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Une main tendue mais ferme !

Une main tendue mais ferme !
 
Les discours les plus courts sont souvent les plus longs. Leur longueur ne réside pas dans le nombre de mots, mais dans le contexte qui les prolonge et les multiples niveaux de lecture qu’ils contiennent.
 
A l’occasion du 22ème anniversaire de la Fête du Trône, Sa Majesté le Roi Mohammed VI a adressé un discours au peuple marocain, mais pas que, puisque l’élite politique autant que le peuple algérien font partie des éléments interpellés.
 
Nous ne prétendons pas ici faire une interprétation exhaustive du discours royal, mais tout simplement d’apporter un éclairage relatif, concernant les aspects qui nous semblent avoir été les moins commentés jusqu’à présent, en l’occurrence concernant la «main tendue à l’Algérie».
 
Premièrement, le discours peut du point de vue de sa structure être subdivisé en 3 temporalités et en 6 blocs qui se prolongent et se donnent du sens mutuellement.
 
Le préambule du discours renvoie à la profondeur historique (Bloc 1) comme fondement des atouts du présent (blocs 2 et 3). Quant aux perspectives futures (blocs 4 et 5), elles plongent leurs racines dans les efforts entrepris et les choix stratégiques réalisés aujourd’hui par le Maroc. 
 
Bloc 1 : Profondeur historique et cohésion nationale
 
- Rappel de la dimension symbolique et sacrée de la Fête du Trône.
- Rappel de la profondeur historique du Maroc.
- La cohésion nationale, les institutions et les citoyens sont les fondements de la puissance du Maroc et le résultat et l’expression de la profondeur historique citée précédemment. 
 
Bloc 2 : Hommage aux héros du quotidien 
 
- Sa Majesté le Roi a rendu un hommage solennel au personnel de santé (privé, public et militaire), aux forces de l’ordre et aux pouvoirs publics concernant les efforts et sacrifices consentis dans la lutte contre la pandémie de la Covid-19.
- Les efforts économiques réalisés par l’Etat (Plan de relance au profit des PME et Fonds Mohammed VI).
 
Bloc 3 : La souveraineté sanitaire comme nouvel impératif
 
- Le Maroc, malgré les défis, a remporté la «bataille pour l’accès aux vaccins».
- Réussite de la campagne nationale de vaccination.
- Lancement d’un projet d’avant-garde pour la fabrication de vaccins, de médicaments et de matériel médical, indispensables pour le Maroc.
 
Bloc 4 : Le NMD : vers une nouvelle révolution du Roi et du peuple
 
- Le Nouveau modèle de développement doit servir de cadre de référence pour définir les principes et les priorités du pays en matière de développement et de socle pour un pacte économique et social propre à impulser une nouvelle révolution du Roi et du peuple.
 
- Sa Majesté le Roi en tant que garant des intérêts de la nation et des citoyens, veillera à accompagner la mise en œuvre opérationnelle de ce modèle, avec les dispositions et les mécanismes nécessaires à cet effet.
 
Bloc 5 : Une main tendue à l’Algérie oui, une main de fer dans un gant de velours
 
C’est la partie du discours la plus attendue par certains, vu le contexte géopolitique très particulier dans lequel le Maroc a eu à évoluer dernièrement. Tandis que certains y voient un vœu pieux et d’autres une démarche constructive, une troisième grille de lecture, celle de la fermeté, semble pour l’instant avoir été totalement occultée par les commentateurs et les analystes. Cette partie contient, et ce n’est là bien entendu qu’une interprétation parmi d’autres, deux niveaux de lecture et par conséquent d’interprétation.
 
Le premier, rappelle à juste titre la nature anachronique des tensions actuelles, notamment concernant la fermeture des frontières entre nos deux pays. Une fermeture héritée du passé et  qui n’a plus lieu d’être vu la complémentarité évidente entre nos deux pays autant au niveau économique et stratégique qu’au niveau historique et civilisationnel, et a fortiori depuis la disparition des facteurs à l’origine de cette fermeture.
 
