Fonds Mohammed VI pour l’investissement: un accélérateur de la structuration des PME marocaines

Fonds Mohammed VI pour l’investissement: un accélérateur de la structuration des PME marocaines

Le Fonds Mohammed VI pour l’investissement remet sous le feu des projeteurs l’enjeu de la structuration des PME.

C’est en cette période de crise où les entreprises se sentiront menacées, qu’elles finiront par lâcher du lest et accepter les conditions imposées, à juste titre, par les pourvoyeurs de fonds.

C’est l’avis de Rachid Seddik Seghir, expert-comptable, patron du cabinet Seddik.

 

Propos recueillis par M. Diao

 

Finances News Hebdo : Les PME marocaines sont très souvent critiquées au niveau de la gouvernance, du manque de transparence et bien d’autres points. Selon vous, existe-t-il suffisamment de PME attractives pour le Fonds Mohammed VI pour l’investissement ?

Rachid Seddik Seghir : Qui dit PME, dit manque de ressources financières et, par conséquent, canalisation du peu de ressources mobilisées vers des domaines prioritaires, tels que la production et le commercial. Les aspects de la gestion financière et administrative sont très souvent relégués au second plan et ne sont considérés que lorsque les entreprises arrivent à dégager les ressources suffisantes pour grandir et se développer. A cela s’ajoutent très souvent la proximité et le frottement des PME avec le secteur informel, qui éloigne celles-ci naturellement des bonnes pratiques de gestion et de transparence.

De même, il est constaté que généralement la structure familiale des PME n’est pas de nature à faciliter l’absorption des bonnes pratiques en l’absence d’accompagnement et d’encadrement des dirigeants, très souvent solitaires, autodidactes ou manquant de relève. Il est de notoriété publique que les PME constituent la voie du salut pour l’économie dans la mesure où cette catégorie d’entreprises a, grâce à sa flexibilité et son agilité, pu sauver l’économie de plusieurs pays tels que l’Allemagne, l’Italie et bien d’autres. Ces Etats ont su miser sur la PME qui représente, par son dynamisme, le principal pourvoyeur d’emplois et de production. Il s’agit donc de structurer cette catégorie d’entreprises en vue de les mettre en avant en tant que véhicule capable de sauver notre économie en cette période de crise.

Le Fonds Mohammed VI pour l’investissement arrive à point nommé du fait que le capital-investissement, qui peinait encore à jouer pleinement son rôle de locomotive pourrait, à travers une nouvelle approche, permettre à nos PME de se structurer et de bénéficier de l’accompagnement nécessaire pour pouvoir bénéficier de ce mode de financement. Et c’est justement en cette période de crise où ces entreprises se sentiront menacées qu’elles finiront par lâcher du lest et accepter les conditions imposées, à juste titre, par les pourvoyeurs de fonds.

 

F.N.H. : Quelle lecture faites-vous sur le fait que le Fonds contribuera aussi directement au capital des grandes entreprises, publiques et privées, actives dans les domaines considérés prioritaires ?

R. S. S. : Le Fonds Mohammed VI pour l’investissement a été mis en place en vue de permettre au pays de faire face à la crise sanitaire, qui a provoqué des dégâts collatéraux imprévisibles dont les effets pèsent lourdement sur l’économie et les finances publiques. Il était prévu de mobilier 45 milliards DH pour permettre la relance de l’investissement et de l’économie, sur lesquels seuls 15 Mds de DH ont été injectés dans le budget. Dans une approche globale et intégrée, assister la grande entreprise publique ou privée contribuera également à soutenir la population de PME dynamiques qui gravitent autour et qui contribuent, à travers la sous-traitance et la co-traitance, à soutenir le développement de l’économie nationale.

 

F.N.H. : Pour la prise de participation dans le capital des grandes entreprises, publiques et privées, actives dans les domaines que le Fonds considère comme prioritaires, des instruments financiers tels les avances, les prêts remboursables ainsi que des fonds semi-autonomes seront mis en place. Quel jugement portez-vous sur ces différents instruments financiers ?

R. S. S. : Paradoxalement, le capital risque n’a pas pu trouver son chemin au niveau du paysage marocain malgré la batterie de mesures adoptées à ce jour et qui sont jugées incomplètes par les professionnels du secteur. Ainsi, au lieu d’assister les entreprises de manière passive, l’idée est de développer l'industrie du capital investissement en vue d’accompagner la relance de l'économie post-covid-19 à travers une injection massive de fonds propres pour rééquilibrer les structures financières des entreprises caractérisées par un surendettement dangereux.

Nos entreprises ont besoin de compétitivité pour se positionner sur les marchés nationaux et internationaux fortement impactés par la crise. Cette démarche est à mon sens salutaire dans la mesure où elle implique, à travers un accompagnement de proximité, des transformations structurelles au niveau de notre économie à travers l’innovation, la transformation numérique et énergétique, le positionnement sur les nouvelles chaînes de valeur et le positionnement sur le marché international. La démarche étant forcément sélective, elle aboutira au ciblage des entreprises éligibles sur la base de critères pertinents axés sur le triplet : projets pertinents, équipe compétente et marchés porteurs.

Au regard des enjeux, l’objectif serait plus aisé à atteindre si des mesures étaient mises rapidement en place afin d’améliorer l’environnement juridique et fiscal du secteur du capital investissement. Et ce, dans l’optique de permettre aux opérateurs de ce secteur de mobiliser davantage de fonds et d’accompagner les entreprises marocaines et, surtout, les PME qui gagneraient à recourir massivement à cet instrument.

 

 

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