La tutelle a dressé la liste des dysfonctionnements qui perturbent la réalisation du programme VSB.
Les professionnels de l’habitat prônent l’utilisation du foncier public et la verticalité pour faire face à la demande.
Lancé en grande pompe en 2004 sous le gouvernement Jettou, le programme Villes sans bidonvilles (VSB) devait initialement être bouclé en 2012, avant d’être prolongé jusqu’en 2016. Aujourd’hui encore, il reste en deçà des objectifs fixés. Le nombre de villes assainies se chiffre à 58 sur un total de 85. L’état d’avancement dans les villes les plus touchées atteint à peine les 50%.
Le programme a réussi principalement dans les cités dont la population ne dépasse pas 200.000 habitants. Concernant les grandes métropoles, VSB rencontre de nombreuses difficultés, dont certaines sont liées aux défaillances de la stratégie elle-même. Bref, tout laisse présager que le programme VSB n’est pas prêt d’aboutir, nécessitant davantage de moyens, d’efforts et surtout d’innovation.
Lors d’une récente présentation du nouveau plan de relance du secteur de l’habitat, Abdelahad Fassi Fihri, ministre de l’Aménagement du territoire, de l’Urbanisme, de l’Habitat et de la Politique de la ville, n’a pu que constater l’échec du programme VSB, insistant sur la nécessité de réviser de fond en comble le système. Le dernier rapport de la Cour des comptes est, lui, sans équivoque sur le sujet. Il estime que les programmes de 140.000 DH et celui de 250.000 DH n’ont contribué que faiblement dans la réalisation de VSB, avec des parts de seulement 30% pour le premier et 1,47% pour le second.
Au ministère de l’Habitat, on précise qu’«il y a un volet psychologique qu’il faut travailler chez les bidonvillois pour qu’ils acceptent de résider dans des appartements. Ils préfèrent se loger dans des maisons de type marocain pour pouvoir exploiter ou vendre les locaux de commerce du rez-de-chaussée».
Outre ce travail à faire sur les mentalités, le ministère espère fédérer davantage les autres intervenants du programme, afin de donner une nouvelle impulsion à VSB.
Le «programme nécessite un engagement encore plus fort des autres acteurs concernés, notamment les autorités locales, les départements de l’Intérieur et des Finances, afin d’atteindre les objectifs», nous dit-on.
Au niveau des professionnels du secteur, on évoque également des dysfonctionnements. «Le programme VSB est alimenté par le Fonds de solidarité habitat et intégration urbaine (FSHIU), qui est lui aussi approvisionné par les taxes sur les matériaux de construction. La gestion de ce fonds et la mobilisation des ressources doivent être revues de fond en comble pour répondre aux besoins actuels du secteur», explique Driss Effina, expert en immobilier.
Et d’ajouter que «le Groupe Al Omrane reste le principal bénéficiaire des ressources allouées à ce fonds. Pour être plus efficaces et avoir un champ d’action plus large, il faudrait que les projets soient accessibles à d’autres promoteurs».
Ce que proposent les promoteurs
A la Fédération nationale des promoteurs immobiliers (FNPI), on estime que les difficultés que rencontre VSB, ne peuvent être traitées séparément de celles du secteur de l’habitat en général. Plusieurs solutions sont avancées pour accélérer VSB. Ces pistes innovantes sont en grande partie d’ordre technique, ayant trait particulièrement à une utilisation optimum de l’occupation du sol.
«Plus le recasement des bidonvillois prend du temps, plus la population à reloger augmente sous l’effet démographique, l’exode rural ou à cause de l’absence de contrôle des autorités. Il est donc essentiel que la mobilisation du foncier se fasse rapidement et les marchés attribués et exécutés à temps. L’Etat dispose de plusieurs terrains qui peuvent servir de projets pour VSB, surtout dans les villes où la pression se fait sentir», souligne-t-on auprès de la FNPI.
La fédération prône également de recourir à la verticalité et de densifier les projets pour résoudre cette problématique. «L’environnement socioéconomique marocain a beaucoup changé. Il ne faut pas camper sur des orientations ou des choix qui ont prouvé par le passé leurs limites. Plusieurs pays ont pu réduire le déficit en logement en optant pour la construction en hauteur. Pourquoi pas nous ? Il faut des ajustements pour s’adapter à la réalité du pays et aux besoins du marché», précise-t-on chez la FNPI. ■