◆Le Maroc et le Nigéria, deux ténors économiques du continent, posent des actes concrets de nature à raffermir leurs relations commerciales et l’intégration africaine.
◆Le patronat marocain a réitéré l’opportunité de réactiver la commission d’affaires entre les deux pays.
Par : Momar Diao
Le projet de gazoduc qui devrait lier le Maroc au Nigéria, est un exemple patent du dessein des pays partenaires de consolider leur partenariat économique dont le grand potentiel reste à explorer. L’initiative portée au plus haut niveau par les chefs d’Etat des deux pays respectifs profitera non seulement à l’Europe, qui diversifiera ses sources énergétiques, mais aussi à 13 pays africains, soit plus de 300 millions d’habitants.
Les autres vertus prêtées au méga projet énergétique sont entre autres, sa grande propension à générer des postes de travail, l’amélioration de l’accès à l’électricité pour les pays concernés ainsi qu’un impact positif sur la production de l’engrais.
Pour rappel, la tonne de pétrochimie issue du projet est susceptible de générer près de 5 postes de travail. Outre la traduction concrète du partenariat économique entre ces deux ténors du continent, il est utile de préciser que les économies marocaine et nigériane affichent un certain niveau de complémentarité. D’un côté, le Maroc (cinquième économie continentale en 2019) dont le taux de dépendance énergétique est supérieur à 90%, possède une réelle expertise dans plusieurs domaines pour ne citer que l’industrie automobile, la production de phosphates grâce à l’OCP, tout étant disposant d’un grand savoir-faire dans la branche agricole. De l’autre, le Nigeria avec plus de 200 millions d’habitants, de surcroît première puissance économique africaine avec un PIB de plus de 447 Mds de dollars en 2019 selon le FMI, dispose également d’une industrie automobile.
Le poumon économique de l’Afrique de l’Ouest fait partie des 7 pays africains membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP). Un groupement qui pèse plus de 70% des réserves mondiales de pétrole.
Les domaines susceptibles de booster les échanges commerciaux et les investissements entre les deux pays sont le BTP, les services financiers, l’agriculture et l’agro-industrie, l’énergie et les mines. Sachant que la filière automobile se positionne également comme étant une branche privilégiée à même d’approfondir les synergies industrielles.
Dans le même ordre d’idées, la coopération bilatérale devrait être densifiée avec l’existence d’une vingtaine de 20 vols hebdomadaires reliant les deux pays à partir du printemps 2020.
Au regard de ce qui précède, force est de constater que la tenue de la deuxième édition du Forum économique Maroc-Nigéria, organisée récemment à Rabat par l’Ambassade du Nigéria au Maroc, tombe à point nommé. Cet événement qui a enregistré une forte affluence des officiels et des communautés d’affaires de part et d’autre, a mis l’accent sur deux secteurs-phares de la coopération économique des deux partenaires. Il s’agit des domaines des énergies et des mines et celui de l’agriculture et de l’agro-industrie.
Mohammed Sadiki, Secrétaire général du ministère de l'Agriculture, de la Pêche maritime, du Développement rural et des Eaux et Forêts, n’a pas manqué de rappeler le caractère crucial de l’agriculture dans le processus de la dynamisation de la coopération Sud-Sud prônée par le Royaume. «Grâce au Plan Maroc Vert (PMV), levier de croissance des investissements agricoles, le Maroc est parvenu à couvrir 100% de ses besoins en fruits et légumes et entre 60 et 70% de la demande en céréales», précise en substance le professeur agronome qui a donné des chiffres afférents à la hausse substantielle de la production de plusieurs cultures au cours de la dernière décennie grâce au PMV. A titre illustratif, la production des agrumes a progressé de 73%.
La partie nigériane a exprimé le souhait de capitaliser sur l’expérience du Royaume en matière agricole. Depuis juin 2019, le Maroc s’est engagé à former des Nigérians en vertu de la signature de la Convention portant sur la formation professionnelle agricole conclue entre les deux pays.
Par ailleurs, le Forum a donné lieu aux recommandations allant dans le sens de la création d’une usine commune de gingembre au Nigéria, sachant que cette plante dont le Nigéria est un grand producteur, est très utilisée au Maroc en médecine et en cuisine.
«La CGEM peut aider les entreprises de part et d’autre à explorer les opportunités d’affaires au niveau des deux pays», suggère Mohamed Laâziz Kadiri, président de la commission Diplomatie économique, Afrique et Sud-Sud, qui recommande la réactivation de la Commission d’affaires maroco-nigériane. Le Nigéria, première puissance de la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), qui produit plus de 2 millions de barils de pétrole par jour, a fait le pari de diversifier son économie dépendante à hauteur de 90% du secteur des hydrocarbures.
De ce point de vue, le Forum économique était l’occasion pour la délégation nigériane de vendre son pays auprès des investisseurs marocains de plus en plus enclins à investir dans leur continent.
Du reste, malgré les multiples opportunités d’affaires qui existent dans ce pays, classé au 131ème rang du Doing Business 2020 (contre 53ème pour le Maroc), des efforts restent encore à faire pour améliorer le climat des affaires. En définitive, la taille du marché nigérian est une aubaine pour les entreprises marocaines en quête de nouveaux débouchés pour l’export.