Hausse inquiétante des prix des intrants.
Le taux de remplissage des barrages affiche 36% seulement.
Par C. Jaidani
Les campagnes agricoles se suivent, mais ne se ressemblent pas. Chaque saison a ses propres caractéristiques, ses contraintes et aussi ses atouts. La campagne 2021/2022 n’échappe pas à cette règle. Les pluies d’automne accusent un sérieux retard. Les quelques précipitations enregistrées il y a une semaine n’ont concerné que les zones montagneuses, et leur volume était faible pour pouvoir donner une impulsion au secteur.
Cette situation se répercute sur le moral des agriculteurs. Bien entamés il y a quelques semaines, les préparatifs tournent actuellement au ralenti. En période normale, les travaux d’emblavement pour les semis précoces atteignent un stade avancé. Ce qui n’est pas le cas actuellement. Un vent d’incertitude commence à s’installer sur le monde rural. Les paysans sont plutôt prudents dans leurs transactions et leurs démarches.
«En pareille période, on notait une forte demande de location du matériel agricole, notamment les tracteurs pour travailler le sol. A cause du retard des pluies, les opérations de ce genre sont faibles par rapport à la normale», témoigne un propriétaire de matériel agricole dans la région de Benslimane. Véritables baromètres des régions agricoles, les souks hebdomadaires fonctionnent de façon assez timide. Normalement, entre octobre et novembre, l’activité tourne à plein régime. Aujourd’hui, elle est en berne surtout avec le renchérissement des intrants. Contactés à ce sujet, des professionnels du secteur affichent un optimisme mesuré.
«La pluie est un facteur déterminant pour réussir la campagne agricole. Encore faut-il qu’elle soit bien répartie dans l’espace et dans le temps. Par le passé, plusieurs saisons avaient bien démarré, mais par la suite elles ont subi une sécheresse aiguë. A l’inverse, d’autres saisons qui ont connu un déficit hydrique important au début, ont enregistré par la suite un apport pluviométrique record. Comme ce fut le cas la saison dernière qui s’est soldée par l’une des meilleures récoltes des dernières années», souligne Mohamed Sabri, président d’une coopérative dans la région de Chaouia.
«Les fellahs gardent espoir et ils sont connus pour leur capacité de rattrapage. Une fois les pluies au rendez-vous, ils vont travailler d’arrache-pied pour rattraper le retard et lancer les différents travaux», ajoute-t-il. Outre le retard des pluies, la campagne est aussi impactée par un renchérissement des intrants.
Ces dernières semaines, les prix des engrais ont connu une hausse exponentielle qui a atteint quasiment le double. Les produits importés ainsi que ceux fabriqués localement ont été impactés par la hausse des prix de la matière première. A l’international, on note une flambée des cours due à la faible offre des principaux producteurs, notamment la Chine et les États-Unis. Concernant les semences, on enregistre aussi une pression sur les prix.
Pour faire face à cette situation, Mohamed Sadiki, ministre de l’Agriculture, de la Pêche maritime, du Développement rural et des Eaux et Forêts, a annoncé le lancement de mesures proactives pour garantir la stabilité des prix des céréales qui, bien que destinées pour l’essentiel à l’alimentation, voient une part réservée aux semences.
A ce sujet, le ministre a annoncé la suspension des droits de douane à partir du 1er novembre. Pour ce qui est des retenues des barrages, le déficit hydrique se creuse. Un recul qui risque de progresser davantage avec le retard des pluies et la forte demande aussi bien pour l’irrigation que l’eau potable et les autres activités. Ainsi, le stock en eau a atteint, au 27 octobre 2021, 5,8 milliards de m3, soit un taux de remplissage de 36% contre 36,4% au cours de la même période de l’année dernière. Rappelons toutefois qu’en matière de retenue d’eau des barrages, il faut nuancer entre les barrages qui se trouvent au nord de l’Oued Oum Rabii et ceux au sud.
Les premiers affichent des réserves en eau d’environ 50 à 60%. Les seconds, par contre, sont à moins de 20% et certains frôlent même le tarissement. Nous citons par exemple le barrage Al Wahda qui possède la plus grande retenue du Royaume : il enregistre 60,8%. Pour leur part, Al Massira et Bine El Ouidane, respectivement deuxième et troisième ouvrages du pays, présentent des taux de 9,1% et 15,9%.