Il en est une à laquelle les mystiques du pinceau ne ménagent - presque - ni leur déférence ni leur gratitude : Yacout Kabbaj.
Cette artiste plasticienne est tombée dans la marmite de la peinture dès son jeune âge. On est à même de dire qu’elle y est née (en 1983). Elle a été nourrie au lait de l’art. Son père, architecte et peintre, lauréat des Beaux-Arts de Paris, passionné d’impressionnisme, joua un rôle majeur dans l’affirmation de la vocation de sa fille et participa à la prise de conscience de son talent.
Douée d’une soif inextinguible du savoir, Yacout se mit à en arpenter, sans se fixer dans aucun, les territoires. Elle avait beau s’y abîmer, elle ne parvenait pas à imposer silence à son insondable angoisse existentielle. C’est dans la peinture qu’elle trouvera son statut.
Yacout entra dans la peinture comme on entre en religion. Certes, elle ne fut pas satisfaite de - malgré qu’elle ait été une réussite - sa toute première exposition qui eut lieu en 1999 à la galerie Bassamat devenue l’espace Cervantes.
Au sortir, elle remit sur le métier son œuvre. A telle enseigne que, choisissant l’habit des renonçants, elle sacrifia sa carrière - graphiste pour TBWA - pour s’adonner pleinement à son art qu’elle ne cessait de peaufiner et d’affiner.
Perfectionniste à l’excès, elle conserva son œuvre sous le boisseau jusqu’à ce qu’elle soit digne d’être révélée. Ce jour advint : elle participe, en 2008, à l’exposition «De la géographie urbaine aux lieux du silence» avec une œuvre monumentale de 9x3 mètres. Un triomphe.
Des mois plus tard, elle intègre la Cité des Arts à Paris où elle y côtoie des artistes internationaux, quelques-uns de haut vol. Dès lors, elle commença à participer à des expositions collectives. Chemin faisant, elle accrochera à la Biennale des Jeunes Créateurs des Pays d’Europe ainsi que de la Méditerranée à Skopje en Macédoine.
Le nu la tenta un fugitif moment. Elle s’en déprit très vite, car l’orge dévorait tout, à commencer par Rothko et Peter Zimmermann, qui la précipiteront dans une approche très maîtrisée de l’espace et des compositions moyennant transparence et expression très organique.
Pour Stendhal : «un grand artiste se compose de deux choses :une âme exigeante, tendre, passionnée, dédaigneuse et un talent qui s’efforce de plaire à cette âme, et de lui donner des jouissances en créant des beautés nouvelles».
De ce fait, la peintre poussa plus en avant ses recherches, lesquelles débouchèrent sur une prédilection pour «figer l’instant esthétique de ce début du siècle» dans des toiles sur lesquelles se contractent ressources plastiques et chromatiques, créant une atmosphère d’intensité hallucinogène.
De là, elle avait acquis un savoir-faire en la matière qui la rendait à même d’innover. D’où ces mélanges de différentes peintures disparates où l’on trouve une explosion, une réelle jubilation et ivresse de la couleur pure.
Elle déploie des œuvres saisissantes parcourues d’éclairs, hantées d’éclats et distillant une réelle mystique. Des œuvres destinées à mettre à nu nos fantasmes et nos obsessions. Des gouttes de lumière à siroter délicatement.
Par R.K.H