Quant à l’intrus à l’origine de la division actuelle dont il est question dans le discours, cela renvoie, sauf erreur de ma part, à la France du point de vue historique, mais plus globalement à certaines puissances et forces occidentales du point de vue contemporain. Ces dernières œuvrent activement en vue de maintenir le Maghreb dans un schéma de division permanente, quitte à entreprendre des campagnes récurrentes de désinformation (affaire Pegasus), de déstabilisation (printemps arabes) et d’isolement du Maroc sur la scène internationale (fondations allemandes au Maroc, activisme diplomatique anti-marocain mené par l’Allemagne, provocations de l’Espagne, rôle de l’Open Society dans l’affaire Pegasus, ambigüité de l’administration Biden…). Concernant la énième main tendue par le Maroc à l’Algérie, le premier niveau de lecture est concret et pragmatique. Nos deux pays sont confrontés à des menaces stratégiques similaires :
 
«La vérité est que le Maroc et l’Algérie sont tous deux confrontés aux problèmes de l’immigration, de la contrebande, du narcotrafic et de la traite des êtres humains. Les bandes qui s’adonnent à ces activités criminelles sont notre véritable ennemi commun. Si, ensemble, nous nous attelons à les combattre, nous parviendrons à mettre fin à leurs agissements en extirpant leur mal à la racine».
 
Nos intérêts étant convergents et nos destins liés par l’histoire et la géographie, le Maroc et l’Algérie ont tout intérêt à dépasser les faux clivages qui les séparent et à œuvrer conjointement pour pacifier la région et enclencher une nouvelle dynamique de bon voisinage. Car tandis que la stabilité et la sécurité régionale se co-construisent, l’instabilité de l’un ne manque pas d’atteindre l’autre. La balle est de ce point de vue dans le camp algérien.
 
Le deuxième niveau de lecture où résiderait la fermeté du discours, concerne le principe de réciprocité évoqué par le Roi dans le discours :
 
«En fait, ce qui vous affecte nous touche et ce qui vous atteint nous accable. Aussi, Nous considérons que la sécurité et la stabilité de l’Algérie, et la quiétude de son peuple sont organiquement liées à la sécurité et à la stabilité du Maroc. Corollairement, ce qui touche le Maroc affecte tout autant l’Algérie; car les deux pays font indissolublement corps».
 
Si l’on invoque les récents évènements diplomatiques afin de situer le discours dans son contexte, ce passage se révèle sous un tout autre angle. Je fais ici référence à la note adressée par Omar Hilale, l’Ambassadeur du Maroc à l’ONU, à la présidence du Mouvement des non-alignés en juillet dernier, où il rappelle que «le principe d’autodétermination n’est pas un principe à la carte», et que «le peuple Kabyle mérite, plus que tout autre, de jouir pleinement de son droit à l’autodétermination».
 
Il en résulte que situé dans son contexte, le discours royal dit peut-être autrement, que ce qui touche le Maroc dans son Sahara, affectera tout autant l’Algérie dans sa Kabylie.
 
L’époque de la stratégie défensive étant révolue, cette réciprocité ne sera donc pas spontanée et naturelle, mais réalisée diplomatiquement et rappelée autant qu’il le faudra par le Maroc, tant que l’élite algérienne restera obstinément engagée dans sa politique de déstabilisation du Maroc.
 
Le logiciel belliciste de l’élite algérienne étant intrinsèquement militaire, et par conséquent structuré selon une dichotomie ami/ennemi, le pouvoir algérien ne manquera donc pas de capter ce message subliminal.
 
La seule alternative viable pour le pouvoir algérien serait donc de serrer une fois pour toutes la main qui lui est tendue par le Maroc, et de contribuer activement à jeter les bases d’un nouveau pacte de développement et de stabilité régionale, qui en plus de profiter irrémédiablement à nos deux peuples, renforcera la stabilité dans la région au détriment des ingérences étrangères dont les agendas vont à l’encontre de nos intérêts les plus vitaux, malgré le caractère fallacieux et mielleux de leurs discours officiels.
 
Enfin le Bloc 6, où en rendant hommage aux Forces Armées Royales, à la Gendarmerie Royale, à la Sûreté nationale, aux Forces auxiliaires et à la Protection Civile pour leur dévouement et leur mobilisation constante, le Roi rappelle sur un ton martial que l’unité, la souveraineté et la sécurité nationale, ne constituent pas un acquis définitif, mais demeurent une lutte et un effort permanent, auxquels tous les citoyennes et citoyens marocains se doivent de prendre part.
 
 
 
Par Rachid Achachi. "Chroniqueur Luxe Radio et DG d'ARKHÈ Consulting"
 
 
 
 
 
 

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