La croissance économique devrait baisser à 3,2% (contre une prévision initiale de 3,4%), selon les économistes de Fitch Solutions.
Face aux tensions inflationnistes et à la vitesse de propagation du variant Omicron, la politique de soutien budgétaire n'aura qu'un effet limité sur la consommation.
Par Y. Seddik
Bien que le Maroc soit toujours sous cloche, Omicron se répand comme une traînée de poudre, avec une croissance exponentielle des contaminations. Le dernier variant en date de la Covid-19 pourrait bien avoir raison de la croissance de l’économie marocaine.
C'est d’ailleurs la conclusion d’une note publiée par Fitch Solutions. «Nous avons désormais une vision légèrement plus baissière de la croissance économique du Maroc en 2022. Nous prévoyons que le PIB réel atteindra 3,2%, contre une prévision initiale de 3,4%», indique Fitch. En effet, l’agence s'attend à un ralentissement de la croissance économique cette année en raison de l'impact de la propagation du variant Omicron au niveau national et à l'étranger, ce qui a incité les autorités marocaines à prendre une série de mesures restrictives jusqu'au 31 janvier courant.
«Les mesures préventives du Maroc sont parmi les plus strictes de la région MENA et ont permis de contenir la vague actuelle», note sur ce point le bureau de recherche. Pour l'agence, ces restrictions nuiront d’un côté la confiance des consommateurs déjà morose, avec des conséquences négatives sur les dépenses, et de l’autre, la reprise de l'industrie touristique, qui représente environ 15% du PIB du Maroc. Fitch pense même qu’une fois que le Maroc aura levé les restrictions, il faudra un certain temps pour que l'activité économique du pays, y compris son industrie touristique, se normalise.
Une politique budgétaire à effet limité
La politique budgétaire de soutien du gouvernement stimulera la consommation intérieure qui, bien qu'en baisse, restera le principal moteur de la croissance en 2022. Le 12 janvier courant, le gouvernement a lancé le programme d’emploi Awrach doté d’une enveloppe de 2,25 milliards de DH, pour réduire le taux de chômage qui s’est établi à 11,8%, selon les dernières statistiques du HCP. En parallèle, la Loi de Finances 2022 consacre également 1,25 milliard de DH au soutien des PME à travers le programme Foursa, et un montant non divulgué pour soutenir le secteur agricole, qui emploie environ la moitié de la main-d'œuvre marocaine.
«Nous prévoyons que ces initiatives entraîneront une hausse soutenue des emplois, avec des effets d'entraînement positifs sur les dépenses des ménages. Aussi, le budget 2022 comprend plusieurs mesures qui permettront à la fois d'augmenter les revenus des ménages, comme l'augmentation de la masse salariale du secteur public à un niveau record de 14,5% du PIB, et la réduction de la pression sur les dépenses des ménages, comme l'augmentation des subventions aux produits de base». Cela dit, explique Fitch, la hausse de l'inflation, la disparition des effets de base et la variante Omicron tempéreront légèrement une partie de l'impact de la politique budgétaire sur la consommation.
Dans l'ensemble, après avoir contribué à hauteur de 2,3 points à la croissance globale en 2021, la consommation intérieure n’ajoutera que 1,8 point au PIB en 2022. Enfin, «bien que notre point de vue fondamental implique que le gouvernement commencera à lever les restrictions sanitaires en février, la durée plus longue que prévu de la vague Omicron pourrait inciter le gouvernement à prolonger ces mesures. Un tel scénario pénaliserait à la fois la consommation intérieure et l'industrie du tourisme. Dans ce cas, la croissance du PIB réel marocain passera sous la norme historique de 3%», concluent les économistes.
Les perspectives du premier trimestre
Selon les dernières données du hautcommissariat au Plan (HCP), l'activité économique nationale devrait enregistrer une croissance de 2,8% au premier trimestre 2022. «Compte tenu d'un accroissement de 3,4% de la valeur ajoutée hors agriculture, l'activité économique nationale enregistrerait une hausse de 2,8% au T1-2022, en variation annuelle, au lieu de +1% au même trimestre de 2021», a écrit le HCP dans son point de conjoncture du T4-2021 et perspectives pour le T1-2022. Plus en détail, la valeur ajoutée hors agriculture devrait augmenter, en glissement annuel, de 3,4% au T1-2022. Le secteur tertiaire contribuerait pour 1,6 point à l'évolution du PIB, alors que dans le secteur secondaire, les activités industrielles et de construction poursuivraient leur amélioration amorcée depuis le T2-2021, précise le HCP. Les activités agricoles, elles, afficheraient une inflexion à la baisse au T1-2022, après avoir été particulièrement dynamiques en 2021.