◆ La création de la police administrative n’a pas suffisamment dissuadé les contrevenants.
◆Il faut investir de nouvelles pistes de lutte autres que règlementaires.
Par C. Jaidani
En dépit d’un dispositif administratif, règlementaire et juridique mis en place pour lutter contre l’habitat clandestin, le phénomène persiste toujours. Il a même gagné du terrain ces derniers mois, profitant du manque de vigilance des autorités, préoccupées par l’application des restrictions sanitaires lors de la période du confinement.
La création d’une police administrative a eu des effets limités. Les ressources humaines et matérielles dont elle dispose sont insuffisantes pour qu’elle s’acquitte convenablement de sa mission. Que ce soit en milieu urbain ou dans le monde rural, dans les petites ou les grandes villes, les constructions anarchiques poussent comme des champignons, créant de nombreuses problématiques.
«Les habitats clandestins dans les campagnes sont le plus souvent dépourvus des réseaux d’assainissement, de distribution d’eau potable ou d’électricité. Les préposés optent pour une fosse septique et procèdent à des branchements clandestins, entraînant d’importantes perturbations dans le réseau. Dans les villes, les surélévations présentent un risque important en matière de sécurité. Les fondations ne sont pas faites pour résister à ce genre de rajouts de construction. La plupart des effondrements d’immeubles sont dus aux bidonvilles dits aériens», souligne Mohamed Labib, expert en urbanisme.
Les raisons de la percée de l’habitat clandestin s’expliquent par différents facteurs, entre autres, la poussée démographique qui a augmenté la demande en logements au moment où l’offre n’a pas suivi cet essor. Le volume existant sur le marché ne répond pas à tous les besoins.
Malgré les efforts déployés, notamment à travers les logements sociaux, on enregistre un déficit d’environ 500.000 logements concentrés essentiellement dans les grandes villes. L’accès au logement est devenu très difficile pour de nombreux ménages à cause du pouvoir d’achat.
Les logements de type 250.000 DH ou de 140.000 DH ne sont pas à la portée de tous les citoyens. D’autant que ce genre d’habitat est purement urbain et ne convient donc pas pour les personnes opérant dans l’agriculture, le commerce ou l’artisanat, qui doivent résider près de leurs activités. La prolifération des habitats clandestins s’explique aussi par le facteur coût. Ce sont des logements basiques, construits avec des matériaux bas de gamme, sans plan ni équipement.
Les prix démarrent à partir de 50.000 DH et peuvent atteindre les 120.000 DH selon l’emplacement et la superficie. Les lots peuvent être livrés en l’état ou clés en main. Par ailleurs, il faut noter qu’au niveau de la règlementation en vigueur, les textes de loi, notamment les lois 12-90, 25-90 et la Charte communale, sont pour la plupart compliqués et rendent la procédure difficile à suivre. «Les textes sont inspirés du modèle français. Ils ne prennent pas en considération les spécificités marocaines ni leur pouvoir d’achat. Il serait judicieux de les réformer pour les rendre réalistes et réalisables», explique Labib.