Epargne: «Il faut sortir de la thésaurisation pour aller vers des placements rentables»

Epargne: «Il faut sortir de la thésaurisation pour aller vers des placements rentables»

L’épargne, qui totalise actuellement plus de 876 milliards de dirhams, constitue un levier important pour la relance économique.

Pour Saïd Amaghdir, président de la Commission financement et investissement des TPE et PME au sein du Club des dirigeants, il faut mettre en place des incitations fiscales permettant de driver cette épargne vers les marchés des capitaux.

 

Propos recueillis par Ibtissam Z.

 

 

 

Finances News Hebdo : Pouvezvous nous dresser brièvement un panorama de l’épargne au Maroc ?

Said Amaghdir : Actuellement, l’épargne totalise pratiquement plus de 876 milliards de dirhams (MMDH), constituée dans sa grande proportion de dépôts bancaires à hauteur de 82,7%, suivis des placements en assurance vie et des actifs sous forme de valeurs mobilières, avec des parts respectives de 10,8% et 6,5%. Faut-il le rappeler, l’année 2020 était une année de crise par excellence. Il faut prendre en considération la multiplication des périodes de confinement et des mesures de restriction qui ont considérablement limité les possibilités de consommer. Au final, les épargnants et les ménages ont accumulé du cash, ce qui explique d’ailleurs le fait que la monnaie fiduciaire a connu un record très important pendant cette période et une baisse de l’indice boursier Masi de -7.7%. Pour l’année 2021, l’épargne se dirige plutôt vers le marché des capitaux et essentiellement vers les OPCVM qui dépassent la barre de 600 MMDH, pratiquement plus que la moitié du PIB national. De ce fait, de belles performances seraient au rendez-vous, puisque les marchés ont fait plus de 17%.

 

F.N.H. : L’économie nationale a besoin d’un vrai accélérateur pour une meilleure relance. L’épargne peut-elle jouer ce rôle et quelles sont, selon vous, les pistes pour en faire un levier de relance ?

S. A. : Effectivement, l’épargne joue un rôle très important. Soutenir l’effort de la relance économique passe impérativement par la mobilisation de l’épargne. Elle est plus que jamais nécessaire, voire essentielle pour financer les différents secteurs de l’économie. Pour ce faire, il faut mettre en place des incitations (carottes) fiscales permettant de driver cette épargne vers les marchés des capitaux et d’activer par la même occasion les projets mortnés, notamment les plans d’épargne en actions, logement et entreprises. D’autres pistes permettraient aussi de capter de l’épargne supplémentaire à travers des contrats en unités de compte. Ces derniers permettent de capter de l’épargne notamment sur le volet retraire, éducation. Ce sont là des moyens d’épargne lancés par les compagnies d’assurances, depuis près de deux ans, sans oublier les dépôts d’investissement et Wakala Bil Istitmar, lancés récemment par les banques participatives. En effet, les ménages souhaitent avoir des supports d’investissement qui leur donnent droit à une exonération à l’entrée, à l’instar de la retraite, et la possibilité de profiter de la performance des marchés financiers.

 

F.N.H. : La mobilisation de l’épargne populaire est particulièrement confrontée à plusieurs difficultés qui ont été accentuées par la crise de la Covid-19. Comment pourrait-on relancer la machine ?

S. A. : Je pars du principe suivant : depuis 2004-2005, le Salon national de l’épargne n'a pas eu lieu. Nous n’avons aucune visibilité concernant les possibilités d’épargne, et là je parle des ménages. A mon humble avis, il faut réactiver le salon national afin de présenter les offres des intervenants sur le marché, à savoir les Sociétés de gestion d’OPCVM, les sociétés de Bourse, les banques conventionnelles, les banques participatives, les compagnies d’assurances conventionnelles et prochainement les compagnies d’assurances Takaful. En réalité, il faut que le ministère de l’Economie et des Finances mette en place quelques incitations fiscales, notamment l’exonération de l’épargne à l’entrée de l’IGR, au moins 50% pour que ça soit plus intéressant dans la mesure où le salarié lambda, qui souhaite cotiser mensuellement dans le cadre d’un plan d’épargne en actions logement ou dans les contrats en unités de compte, puisse gagner un peu d’IGR sur la souscription. Cette exonération de 50% va inciter les particuliers à participer massivement à la mobilisation de l’épargne.

C’est de cette façon que nous allons encourager ce marché et profiter de cette manne populaire pour financer des projets structurants. Il est impératif de sensibiliser davantage à l’importance de l’épargne, mais surtout d’offrir des incitations financières afin d’encourager les ménages à l’épargne, notamment à long terme. Dans ce sens, le développement de l’éducation et de l’inclusion financière demeure fondamental pour stimuler l’épargne nationale. Le but est d’apporter une réflexion profonde et judicieuse afin de pouvoir mobiliser le maximum d’épargne, et de ce fait sortir de l’étape de la thésaurisation pour aller vers celle des placements rentables qui, en matière de fiscalité, sont attrayantes et beaucoup plus intéressantes. Les contrats en unités de compte peuvent permettre aux compagnies d’assurances de collecter de l’épargne à travers même des supports très intelligents, totalement transparents et performants. En plus de ces supports, des plans d’épargne sont à mettre en place. D’ailleurs, ces supports ne peuvent qu’apporter une valeur ajoutée et drainer de l’épargne vers l’investissement.

 

F.N.H. :Plus généralement, quelle est la relation du Marocain avec l’épargne ?

S. A. : La relation du Marocain avec l’épargne est une vraie question. Effectivement, depuis l’avènement de la Covid-19, nous sommes passés par des moments difficiles et délicats. Les personnes qui avaient un peu d’épargne ont pu la mobiliser pour subvenir à leurs besoins au quotidien. L’épargne devient une composante importante; les ménages ont bien intégré dans leur esprit qu’il faut laisser une petite réserve d’argent pour les moments de crise. Et cette manne d’épargne peut effectivement être orientée vers les marchés de capitaux ou les banques participatives. Il y a une panoplie de produits, mais il faut que les carottes fiscales soient avantageuses pour qu’effectivement on puisse mobiliser cette épargne vers les projets bénéfiques pour le Royaume. Nous en avons vraiment besoin durant la période 2021-2025 pour tenter de sortir rapidement de cette crise liée à la pandémie. Mobiliser toute les énergies possibles, l’épargne également pour driver l’économie vers la croissance et la création de l’emploi pour nos jeunes. 

 

 

 

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