Parité dans le milieu professionnel: l’urgence de changer de paradigme

Parité dans le milieu professionnel: l’urgence de changer de paradigme

En quête de parité et d’égalité hommes-femmes dans le milieu du travail, le Maroc se heurte à des obstacles persistants.

 

Par M. Ait Ouaanna

Lors de son introduction en 2004, la Moudawana a été perçue comme une véritable révolution pour les droits des femmes au Maroc. Mais avec l’évolution de l’environnement socioéconomique, certaines dispositions de ce texte juridique se sont avérées «dépassées».

Actuellement en cours, la réforme du Code de la famille promet d’apporter une bouffée d’air frais à la question de l’émancipation des femmes au Maroc. En plus des modifications liées au côté législatif, un changement des mentalités demeure indispensable pour parvenir à assurer la parité au sein du milieu professionnel. C’est le constat fait, mardi 5 mars, par les différentes intervenantes d’une table-ronde organisée par le groupe Horizon Press sous le thème : «Femmes en entreprise : le défi de l’égalité des chances».

En dépit des efforts déployés par les différents acteurs privés et publics, le Maroc demeure à la traîne en matière d’égalité des genres. Selon un rapport publié en juin dernier par le Forum économique mondial, le Royaume se classe à la 136ème place sur un total de 146 pays indexés, avec un score de 0,621. Derrière ce retard sur la parité hommes-femmes, figurent des normes culturelles et des schémas éducatifs qui perpétuent une vision différenciée de la femme par rapport à l’homme.

C’est le constat dressé par Fatima Ouriaghli, vice-présidente du Conseil national de la presse (CNP). «Le regard porté sur les femmes est souvent teinté du stéréotype qui les cantonne aux engagements familiaux, ce qui entraîne parfois une réticence à leur confier certaines missions. Or, la femme n’est pas moins intelligente que l’homme. Il s’agit d’un être humain qui assume et assure, et qui fait de son mieux pour concilier entre ses missions en tant que cheffe de foyer et ses engagements professionnels», a-t-elle souligné.

De même bord, Rajaâ Cherkaoui El Moursli, professeur, docteur en physique nucléaire à l’Université Mohammed V de Rabat et membre de l’Académie Hassan II des sciences et techniques, a relevé que les normes de travail sont souvent conçues selon une perspective masculine, laissant les femmes confrontées à des défis supplémentaires. «Dans le milieu professionnel, la façon de travailler est faite par l’homme pour l’homme, rien n’est fait pour la femme. En revanche, il ne faut pas croire que les hommes sont contre nous, c’est à la femme de se battre pour faire sa place. Mais en même temps, les entreprises doivent prendre en considération le fait que la femme a un foyer à gérer et qu’il faut lui créer les conditions nécessaires pour qu’elle puisse jongler efficacement entre ses responsabilités familiales et sa carrière», estime la scientifique.

S’agissant de l’égalité des sexes et du respect de la parité au sein des entreprises, Fatima Ouriaghli a affirmé que cela dépend largement du top management de l’entité, notant que si le comité dirigeant est en faveur de cette vision, celle-ci sera sans nul doute intégrée à tous les niveaux de l’organisation. «L’égalité de genre au sein d’une entreprise est étroitement liée au top management. Ainsi, les responsables des ressources humaines au sein de l'entreprise doivent avoir cette capacité à accorder les mêmes opportunités aux deux sexes, à leur faciliter la mission et à les promouvoir en fonction de leur rendement et de leurs compétences», précise-telle. De son côté, Maria Ait M’hamed, présidente de l’Union des agences conseil en communication (UACC), considère que l’une des barrières importantes à surmonter pour aller vers l’égalité est l’autocensure fréquemment pratiquée par les femmes. Elle a dans ce sens souligné que nombreuses sont celles qui, par manque de confiance en elles, se limitent involontairement et restreignent leur propre potentiel et leurs opportunités.

«Souvent, l’autocensure s’installe naturellement. Il s’agit d’une tendance profondément enracinée dans notre culture sociale et, par conséquent, on n’y peut rien. Des études internationales ont d’ailleurs prouvé que les femmes réclament 30% moins de choses par rapport aux hommes. Contrairement à la gent masculine, les femmes ont fréquemment besoin de prouver plusieurs fois leurs compétences avant d’oser demander une augmentation de salaire ou une promotion», indique-t-elle.

Dans cette même veine, Fatima Ouriaghli a relevé que cette question d’autocensure découle assez souvent des normes et des valeurs inculquées pendant l'éducation. «À la maison ou ailleurs, on inculque aux filles dès leur plus jeune âge des normes différentes par rapport à celles enseignées aux garçons, ce qui fait qu'elles s'autocensurent instinctivement en grandissant. Le rôle de l’éducation est très important, et c’est pour cette raison que les curricula doivent contenir des informations sur le statut de la femme. Il est également impératif que les programmes scolaires intègrent des contenus qui promeuvent une image positive de la femme, plutôt que de perpétuer des stéréotypes préjudiciables», dixit la vice-présidente du CNP.

Concernant la représentativité, encore assez faible des femmes, dans certains secteurs techniques, Maria Ait M’hamed a évoqué la notion de «plafond de verre» qui symbolise les restrictions invisibles qui entravent la progression professionnelle de certaines personnes, en raison notamment de leur sexe. In fine, les différentes intervenantes se sont accordées à souligner la nécessité de prendre en considération les besoins spécifiques des femmes dans le milieu professionnel, en leur accordant notamment plus de flexibilité. Et de noter que la gent féminine dispose d’atouts significatifs pour performer et créer de la richesse.

 

 

 

 

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