MRE: un soutien crucial, mais un potentiel sous-exploité

MRE: un soutien crucial, mais un potentiel sous-exploité

Les transferts des Marocains résidant à l’étranger pourraient atteindre 123 milliards de dirhams d’ici 2025. L’enjeu pour le Royaume est de maximiser l’impact de ces flux financiers.

 

Par Désy M.

Les Marocains résidant à l’étranger (MRE) jouent un rôle vital dans l’économie du Maroc. Leurs transferts de fonds, atteignant 68,13 milliards de dirhams à la fin de juillet, sont essentiels pour l’économie nationale, soutenant le pouvoir d’achat et la consommation. Bank Al-Maghrib prévoit que ces transferts pourraient atteindre 123 milliards de dirhams d’ici 2025. «Au-delà des répercussions immédiates sur l’économie locale de leurs régions d’origine ou de résidence au Maroc, leurs transferts en devises jouent un rôle crucial en agissant comme une soupape de sécurité et un gage de stabilité des réserves de change», affirme Hassan Edman, professeur en économie et gestion à la Faculté des sciences juridiques, économiques et sociales d’Agadir.

Bien qu'ils représentent une manne pour le Maroc, contribuant potentiellement à plus de 10% du PIB, seulement 10% sont réinvestis, principalement dans l'immobilier. À peine 2% vont vers des secteurs productifs comme l’industrie ou les services. Pourtant, plusieurs mécanismes ont été élaborés dans le but d’attirer le maximum de MRE et stimuler leur appétence pour des secteurs productifs. Il s’agit notamment du mécanisme d’appui et de financement MDM Invest, renforcé par MDM Tamwil en 2024, qui propose des conditions de financement avantageuses, avec une priorité sur les projets relevant de secteurs à forte valeur économique. Il y a aussi le lancement par le ministère chargé des Marocains résidant à l’étranger, en partenariat avec la CGEM, d’une initiative permettant de regrouper tous les Marocains entrepreneurs du monde dans une 13ème région économique virtuelle de la CGEM. Cela permettrait aux MRE d’accompagner le développement économique du pays et de disposer d’un espace d’échange, d’information, de soutien et d’orientation en leur faveur.

De plus, la récente Charte d’investissement, adoptée il y a quelques mois, inclut également des mesures incitatives visant à attirer les MRE vers des secteurs autres que l’immobilier. Bien que ces mesures commencent à porter leurs fruits, le chemin est encore long avant de parvenir à libérer le potentiel inexploité des MRE et leur expertise importante dans des investissements porteurs et diversifiés. Sofiane Gadrim, directeur des nouvelles technologies (CTO), co-fondateur d’Atela et ex-MRE, estime qu’il est important de créer une véritable connexion entre les MRE et l’économie marocaine. «Le Maroc a les ressources et les opportunités pour faire de ses MRE de véritables acteurs du développement. Il suffit de comprendre leurs attentes et de leur offrir des solutions sur- mesure, adaptées à leurs parcours uniques. Avec une approche personnalisée et proactive, le pays peut pleinement bénéficier de la richesse de sa diaspora, tout en lui offrant des voies claires et attrayantes pour s’engager dans les secteurs porteurs», affirme Sofiane Gadrim. Et de préciser que «beaucoup de MRE n’ont pas de repères concrets pour juger du potentiel de ces secteurs. C’est ici que le Maroc doit intervenir, avec une stratégie de communication transparente, mettant en avant les réussites qui ont découlé des initiatives marocaines, comme les startups qui ont su percer grâce aux programmes d'accompagnement et aux financements adaptés».

Comme pistes de solutions, le cofondateur d'Atela table sur la technologie comme catalyseur dans cet accompagnement, avec des applications dédiées, où les MRE peuvent simuler leurs investissements, accéder à des études de marché personnalisées, ou même se connecter avec d’autres investisseurs pour partager des expériences. C’est cette dimension communautaire et interactive qui pourrait faire toute la différence, en transformant chaque démarche administrative en une véritable expérience d’accompagnement et de valorisation. Le crowdfunding, comme levier puissant, pourrait permettre aux MRE de s’engager directement dans des projets concrets au Maroc. Qu’il s’agisse de startups technologiques, de projets agricoles innovants ou d’initiatives culturelles, ces plateformes pourraient offrir aux MRE des possibilités d’investissement simples, sécurisées et connectées à des secteurs productifs. C’est une manière de les rendre acteurs du développement, tout en diversifiant les sources de financement pour l’économie marocaine. Enfin, le Maroc se positionne aujourd’hui comme un pays en pleine effervescence, capable d’attirer l’attention mondiale grâce à des événements d’envergure comme le Gitex Africa, la CAN 2025 ou la Coupe du monde 2030. Ces rendez-vous sont des opportunités à des investissements et des collaborations, et c’est dans ce sillage que le Maroc peut capter l’intérêt des MRE et les encourager à participer à cette dynamique, conclut Sofiane Gadrim.

 

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