CNSS : Tour de vis contre la fraude sociale

CNSS : Tour de vis contre la fraude sociale

Entretien avec Abdellatif Mortaki, DG par intérim de la CNSS


 

La réforme des textes de loi de la sécurité sociale vise à les rendre plus dissuasifs.

Le partenariat avec la DGI permet de détecter plus facilement les entreprises fraudeuses.

Les liens avec le ministère public seront renforcés.

 

Propos recueillis par C.J

 

Finances News Hebdo : Les textes de loi relatifs à la sécurité sociale assurent-ils assez de protection aux salariés ? N’est-il pas opportun de les réformer ?

Abdellatif Mortaki : Nous avons déjà préparé un texte de loi sur le sujet, il est déposé au niveau du ministère de l’Emploi. Nous allons tout faire pour le faire passer le plus tôt possible.

Plusieurs aspects sont visés : le plus important est qu’ils soient plus dissuasifs, à l’image de ce que font plusieurs pays de la région.  Il ne s’agit pas d’emprisonner les employeurs mais de préserver le droit des salariés qui en ont le plus besoin, surtout ceux qui sont en dehors de la couverture sociale et qui sont le plus souvent des «smigards». Leurs cotisations ne couvrent pas ce que la CNSS leur offre comme prestations. Pour que la couverture sociale joue pleinement son rôle, elle doit être généralisée.

La réforme du texte relatif à l’inspection et au contrôle vise également l’accès facile à l’information. Ce projet de loi pose d’une façon claire les devoirs et les droits de tout un chacun. C’est-à-dire ceux de la CNSS pour qu’ils ne soient pas abusifs par rapport aux employeurs et aussi préserver ceux qui ne disposent pas de sécurité sociale.

 

F.N.H. : Au-delà de l’aspect dissuasif, qu’en est-il de la sensibilisation des employeurs pour s’acquitter volontairement de leur engagement ?

A. M. : Effectivement, tout un travail de sensibilisation a été fait. Il faut rappeler qu’en 2005, nous étions à 45% seulement de taux de couverture, actuellement nous sommes à 85%. Ce bilan très encourageant a été réalisé grâce aux différentes mesures lancées, notamment la qualité de service et aussi des prestations qui ont rendu la sécurité sociale plus attractive. Il faut souligner que l’entrée en vigueur de l’AMO a incité les gens à adhérer massivement à la CNSS.

Auparavant, il n’y avait que les allocations familiales et les pensions. Les salariés qui n’avaient pas d’enfants, ne voyaient pas l’utilité d’adhérer, alors que l’intérêt existe dans la pension de long terme qui n’est pas visible. L’arrivée des prestations à court terme a donc poussé les assurés à s’intéresser beaucoup plus à la protection sociale.

Il faut noter aussi les actions que nous organisons auprès de la presse, les rencontres régionales avec les employeurs et les salariés. Nous allons renforcer notre effort de sensibilisation afin de généraliser progressivement la couverture sociale.

 

F.N.H. : L’application des lois concernant la couverture sociale ne concerne pas uniquement la CNSS, mais aussi d’autres organismes. Comment se présentent les liaisons avec vos partenaires ?

A. M. : Parmi les points que nous avons travaillés ces dernières années, figure celui d’établir des relations étroites avec toutes les administrations ou les partenaires concernés. C’est une action qui nous permet de lutter contre l’évasion sociale et surtout à ne plus déranger les entreprises citoyennes respectant leurs engagements.

A titre d’exemple, les échanges avec la Direction générale des impôts (DGI) nous permettent de détecter les sociétés qui ne déclarent pas suffisamment. Cela permet aussi de lutter contre la concurrence déloyale. Une entreprise qui paye ses charges, est plus compétitive qu’une autre qui ne le fait pas. Elle peut proposer au marché des prix plus faibles et, de ce fait, vendre facilement et plus.

Nous avons tissé des relations étroites avec d’autres ministères comme ceux de l’Equipement et de l’Enseignement. Nous allons également renforcer nos liens avec le ministère public qui a un rôle à jouer en matière de lutte contre la fraude sociale et aussi celle liée aux prestations.

Certaines personnes peuvent accéder à des prestations auxquelles elles n’ont pas droit. Vu que la couverture sociale n’est pas universelle au Maroc, une pression sur l’AMO s’est manifestée. Tous ceux qui n’ont pas de couverture, parce que la loi ne leur permet pas, utilisent des méthodes frauduleuses pour bénéficier de ces prestations. Cela est menaçant pour la pérennité du régime de la sécurité sociale. Nous sommes obligés de nous prémunir contre ces agissements par des outils juridiques impliquant la collaboration du parquet.

La politique publique veut étendre la couverture sociale mais elle veut aussi assurer l’équilibre financier du régime. ◆

 

 

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