33% des exportations, suivie de l'agriculture et de l'agro-industrie (19%) et des phosphates et dérivés (18%). Cette diversification est le fruit de politiques industrielles stratégiques, telles que le Plan d'accélération industrielle et le Pacte national d'émergence industrielle, qui visent à renforcer la compétitivité et à stimuler l'innovation.