Amine Bennis, directeur administratif et financier de Label' Vie
Depuis son introduction en Bourse en 2008, Label’Vie a fait bien du chemin. En marge de la présentation des résultats annuels 2018 de la société, Amine Bennis est revenu sur le parcours de la société dont le chiffre d’affaires a été multiplié par 11 en 10 ans.
Il se projette également dans les dix prochaines années, à la lumière des évolutions que connait la distribution moderne et des particularités du marché marocain. Entretien.
Propos recueillis par A. Elkadiri
Finances News Hebdo : Label' Vie a considérablement grossi depuis son IPO en 2008. Pouvez-vous nous retracer la trajectoire de la société sur ces dix dernières
années ?
Amine Bennis : Le Groupe Label’Vie a démarré en 1985 par l’ouverture de son premier magasin à Rabat, sur la Route des Zaërs. Il y a eu par la suite une longue période d’apprentissage du métier conjugué par le manque de ressources de financement, jusqu’en 2008, année de notre introduction en Bourse.
A l’époque, le groupe comptait 13 magasins, à peu près 15.000 m2 de surfaces de vente, un chiffre d’affaires de 800 MDH et un résultat à peine à l’équilibre. Depuis l’IPO et l’encaissement de nouveaux capitaux, nous avons lancé véritablement notre plan de développement. Aujourd’hui, si l’on veut faire un bilan de ces dix dernières années post-IPO, nous avons multiplié notre chiffre d’affaires par 11, la surface de vente est passée à 187.000 m2. En juin 2019, nous ouvrirons notre 100ème magasin et notre surface de vente dépassera les 200.000 m2.
Surtout, nous sommes passés d’une société avec un seul concept d’activité, à savoir le «supermarché», à une société multiformat qui, outre les «supermarchés», opère dans l’«hypermarché» qui possède un potentiel énorme, mais aussi dans l’«hypercash», un concept innovant et que l’on considère parfaitement adapté à une certaine typologie de clientèle au Maroc.
Nous avons aussi, au cours de ces dix dernières années, noué un partenariat avec le groupe Carrefour, qui nous a permis de bénéficier d’un apport en expertise, mais aussi de développer de nouveaux concepts d’activités.
F.N.H. : Les 10 années à venir seront-elles aussi des années de développement ? Le potentiel de croissance est-il encore là ?
A. B. : Nous n’allons pas nous arrêter là. Nous allons poursuivre notre développement dans les dix prochaines années. D’abord, parce que le potentiel de croissance reste très important au Maroc où la PDM de la distribution moderne ne représente que près de 15% du total marché.
D’autre part, nous nous devons, pour pouvoir exploiter au mieux ce potentiel, de mettre en place les concepts les plus adaptés à la clientèle marocaine. Le potentiel d’Atacadao (l’enseigne hypercash de Label' Vie) est de ce point de vue très important. La clientèle à qui il faut apporter de la valeur ajoutée en termes de prix est importante au Maroc. Atacadao permet justement d’offrir à cette clientèle les meilleurs prix d’achats du marché. Nous avons un décrochage important à Atacadao par rapport au marché et aux autres concepts de distribution moderne. Et nous nous devons d’avoir plusieurs concepts d’activité pour que celui qui cherche la proximité et le service puisse trouver son compte, idem pour la diversité ou le prix.
Dans 10 ans, nous aurons donc la possibilité d’augmenter notre part de marché dans le moderne, mais aussi augmenter celle du moderne dans le marché global.
F.N.H. : Quelles sont vos ambitions sur le continent africain ?
A. B. : Nous avons l’ambition de nous développer dans d’autres pays africains. Nous avons déjà, à travers notre holding, une participation dans une société en Côte d’Ivoire. Nous avons un plan de développement et d’ouverture de magasins dans ce pays et dans la région. Certes, la période d’apprentissage est plus longue, car c’est un marché que l’on ne connaît pas bien. La période de mise en place de nos fondamentaux, en termes de logistique, d’informatique, de gestion, etc. est en cours. Dès que les choses le permettront, nous allons commencer le développement africain sur toute la région UEMOA, une zone qui présente un potentiel important.
F.N.H. : Dans les marchés matures, les innovations technologiques bousculent les grands groupes de distribution. Le Maroc sera-t-il rattrapé par cette vague, selon-vous ?
A. B. : Nous avons la chance d’avoir quelques pays qui ont un peu d’avance par rapport à nous dans ce domaine. Nous sommes attentifs aux expériences qui se font ailleurs, et nous nous dirigeons indéniablement vers les mêmes solutions. Le marché marocain n’est pas décorrélé par rapport aux autres marchés. Ce qui marche ailleurs va forcément, à un moment ou un autre, marcher au Maroc. Le digital en fait partie, tout comme les services complémentaires de livraison à domicile, qui peuvent aussi être mis en place chez nous. Cela présente un coût, et nous restons très vigilants et très regardants sur ce qui peut-être innovant, avec plusieurs études qui sont faites aujourd’hui pour mettre en place ces services là. A partir du moment où ils apporteront une valeur ajoutée à nos clients et aussi, bien sûr, à notre société.
F.N.H. : Cette année, Label’Vie a encore dégagé beaucoup de cash. Vous avez distribué la moitié de votre résultat en dividendes. Quelle est votre politique en la matière ?
A. B. : Notre stratégie consiste à distribuer 50% de notre résultat consolidé en dividendes, et de garder l’autre moitié pour financer le développement, qui, on l’a vu, représente en moyenne une enveloppe annuelle d’environ 500 à 600 millions de DH.
Pour 2019, l’enveloppe est de plus de 600 millions de DH, dédiée au développement, mais aussi à l’investissement dans le renouvellement du matériel pour un périmètre qui grossit aussi, et dont la maintenance coûte un peu d’argent.
Je rappelle qu’en 2018, nous avions distribué exceptionnellement 70% de notre résultat consolidé.
Pour cette année, nous revenons donc à notre stratégie de 50/50.
F.N.H. : Comment démarre
2019 ?
A. B. : L’année démarre très bien. Nous avons déjà ouvert 3 points de vente et nous continuons sur le même rythme de performances et de croissance de nos magasins. De belles réalisations en perspective.◆
Le développement s'accélère
Plus de mètres carrés, plus de marges et plus de cash pour rémunérer les actionnaires et financer le développement : sur ses trois principaux chevaux de bataille, le groupe Label’Vie progresse. Sur le plan de l’expansion du réseau, 2018 a été une année record en termes d’ouverture de magasins (17 nouveaux sites inaugurés). Au total, ce sont plus de 14.000 m2 supplémentaires de surfaces de vente qui ont vu le jour. En 2019, Label’Vie poursuivra ses investissements et prévoit l’ouverture de 30.000 m2 de surfaces de ventes additionnelles. L’enveloppe dédiée à ces investissements est de 600 millions de DH. Sur le plan commercial, les volumes de ventes ont réalisé un bond de 9% par rapport à 2017, à plus de 9 milliards de DH. Le management se réjouit aussi de l’amélioration des marges. La marge brute est ainsi passée de 21,2% en 2017 à 21,7% en 2018, soit un gain de 0,5 point de base, grâce notamment à la maitrise des stocks. Le résultat net ressort à 288 millions de DH, en hausse de 20% par rapport à celui de 2017. Plus de la moitié de ce résultat sera distribué en dividendes.