Développement agricole: pourquoi il faut une stratégie spécifique pour les petits exploitants

Développement agricole: pourquoi il faut une stratégie spécifique pour les petits exploitants

Ils ne profitent pas assez des mesures de soutien de l’Etat. Le CESE préconise de prendre en considération les particularités de chaque région.

 

Par C. Jaidani

L'agriculture constitue toujours un pilier fondamental de la croissance économique du Maroc. Les récentes années de sécheresse, qui ont lourdement pesé sur le secteur, en sont une illustration frappante. Cette situation a d’ailleurs contribué à l’aggravation du chômage dans les zones rurales, renforçant ainsi le constat de la vulnérabilité structurelle de l’activité agricole. Le tissu agricole national est composé à près de 90% de petits et moyens exploitants, dont la majorité possède moins de trois hectares.

Ces exploitations, le plus souvent à caractère familial, continuent pour beaucoup de fonctionner selon des méthodes traditionnelles. Faiblement mécanisées et peu enclines à adopter les innovations technologiques, elles peinent à suivre les nouvelles dynamiques du secteur. Pour impulser une transformation en profondeur, le Maroc a lancé en 2008 le Plan Maroc Vert (PMV), auquel a succédé la stratégie Génération Green. Ces deux plans ont permis des progrès notables, notamment au sein des filières orientées vers l’export. Toutefois, malgré ces avancées, certaines limites persistent dans la mise en œuvre des politiques agricoles, en particulier s’agissant de l’accompagnement des petits fellahs.

En dépit de leur poids numérique, ces derniers demeurent pénalisés par la faiblesse ou l’inefficacité des dispositifs d’appui. Nombre d’entre eux vivent dans une précarité proche du seuil de pauvreté. «Le PMV est une stratégie purement agricole. Toutes les réformes initiées portent sur la chaîne de valeur, à commencer par la production, la commercialisation, la transformation et l’export. Mais le secteur doit impliquer également de nombreux départements et intervenants. Pour séduire les investisseurs, il faut des infrastructures de base de qualité.

Outre les barrages et les canaux d’irrigation, l’activité a besoin d’un bon réseau routier, de stations d’entreposage et de conditionnement. Un programme de développement intégré est nécessaire pour faire converger toutes les orientations qui ont trait au secteur. Également, il faut un effort sur le plan législatif et réglementaire pour concevoir des lois adaptées. Pour la plupart, les petites exploitations travaillent dans un cadre informel et une bonne part des fellahs n’a pas accès au financement et ne bénéficie pas des mesures d’accompagnement, comme l’encadrement technique», souligne Abdelmoumen Guennouni, ingénieur agronome.

Dans son dernier avis, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a préconisé le lancement d’un plan d’action spécifique pour les petits et moyens exploitants et de prendre aussi en considération les particularités de chaque région. L’idée est de promouvoir des cultures résilientes assurant une forte valeur ajoutée et créant de l’emploi. A cet égard, il a recommandé la protection des petites et moyennes exploitations contre le morcellement des terres.

«Le morcellement est la principale contrainte d’investissement dans l’agriculture. Plusieurs personnes n’arrivent pas à lancer leur projet car ils sont propriétaires dans l’indivision. Pour obtenir un crédit et avoir une autorisation, ils ont besoin de l’aval des autres propriétaires», explique Guennouni. Le CESE a insisté sur le regroupement des petits et moyens exploitants dans des associations ou coopératives. Une telle initiative permettra de mieux utiliser la mécanisation, les intrants les plus adaptés ainsi que l’accompagnement au niveau technique. En matière de production, il est utile de promouvoir des variétés résilientes et rentables.

Au niveau de l’élevage, le CESE suggère le développement de races locales qui résistent mieux à la sécheresse et ont un coût d’entretien moindre, contrairement aux races importées qui sont plus exigeantes en matière d’alimentation. Par ailleurs, force est de constater que de nombreux petits agriculteurs sont alphabètes. Ils trouvent donc des difficultés à accéder aux outils modernes de communication. Sur le plan administratif, il faut leur faciliter la procédure pour qu’ils puissent bénéficier des différentes mesures de soutien fixées par le gouvernement. 

 

 

 

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