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Un jour, une œuvre : L’Art au pied de la lettre

Un jour, une œuvre : L’Art au pied de la lettre

L’écrivain tchèque Kundera confiait à Daniel Rondeau (auteur de «les tambours du monde», que la critique en tant que méditation n’existe plus. La vraie critique n’est pas là pour donner des mots. C’est une réflexion. A défaut, la littérature part dans le vide. Mais pas seulement…

Publié en 1990 dans la Collection Zellije des éditions Al Kalam dirigées par Jawad Bounouar, le livre rassemblait un choix de textes écrits entre 1967 et 1989. Deux décennies plus tard, il fut question de reprendre le projet pour le rééditer, aux éditions Le Fennec, avec en annexe, quelques textes plus récents.

En outre, l’introduction, écrite en 1989, où Toni Maraini tentait une analyse sur des questions que, bien sûr, tout le monde se pose tellement elles semblent importantes (qui sommes Nous et qui est l’Autre ? que faut-il entendre par «art marocain» ?...) laisse place à une nouvelle entrée.

D’aucuns assurent connaître les réponses, et se disent même capable de donner (un peu comme les pronostiqueurs qui dévoilent les numéros des chevaux gagnants mais ne semblent pas être si richissimes pour les avoir joués eux-mêmes) d’inratables réflexions. D’autres les cherchent, péniblement. Ou les trouvent soudainement -par une rencontre, avec quelqu’un(e) le plus souvent, avec quelque chose, parfois un livre, une pensée, une foi, une cause, une activité, un art. C’est arrivé à Toni Maraini, qui a donc trouvé le secret grâce aux vertus dont elle peut s’enorgueillir en tant que critique : le talent, le flair et l’indépendance. L’important «pour moi était de fournir des éléments pouvant contribuer à recomposer les pièces d’une mosaïque», souligne-t-elle dans son essai. Pari gagné.

Si la réédition de «écrits sur l’Art» reste très bienveillante à l’égard des «questions importantes», elle ne manque pas de rigueur, en effet, et publie en annexes divers autres textes directement ou indirectement liés au Maroc, qui abordent en partie une question trop grande et qui relève, inévitablement, d’une réflexion sur la situation actuelle des arts : le futur tel que nous le vivions aujourd’hui est-il celui dont on avait autrefois nostalgie ?

«Qui a peur de l’art ?» «quand artistes et poètes créaient leurs moyens de communication», qui parurent respectivement en 1996 et 2011 dans Horizons Maghrébins ; «enjeux du présent et problèmes de l’art» publié en 2009 dans le Journal d’activités de la galerie Nadar de Casablanca ; «l’art et l’aventure de la matière» reprenant les notes d’un exposé pour la rencontre organisée par Bank Al Maghrib à Rabat en 2013, ou encore l’entretien réalisé par Ghita Triki pour le Monitor en 2010 : Toni Maraini n’a inclus ces textes que pour mieux comprendre le présent et, sans «nostalgie» du passé, réfléchir sur la nécessité actuelle d’une autonomie de la pensée sur l’art et de l’art.

Un focus sur l’Histoire, un texte ouvert sur la peinture marocaine, sa situation, un aperçu historique à travers 19 peintres du Maroc, l’apport de l’esthétique et de l’art islamique, une analyse rigoureuse de l’œuvre de Cherkaoui, Melehi, Belkahia ou encore Yacoubi… Tout y est dans «écrits sur l’Art». Et il y en a pour 286 pages.

Ce livre est un recueil de textes critiques et de brefs essais sur l'art et sur quelques artistes du Maroc. Témoin d'exception d'une époque charnière, Toni Maraini y relate et y analyse des aspects de l'histoire de l'art du Maroc et du Maghreb qui nous aident à mieux comprendre la genèse de leur itinéraire contemporain.

Ce «rappel à l'ordre de la mémoire» (Pierre Restany), dont certains textes des années 1960-1980, relèvent d'un travail pionnier de recherche et de documentation historique, est enrichi, dans cette nouvelle édition, d'écrits plus récents et inédits.

(Ecrits sur l'art, essai, de Toni Maraini. Editions Le Fennec, 2014, 286 pages)

 

Par R.K.H

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