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Blockchain : Pourquoi la concrétisation est complexe

Blockchain : Pourquoi la concrétisation est complexe

Nadia Filali et Issam El Alaoui, respectivement directrice des Programmes Blockchain au sein du Groupe Caisse des dépôts et de consignations et directeur du Datalab de CIH Bank


 

Plusieurs limitations freinent le développement de la blockchain au Maroc.

La Caisse de dépôt et de consignation (CDC française) dispose d’une stratégie flexible qui peut servir d’exemple pour les entreprises marocaines.

 

Par Y. Seddik

 

Au-delà des discours «vendeurs» qui introduisent la blockchain comme étant un nouvel eldorado de possibilités, tant pour les entreprises que pour les individus, plusieurs limites subsistent freinant le développement de produits ou de services basés sur cette technologie de rupture.

En outre, nulle technologie n’est infaillible et la blockchain présente elle-même des limites. C’est ce que nous a expliqué Issam El Alaoui, directeur du Datalab de CIH Bank, lors d’une rencontre sur la thématique organisée par l'Institut CDG.

Après un exercice de vulgarisation, citant plusieurs «Use cases» de la blockchain, El Alaoui a recentré le débat autour de ses problématiques, qui laissent certains acteurs réticents face à son potentiel.

Les frais de transaction, pour le réseau Bitcoin ou Ethereum par exemple, correspondent au coût d'enregistrement d’une transaction dans la blockchain. C'est l'émetteur de la transaction qui paye ces frais.

«Ces frais ne sont pas fixes et connaissent des piques de volatilité», nous éclaire El Aloui. «À l’heure actuelle, ces coûts sont de 5 DH par transaction. Ces derniers étaient de 50 dollars lors de l’emballement des cryptomonnaies».

D’un autre côté, il y a «la scalabilité où la vitesse du réseau est un vrai goulot d’étranglement pour les réseaux blockchain», fait-il remarquer.

Pour les blockchains publiques, le volume des transactions qu’il est possible de traiter par seconde est très insuffisant : 3 à 5 transactions par seconde. Pour une blockchain Ethereum, ce chiffre est entre 3 à 7 transactions par seconde.

Ceci reste évidemment bien loin des capacités transactionnelles nécessaires à des secteurs comme celui de la banque. A l’inverse, pour Paypal ou pour Visa, ces chiffres peuvent aller jusqu'à 20.000 transactions par seconde.

Lorsqu’un utilisateur effectue une transaction via blockchain, elle doit être approuvée par les mineurs avant d’être traitée. C’est ce que l’on appelle le consensus. Or, «les principaux vols de cryptomonnaies se sont déroulés lors de ces temps de confirmation; il n’y a pas de temps réel dans la blockchain», révèle l’expert.

«Avec le Bitcoin, par exemple, l’utilisateur a 60% de chances d’avoir son argent dans 10 minutes, 95% dans 30 minutes et 99% au bout d’une heure», ajoute-t-il.

 

L’immuabilité

En substance, l’immuabilité se réfère à un élément qui ne peut pas être modifié après sa création. C’est le cas pour les opérations par Blockchain.

«Par exemple, pour une banque qui commet une erreur dans un virement via le réseau blokchain, elle ne peut pas faire de retour en arrière pour la corriger», indique le Chief Data Officer de CIH Bank.

En cas d’erreur, toute modification des blocs supposerait l'accord au moins de la majorité des milliers de mineurs qui ont validé la transaction, et cela constituerait un défi d’un autre genre pour cette technologie.

 L’une des remarques émises lors de cette rencontre est relative à la consommation énergétique de la blockchain et du minage. Le réseau Bitcoin par exemple a consommé, en termes d’électricité, durant le seul mois mars de 2018, ce que l’Irlande a consommé en un an.

L'équation énergétique des réseaux blockchain est donc un vrai problème. Certains parlent même d’une «catastrophe écologique en puissance».

Au final, ces limitations ne rendent pas cette rupture moins révolutionnaire, mais elles soulèvent des questions quant à son efficacité et sa fiabilité.

Mêmes les grosses compagnies mondiales relativisent sur la place de cette technologie dans leurs business, faute de rentabilité économique satisfaisante. Pour eux, l’objectif n’est pas d’en faire une activité majeure, mais d’apprendre à utiliser cette technologie pour ne pas être dépassé.

Mais il faut aussi dire que la blockchain est toute jeune (2008), et que ces problématiques peuvent être surmontées. D'ailleurs, les premiers travaux sur l'intelligence artificielle datent de 1956 ! ◆

 


Le cas CDC

Nadia El Filali, directrice des Programmes Blockchain, Groupe Caisse des dépôts et de consignations, membre du Conseil d'administration de l'Agence de développement du digital du Maroc, présente à cette rencontre, a exposé, entre autres, les étapes à mettre en pratique pour expérimenter la technologie.

La première étape, souvent la plus dure, est de sensibiliser le comité exécutif aux enjeux pour son secteur d’activité et les potentialités de nouveaux marchés. Puis, vient la mise en place d’une équipe agile et transverse en interne (opérationnels, IT, juridiques…) pour concentrer l’expertise sur ce domaine très mouvant et peu mature.

Passées ces étapes, l’entreprise doit organiser la montée en compétence par l’expérimentation de cas d’usage métiers avant de trouver un ou deux projets à industrialiser, notamment avec des partenaires en mode consortium, comme c’est le cas pour la CDC.

 

 

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