L’institution de Bretton Woods table sur la stabilisation de la croissance pour l’année 2019.
Equilibre budgétaire, chômage, privatisation, flexibilité du Dirham, fiscalité, système bancaire, etc. : le FMI livre son appréciation de la situation économique du Royaume.
Par M. Diao
La rencontre avec les services du Fonds monétaire international (FMI) dans le cadre des consultations au titre de l’article IV et à la première revue de l’accord de la ligne de précaution et de liquidité (LPL), constitue bien souvent un événement important pour la presse spécialisée. D’autant plus que celle-ci saisit l’occasion pour aborder avec Nicolas Blancher, chef de la mission des services du FMI pour le Maroc, et ses équipes les sujets macro-économiques, sociaux et financiers qui s’avèrent être cruciaux pour l’émergence du Royaume, astreint à revoir son modèle de développement.
« L’économie marocaine continue de profiter de la poursuite de politiques macro-économiques prudentes et des réformes structurelles. Ces dernières années, l’amélioration de la gestion budgétaire et la diversification de l’économie ont rendu cette dernière plus résiliente.», déclare M Blancher.
Les aspects inhérents à l’efficacité de l’investissement public, le régime et les réserves de change, les risques de l’expansion des banques marocaines en Afrique, la politique fiscale dans le contexte de la tenue des 3ème assises de la fiscalité ainsi que les déficits des transactions extérieures ont été au cœur des échanges à bâtons rompus avec la délégation de l’institution de Bretton Woods.
Principal enseignement : les experts du Fonds saluent la résilience de l’économie marocaine grâce à l’amélioration de la gestion budgétaire et à la diversification des activités économiques, en citant que l’économie du Maroc devrait principalement s’orienter vers « un modèle de croissance plus inclusive ». En revanche, ils pointent du doigt le chômage de masse des jeunes et des femmes. Une situation qui doit pousser l’Exécutif à accélérer la dynamique des réformes économiques structurelles ayant une incidence sur la croissance, le marché du travail et la productivité.
Actualité oblige, Nicolas Blancher a été questionné à maintes reprises sur la cadence de la mise en œuvre de la réforme du régime de change, engagée par le Royaume vers davantage de flexibilité.
«Le Maroc est toujours dans une position de force pour effectuer cette transition, avec un niveau des réserves de change qui tourne autour de 5 mois d’importation. Toutefois, les autorités nationales sont mieux à même d’en déterminer la cadence et le timing», concède-t-il. Sur cette question, le message véhiculé par le FMI est clair : c’est le gouvernement qui est maitre du timing.
Au-delà de ce sujet qui défraye régulièrement la chronique, la mission a livré une série de chiffres ayant trait aux agrégats macro-économiques du Royaume.
Le FMI table sur la stabilisation de la croissance pour l’année en cours, sachant que le taux de croissance de l’année dernière était de 3%. A moyen-terme, ce taux pourrait passer à 4,5%.
L’appréciation de Nicolas Blancher sur la politique budgétaire du Royaume reste plutôt favorable, malgré un déficit du Budget qui a dévié de sa trajectoire baissière en 2018 pour se situer à 3,7% du PIB. A cela s’ajoute l’objectif fixé par les autorités nationales consistant à maintenir le même niveau de déficit budgétaire (hors privatisation) pour 2019.
Le patron de la mission applaudit d’ailleurs l’intention qu’a le gouvernement de relancer le processus de privatisation : «Le FMI souscrit totalement à la politique de privatisation de l’Etat».
En outre, notons que sur la base des discussions avec les responsables du pays, les équipes de l’institution de Bretton Woods sont confiantes et plutôt optimistes sur les contours des réformes fiscales qui seront engagées après la tenue des troisièmes Assises en mai prochain.
«Les réformes doivent aller dans le sens de l’édification d’un système fiscal plus rentable, équitable et bénéfique pour la croissance, tout en permettant d’atteindre l’objectif de ramener le taux de l’endettement public à 60% du PIB», suggère-t-on du côté de la mission, qui a été dithyrambique sur le système financier marocain, tout en émettant quelques réserves.
«Le système bancaire marocain est résilient», affirme Blancher. Cette solidité est à relier au bon niveau de capitalisation des banques et aux risques limités pesant sur la stabilité financière.
En revanche, les points de faiblesse découleraient de la concentration du crédit et de l’importance des créances en souffrance, quand bien même elles seraient en baisse et bien provisionnées par les banques.
L’autre élément de vulnérabilité soulevé par Blancher concerne les risques liés à l’expansion des trois plus grands établissements bancaires en Afrique (AWB, BCP, BMCE BOA).
Toutefois, le FMI estime que ces risques sont bien circonscrits grâce à la bonne politique de supervision bancaire assurée par Bank Al-Maghrib. La mission encourage dans ce sens le renforcement de la collaboration avec les autorités de supervision des pays hôtes. ◆