Relance économique : La machine fortement grippée

Relance économique : La machine fortement grippée

Les mesures restrictives répétitives plombent la reprise tant attendue et sapent le moral des chefs d’entreprises.

Faudrait-il que l’Etat recadre sa politique de santé publique pour enfin libérer l’économie ?

 

Par D. William

 

Parler de reprise économique dans le contexte ressemble presque à une incongruité. L’espoir né après le déconfinement s’est transformé petit à petit en une profonde désillusion pour les opérateurs économiques. Entre la forte dégradation de la situation épidémiologique au Maroc et les durcissements des mesures restrictives par les autorités, la machine économique est actuellement bien grippée et les entreprises luttent davantage pour survivre que pour profiter d’une hypothétique relance.

De relance, les chefs d’entreprise n’en parlent plus. Ils n’y croient guère. Ils ont le moral dans les chaussettes. Pourtant, de multiples outils incitatifs ont été mis en place par les pouvoirs publics afin de leur permettre de reprendre une activité normale.

Il faut noter, à ce titre, que des milliers d’entreprises ont déjà eu recours aux mécanismes de garantie mis en place par la Caisse centrale de garantie. En effet, «Relance TPE» et «Damane Relance» ont profité à pas moins de 15.183 entreprises, pour un total de 22,4 milliards de DH de crédits ayant bénéficié de ces garanties exceptionnelles, soit un montant global d’engagements s’élevant à 19,7 milliards de DH. Mais le contexte sanitaire actuel bride toute initiative, les plonge dans une profonde incertitude et affaiblit davantage une économie déjà en léthargie.

D’ailleurs, lundi, les autorités ont haussé le ton et initié plusieurs restrictions dans la préfecture de Casablanca. Une mesure qui s’ajoute à d’autres similaires déjà prises dans plusieurs autres villes. Comment espérer alors ne serait-ce qu’un frémissement de l’économie dans pareil contexte ? «Nous devons gérer l’économie dans un climat d’incertitude et souvent de désordre. Ce qui ne favorise pas un climat de confiance, si nécessaire pour la relance», analyse à ce titre Mohamed Berrada, professeur à l’université Hassan II.

Clairement, la gestion de la crise sanitaire a fortement pris le pas sur les impératifs économiques. Avec pour conséquences la multiplication des secteurs en difficulté.

L’Etat devra encore passer à la caisse

L’Etat ne dispose pas d’un budget élastique pour soutenir continuellement les entreprises, les salariés, l’informel, bref l’économie en général. Le Roi l’avait d’ailleurs rappelé lors de son discours prononcé à l’occasion de la Fête du Trône.

«Cet appui ne peut continuer indéfiniment, car les aides accordées par l'Etat excèdent ses ressources», avait souligné le Souverain. Force est néanmoins de constater que le gouvernement, qui avait déployé un plan de soutien jusqu’en juin, est contraint de faire une rallonge.

Le secteur touristique, très sinistré à cause de cette crise sanitaire, vient d’ailleurs de bénéficier d’une aide spécifique. La Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) a ainsi lancé, mardi, un portail électronique réservé à la déclaration des salariés des entreprises du secteur touristique et des professionnels éligibles à l’indemnité forfaitaire financée par le Fonds spécial pour la gestion de la pandémie du nouveau coronavirus.

A ce titre, les entreprises concernées pourront déclarer leurs salariés et les stagiaires sous contrat insertion pour bénéficier, entre autres, d’une indemnité mensuelle de 2.000 DH devant être servie durant la période allant du 1er juillet à fin décembre 2020. De telles mesures risquent malheureusement de se multiplier pour éviter au Maroc une crise sociale majeure, dans ce contexte sanitaire très préoccupant marqué, d’ailleurs, par la prolongation de l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 10 octobre.

Alors, faudrait-il que le gouvernement recadre sa politique sanitaire afin de pouvoir enfin «libérer» l’économie ? C’est l’avis de la Confédération générale des entreprises du Maroc, qui pointe du doigt les incohérences des autorités dans cette phase de gestion de la crise.

Une posture que semble partager l’ancien ministre, expert en stratégies de développement et président de l’Alliance des économistes istiqlaliens, Abdellatif Maâzouz. Selon lui, «le gouvernement n’a pas su mettre suffisamment à profit les grands acquis des trois premiers mois de la crise, bien au contraire. Les principales raisons en sont l’improvisation, le manque de coordination entre les différentes composantes du gouvernement et l’insuffisance de sa communication avec les citoyens».

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