Tests antigéniques : Une bouée de sauvetage pour les compagnies aériennes

Tests antigéniques : Une bouée de sauvetage pour les compagnies aériennes

Les tests antigéniques de la Covid-19 permettent de donner un résultat en l’espace de 10 mn en moyenne.

En les proposant directement à l'aéroport juste avant l'embarquement, l’on peut savoir si 100% des passagers sont sains.

Interview avec Xavier Tytelma, président de AviationNXT.

 

Propos recueillis par Badr Chaou

 

Finances News Hebdo : Les tests antigéniques, c'est quoi ?

Xavier Tytelma : Les tests antigéniques permettent de dépister le coronavirus, tout comme les tests PCR jusqu'ici en vigueur. La méthode de prélèvement reste la même, puisqu'il s'agit de récupérer un échantillon dans le nez du patient avec une sorte de long coton-tige. Son gros avantage est de pouvoir fournir un résultat en seulement 10 à 30 minutes, puisque l'on ne recherche pas la même preuve de présence de la COVID : l'ARN cachée au sein même du virus dans le cas du test PCR, les protéines qui se trouvent à sa surface pour le test antigénique. Il a fallu plusieurs mois pour développer cette technique et en valider la fiabilité, mais c'est désormais chose faite : on se trouve à 93% du niveau d'efficacité des tests PCR, ce qui est très bon en un temps si réduit.

 

F.N.H. : On parle aujourd'hui du déploiement de ces tests au sein des aéroports afin de relancer l'activité des compagnies aériennes. Est-ce chose faisable ?

X. T. : De nombreux pays ont posé des barrières sanitaires à l'entrée sur leur territoire, avec notamment l'obligation de présenter un test PCR réalisé dans les 72 heures avant le décollage... Le problème de ce test est l'incertitude sur le délai : le voyageur ne sait pas s'il recevra son résultat dans les temps à cause de la saturation des laboratoires médicaux. J'ai personnellement dû annuler un voyage faute de résultat obtenu dans les temps. Il y a ensuite ces trois jours d'attente : on pourrait très bien contracter le virus après avoir fait le test et avant d'embarquer, et être malade malgré un test négatif.

En proposant le test antigénique directement à l'aéroport juste avant l'embarquement, on sait que 100% des passagers sont sains et il n'y a plus de crainte à avoir, ni à bord de l'avion ni pour les pays de destination. Cela permettrait d'éviter les difficultés des tests-PCR (production de faux documents, limite des 72 heures...) et de lever toutes les restrictions, dont les fermetures de frontières ou quarantaines.

 

F.N.H. : Qui supporterait les frais de ces tests là ? Serait-ce les compagnies, les aéroports ou les voyageurs ?

X. T. : La situation n'est pas la même dans tous les pays et c'est déjà le cas pour les tests PCR : en France, le test est gratuit pour tous, le remboursement n'est que partiel en Allemagne, les coûts reposent uniquement sur le voyageur en Grande-Bretagne... Ce sera probablement exactement la même chose pour le test antigénique. Et, à ma connaissance, les voyageurs ne sont directement mis à contribution dans aucun pays. Le coût revient donc parfois aux aéroports, parfois aux compagnies, et souvent à l'Etat. L'avantage est que les tests antigéniques coûteraient 5 à 10 fois moins que les PCR.

 

F.N.H. : Comment peut-on imaginer la réalisation de ces tests tout en fluidifiant le passage des voyageurs au sein des aéroports pour éviter tout encombrement ?

X. T. : Il s'agit d'un vrai challenge logistique, car il faut à la fois disposer du personnel qualifié et d'espaces suffisants et intimes... Les passagers devront arriver plus tôt à l'aéroport, ce qui nécessite de devoir mettre en place un troisième comptoir d'attente après la sécurité et les douanes... Mais cela ne pose pas réellement de problème en cette période où le nombre de voyageurs est très faible. Il serait par contre difficile d'imaginer la généralisation de ces tests si l'on avait de nouveau plusieurs milliards de voyageurs aériens par an.

 

F.N.H. : Que pensent aujourd'hui les différents opérateurs du secteur aérien de cette solution ?

X. T. : Les tests antigéniques sont réclamés par tous les acteurs du secteur, et ce sont surtout les administrations qui ne suivent pas. Les tests sont disponibles en nombre. Les opérateurs sont souvent prêts à les déployer parfois à leurs frais en attendant un accord définitif, mais les autorités ne reconnaissent toujours pas ces tests et n'arrivent pas à valider les autorisations de déploiement aussi rapidement que souhaité. Il y a aussi la question des pays de destination : aujourd'hui, seule l'Italie reconnaît les tests antigéniques au départ de la France... Espérons que cela change rapidement, car l'activité économique liée au transport aérien continue à s'effondrer et de nombreuses familles sont séparées depuis trop longtemps. Le problème aujourd'hui est le faible nombre de pays qui reconnaissent ces nouveaux tests, mais cela devrait évoluer rapidement.

 

F.N.H. : Vous avez indiqué lors d'une interview que les compagnies aériennes, même en période d'activité d'avant-crise, ne seraient pas en capacité de rembourser la dette contractée actuellement. Ne serait-il pas pressant de mettre en place des solutions au plus vite, comme notamment ces tests antigéniques, afin de permettre au plus tôt une reprise de l'activité ?

X. T. : En Europe et au Maghreb, quasiment aucune compagnie aérienne ne serait capable de survivre à la crise sans aide. Les prêts contractés devaient normalement permettre aux acteurs de l'aérien de survivre jusqu'à la fin de l'année 2020, or la crise se prolonge. Le chiffre d'affaires attendu pour le secteur sera certainement encore à la moitié de son niveau de 2019 sur l'année 2021, peut-être encore moins si les limitations sanitaires aux déplacements restent inchangées... Il faudra donc des prêts complémentaires ou des aides directes si l'on souhaite éviter des faillites.

Avant d'envisager ces extrémités, la première des priorités est donc, en effet, de permettre au secteur de se rétablir, et avec lui toute l'économie handicapée par ces restrictions. Les tests antigéniques sont probablement une solution temporaire en attendant qu'un traitement ou qu'un vaccin soit disponible. Ils permettraient déjà d'offrir une bouée de sauvetage aux compagnies aériennes, aux aéroports et indirectement à tous leurs fournisseurs.

 

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