Par B. Chaou
L’inconnu et l'incertain sont désormais les maîtres-mots qui dominent l'activité de l’économie mondiale en cette période de crise sanitaire. L’apparition de nouveaux variants ou encore le retard des campagnes de vaccination dans certains pays sont des éléments qui compliquent la donne aux gouvernements.
Et qui les poussent à réfléchir aux prochaines étapes avec beaucoup de prudence, surtout dans un contexte de tension économique et de forte irritation sociale. Après un an de crise, la stratégie qui semble être décidée est celle de vivre avec le virus. Toutefois, cela suppose un recadrage continu des mesures de la part des autorités afin d’éviter une hausse des contaminations, ce qui entraine un manque de visibilité pesant sur les entreprises, et particulièrement celles de certains secteurs, tels l’hôtellerie et la restauration.
Ce qui est le plus craint aujourd’hui, c’est de s’enfoncer dans un processus économique de «Go and Stop». Autrement dit, certains secteurs seraient contraints à l’arrêt ou à une baisse d’activité juste après avoir redémarré, à cause de la mise en place, encore une fois, de nouvelles mesures restrictives. Interrogé à ce sujet, Idriss El Houari, docteur en économie à l’Université Hassan II de Casablanca, nous explique que «c’est une problématique à laquelle sont confrontés tous les pays du monde, y compris le nôtre. Nous ignorons comment va évoluer cette pandémie, et l’efficacité de protection des vaccins sur les nouveaux variants qui pourront surgir ou ceux déjà existants et sur la durée de l’immunité. Ce sont des paramètres qui ne sont pas clairs pour le moment et qui retardent le retour vers le modèle économique d’avantcrise».
Cette conjoncture instaure en effet un climat de marasme. D’autant que, selon Idriss El Houari, «les secteurs qui pourraient subir l’impact négatif de l’effet Go and Stop sont surtout les secteurs qu’on appelle les profils L. Ce sont ceux qui n’ont quasiment pas pu travailler durant cette crise, comme le tourisme international, le secteur du spectacle et de l’évènementiel. Les opérateurs touristiques comme les agences de voyages et les agences de location de voitures sont aussi concernés».
Des secteurs qui sont déjà dans le dur, à l’image de la branche des agences de location de voitures qui a marqué, rappelons-le, une baisse de plus de 60% de son chiffre d’affaires par manque de touristes étrangers. «Il y a aussi les secteurs de profil W qui ont une activité discontinue à cause des restrictions qui interviennent à chaque fois, souvent durant les périodes de vacances ou de situation inédite, comme observé durant la fin d’année ou durant le mois de ramadan avec la fermeture de certains établissements comme les cafés et les restaurants. Ce sont des secteurs qui pensent à chaque fois que le pire est passé, mais juste après avoir redémarré leurs activités, ils sont pris par de nouvelles contraintes sanitaires», souligne notre économiste.
Risque sur la viabilité des entreprises
Sur le long terme, cette tendance pourrait sans aucun doute porter atteinte à la santé financière des entreprises. Sans visibilité ni activité résiliente, les professionnels auront du mal à tenir le coup. Cette situation aurait aussi comme effet collatéral la détérioration de la qualité de travail.
«Plus les entreprises voient leurs revenus baisser, plus elles se détachent de leur personnel. Dans cette perspective, et surtout dans les secteurs à profil L ou W, l’offre de travail pourrait se dégrader avec une hausse des salariés sans contrats ni acquis sociaux», explique El Houari. En définitive, il faut une stratégie concrète et viable sur le long terme afin de permettre aux entreprises d’avoir de la visibilité et éviter de se retrouver dans de mauvaises situations à cause de fermetures subites de leurs activités.