Le ministre de la Jeunesse, de la Culture et de la Communication, Mehdi Bensaid, partage avec Finances News Hebdo les grandes lignes de la stratégie culturelle du Maroc, qui ambitionne de faire de la CAN 2025 et du Mondial 2030 des vitrines du patrimoine et de la créativité marocaine.
Finances News Hebdo : Tout d’abord, quels axes de collaboration le ministère de la Culture prévoit-il avec les secteurs du sport et du tourisme pour transformer la CAN 2025 et le Mondial 2030 en vitrines du patrimoine marocain à l’échelle internationale ? Mohammed
Mehdi Bensaid : Il faut avant tout rappeler que notre pays dispose d’une politique culturelle cohérente et intégrée depuis plusieurs années. Dans le sillage des hautes orientations de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu L’assiste, le ministère a déployé des politiques publiques qui visent à mettre la culture au cœur de notre espace public. Des événements de grand prestige comme la CAN ou la Coupe du monde sont des vitrines, effectivement, mais le travail culturel les précède, et continuera après. Nos collaborations avec nos partenaires institutionnels et privés sont denses, et concernent tous les domaines. Nous allons par exemple procéder à la généralisation du pass jeunes, qui permet un accès à différents services intégrés, comme les équipements sportifs, les transports, l’hébergement et les équipements culturels. Cette facilitation des déplacements pour nos jeunes, ainsi que l’accès aux musées et aux sites patrimoniaux sont un instrument stratégique dans notre volonté d’habituer le jeune public à découvrir sa culture et son patrimoine, parallèlement à des activités sportives ou ludiques. Ce type de combinaison entre le sport, la culture et le loisir, pourra ensuite être généralisé aux publics étrangers.
Les jeux vidéo et le eSport en particulier sont de plus en plus présents au sein des infrastructures dédiées aux jeunes, parallèlement à nos programmes visant à créer un écosystème industriel dédié au eSport, à travers des salons, une cité du gaming, etc. La CAN 2025 et le Mondial 2030 seront des opportunités idéales pour montrer l’avancement du Maroc dans ce domaine qui est au croisement du sport, de l’industrie culturelle et créative et du loisir jeunesse. Ce sera également l’occasion d’intéresser les jeunes marocains à ce domaine en pleine expansion mondiale, et où le Maroc a une place à saisir. Par ailleurs, les expositions, festivals et autres rendez-vous culturels qui auront lieu pendant les rencontres sportives pourront être harmonieusement aménagés pour accueillir de nouveaux publics. Enfin, nos programmes concertés avec les opérateurs de la société civile et du privé, comme le programme 150 salles de cinéma, en cours de déploiement, va contribuer à diversifier une offre culturelle de plus en plus mature.
F. N. H. : Dans quelle mesure les festivals, expositions et autres événements culturels serontils intégrés aux rendez-vous sportifs pour offrir aux visiteurs une immersion complète dans la richesse culturelle du Maroc ?
M. M. B. : Notre pays dispose aujourd’hui d’une offre événementielle culturelle très riche, et qui se déploie sur toute l’année, et dans les différentes régions du Royaume. Les rendez-vous sportifs internationaux qu’organise notre pays bénéficient de cette offre, depuis plusieurs années. Et lors des prochains grands rendez-vous comme la CAN 2025 et le Mondial 2030, ces différents festivals seront au rendez-vous, ainsi que d’autres futurs événements qui sont en cours de programmation, soit par les différentes autorités, soit par la société civile elle-même, qui est très active dans ce domaine, à travers les associations, les fondations et les autres types de structures. Au ministère, nos politiques visent à faciliter la diffusion de ces événements, la circulation des différents publics, la mise en relation entre les publics du sport et ceux de la culture, à travers des Pass, des sites dédiés, des offres intégrées qui donnent à voir les villes qui accueillent les matchs dans leur intégralité, avec leur dimension patrimoniale, à côté de leur dimension sportive.
F. N. H. : Le ministère prévoit-il un plan de réhabilitation ou de modernisation des infrastructures culturelles, comme les musées et les sites historiques, pour accompagner l’afflux de touristes attendus lors de ces événements majeurs ?
M. M. B. : Les efforts de réhabilitation et de modernisation des infrastructures culturelles n’ont pas attendu ces événements sportifs. Nous avons engagé des programmes denses et globaux de réhabilitation de notre patrimoine culturel, ainsi que des infrastructures dédiées à la culture et à la jeunesse. Cependant, l’afflux de touristes attendus de ces événements sportifs doit être à la fois une opportunité pour mieux faire connaitre nos sites et nos infrastructures, aussi bien aux touristes étrangers qu’à notre public national, mais également une consécration pour nos sites, qui sont désormais au seuil d’une ère de maturité, où nous devons apprendre à gérer une offre culturelle qui va attirer potentiellement des millions de visiteurs du monde entier, habitués à une offre touristique mondiale très concurrentielle. L’excellence de l’offre culturelle marocaine devra saisir cette occasion de montrer notre capacité à se placer désormais au sommet de l’offre touristique culturelle et artistique.
F. N. H. : Quelle stratégie le ministère déploiera-t-il pour mettre en lumière le patrimoine immatériel marocain – gastronomie, artisanat, traditions – et compléter ainsi la découverte des joyaux architecturaux et historiques du pays ?
M. M. B. : Parmi nos programmes, les événements Nostalgia, qui se déroulent dans différents sites patrimoniaux, visent à sortir de la logique du «patrimoine muet», et à donner à nos sites et nos monuments une parole, un récit vivant qui parle aux différents publics, jeunes et moins jeunes, nationaux et adultes. Dans le même sillage, nous voulons mettre en lumière notre patrimoine vivant et notre patrimoine immatériel, à travers différentes activités, ou en accompagnant ce que la société civile, le secteur privé et les régions font déjà. Avec la même ambition : donner à vivre une «expérience culturelle marocaine». Dans ce sens, le rôle des industries culturelles et créatives et les instruments d’animation du patrimoine auront une place de plus en plus grande.
F. N. H. : Comment les artistes, artisans et acteurs locaux seront-ils impliqués dans la promotion du Maroc pendant la CAN 2025 et le Mondial 2030, afin de garantir une représentation authentique et inclusive de notre culture ?
M. M. B. : Le ministère accorde une grande place à la concertation et le dialogue approfondi et permanent avec les acteurs du secteur culturel. La CAN et le Mondial, comme d’autres événements, seront l’occasion de mobiliser les différentes énergies. Mais je rappelle encore une fois que nous avons déployé cette approche du dialogue bien avant ces rendez-vous sportifs, et nous allons la poursuivre. Nos artistes, artisans et opérateurs culturels, comme nos sportifs, sont acquis à cette ambition culturelle marocaine. Notre rôle est essentiel : l’accompagnement technique et la facilitation.