Budget: explosion des dépenses de compensation en décembre

Budget: explosion des dépenses de compensation en décembre

Elles ont atteint 45,2 milliards de DH à fin décembre 2022 contre 13,4 milliards une année auparavant, soit une hausse de 237%.

 

A. Diouf

L’ année 2022 est à retenir en matière de compensation. En effet, la tendance haussière des dépenses de compensation annoncée dès janvier s’est poursuivie jusqu’à fin décembre avec quatre pics enregistrés au cours de l’année. Après une stagnation à 5,4 milliards de DH lors des deux premiers mois de l’année, représentant d’emblée 31% du budget prévu par la Loi de Finances 2022, le premier pic de ces dépenses a été enregistré en mars. C’est-à-dire, un mois après le déclenchement de la guerre russo-ukrainienne qui allait installer une crise sans précédent dans le secteur des matières premières. Les dépenses de compensation sont ainsi passées de 5,4 à 10 Mds de DH entre février et mars. Ensuite, un second pic a été enregistré entre avril et mai, où ces dépenses sont passées de 10 à 15,7 Mds de DH. Puis, entre juillet et août, elles ont basculé de 16,7 à 22,240 Mds de DH. Enfin, entre novembre et décembre, les charges de compensation sont montées en flèche  : de 30,7 Mds de DH, elles ont grimpé à 45,2 Mds de DH, soit 14,5 Mds de DH en plus, représentant le plus important pic enregistré durant toute l’année 2022 entre deux mois successifs.

Comparées à décembre 2021, ces émissions au titre des dépenses de la compensation ont bondi de 237% ou +31,8 Mds de DH. Qu’est-ce qui a entrainé cette surchauffe  ? «Il faut voir du côté des matières premières, notamment des produits énergétiques et alimentaires où le Maroc dépend de l’étranger», renseigne l’économiste Ahmed Azirar. En effet, les prix des matières premières ont enregistré une forte hausse en 2022 par rapport à 2021, aggravée par la crise entre la Russie et l’Ukraine. Les cours du Brent à 81 dollars en moyenne en décembre ont été bien accueillis Dans un contexte marqué par des craintes sur l’approvisionnement, notamment en raison des sanctions occidentales contre la Russie, les prix du pétrole ont ainsi marqué une forte remontée en 2022 par rapport à 2021. De son côté, la demande mondiale de pétrole a continué à se redresser en 2022, en ligne avec l’amélioration de la situation sanitaire et la réouverture des économies.

Elle a été notamment soutenue par le passage du gaz naturel au pétrole dans la production d’électricité et dans l’industrie. En 2022, les cours du Brent se sont situés à 100 dollars en moyenne, en hausse de 42% en glissement annuel, après un rebond de 67% en 2021. Ils ont atteint 81 dollars en moyenne en décembre, en baisse de 11% sur un mois et de 33% depuis leur pic de juin. Idem pour les produits alimentaires et le gaz butane. Après avoir connu respectivement des pics, leurs prix ont également baissé en décembre. Concernant les produits alimentaires, leurs cours se sont envolés sur les premiers mois de 2022, exacerbés par la crise entre la Russie et l’Ukraine, deux grands exportateurs decéréales, avant de s’inscrire dans une correction baissière, suite à une atténuation des contraintes sur l’offre. Ainsi, l’Indice de la FAO des prix des produits alimentaires, qui intègre les produits laitiers, les céréales et les huiles végétales, a atteint un record de 159,7 en mars, en hausse de 19% depuis début 2022 et de 34% depuis un an, avant de reculer de 17% pour se situer à 132,4 en décembre, son plus bas niveau depuis septembre 2021. Sur le marché des céréales, les cours du blé tendre (SRW) se sont établis à 361 dollars la tonne en moyenne en 2022, en hausse de 28% en glissement annuel. Les craintes sur les disponibilités exportables mondiales ont été exacerbées par la crise ukrainienne.

En outre, l’Inde a annoncé l’interdiction des exportations de blé, invoquant la sécurité alimentaire et la flambé des prix intérieurs, après une canicule sévère qui a affecté les récoltes. Après une flambée de 35% sur le premier trimestre 2022, les cours du blé ont chuté de 30% entre leur pic de mars (443 $/t) et leur creux de juillet (311 $/t), suite à une hausse des disponibilités saisonnières et à la reprise des exportations ukrainiennes après l’ouverture de corridors sûrs en mer Noire. En décembre, les cours du blé tendre se sont établis à 315 dollars la tonne en moyenne, en baisse de 6% sur un mois et de 29% depuis leur sommet de mars, portant leurs pertes à 4% en glissement annuel.

Ce repli s’explique notamment par la reconduction pour quatre mois de l’Initiative céréalière de la mer Noire. Les cours du butane toujours élevés en décembre S’agissant du gaz butane, les cours ont enregistré 785 dollars la tonne en moyenne en 2022, en hausse de 23% en glissement annuel. Les prix du butane ont connu de fortes fluctuations en 2022. Ils ont flambé en début d’année pour franchir la barre de 1.000 dollars la tonne en mars, suite à des perturbations d’approvisionnement aggravées par le conflit entre la Russie et l’Ukraine, avant de s’inscrire en forte correction baissière pour atteindre un creux de 550 dollars la tonne en août. Les cours du butane se sont établis à 629 dollars en moyenne en décembre, en baisse de 11% sur un mois et de 19% en glissement annuel.

«Malheureusement, cette baisse s’est située loin des attentes du gouvernement qui continue à subventionner cette matière première indispensable pour la grande majorité des ménages. C’est donc sans doute ce qui explique la surchauffe enregistrée au niveau des charges de compensation durant le dernier mois de l’année écoulée», explique Azirar. A signaler toutefois que le gouvernement a été prévenant sur ce coup. En effet, malgré la hausse de la subvention de la bonbonne de gaz butane de 12 kg à près de 99 dirhams au titre de la période janvier-août 2022, ce qui a représenté un effort supplémentaire de 80% par rapport à la même période de l'année précédente, il s’en tire bien. A fin décembre, les dépenses globales de compensation sont restées en deçà du montant prévu dans la Loi de Finances 2022.

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