Par Abdelhak Najib Ecrivain-Journaliste
Le monde assiste impuissant face à la prise de pouvoir, de main de fer, par les Talibans, en Afghanistan. Impuissant et médusé devant la rapidité avec laquelle toute cette affaire afghane a été pliée au su et au vu des «grandes puissances». Ces puissances qui ont assisté dans la stupeur à l’incarnation par la force de la Realpolitik. Après dix jours d’une éclatante victoire, les Talibans passent aux choses sérieuses. Des barrages dans toutes les régions pour débusquer tous ceux qui possèdent des produits de la technologie et la communication de nos jours. Tout y passe : téléphones, tablettes, ordinateurs portables... Un ensemble d’outils, jugés aux yeux des Talibans comme des gadgets, qui encouragent à l’impiété et à la débauche. Mais il fallait s’y attendre, les Talibans n’ont jamais promis autre chose qu’un retour à un âge où tous ces canaux doivent être absents, où tous les réseaux doivent être barricadés pour limiter au maximum les échanges entre les populations. Et oui, cela leur permettra d’installer leur vision de la religion à la lettre, sans détours, dans le strict respect des lignes rouges édictées par le régime, désormais en place.
Dans cette configuration qui a pris place depuis la mi-août 2021, la question de la femme et de la fille demeure la plus grande inconnue, bien que nous ayons une idée du sort qui leur sera réservé dans ce pays et sous le régime de la charia. Si, aujourd’hui, la communauté internationale et les Nations unies en tête s’interrogent sur le pourquoi du comment de la situation de la femme sous le joug des Talibans, ceux-ci y vont de la manière la plus claire possible. Ils affirment que les femmes seront traitées selon les lois de la charia, en parfaite adéquation avec les moeurs et les traditions afghanes. Ce qui ne souffre d’aucune ombre, puisque cela signifie de manière claire une limitation draconienne à toutes les libertés individuelles dont puissent jouir les femmes et les filles dans ce pays. Car les Talibans considèrent que cette catégorie de la société est inférieure à toutes les autres se devant de vivre sous la tutelle des hommes et des lois tribales.
En substance, voilà ce que nous pouvons lire à ce propos du côté de l’ONU. «Les droits des femmes afghanes sont une ligne rouge que les Talibans ne doivent pas franchir», a averti mardi, 24 août 2021, l'ONU, dont le Conseil des droits de l'homme a adopté une résolution sur l'Afghanistan jugée insuffisante par les ONG et certains pays. Cette résolution souligne la «nécessité d'enquêter rapidement et de manière transparente» sur toutes les allégations de violations des droits humains et du droit international humanitaire «commises par les différentes parties au conflit, et d'amener les responsables à rendre compte de leurs actes». Comme si c’était à la portée de main d’enquêter dans ce pays, à plus forte raison sous le régime des Talibans. La preuve par les mots que les instances onusiennes donnent dans les palabres vides de sens, face à une situation qui échappe de fait au contrôle de toute la communauté internationale, sauf aux Talibans, qui serrent leur étau sur les Afghans, hommes et femmes. Il faut se résoudre à des évidences qui sont claires. Ce texte, adopté par consensus à l'issue d'une réunion extraordinaire du Conseil des droits de l'homme (CDH) sur l'Afghanistan, ne prévoit même pas de mécanisme international d'investigation, comme le réclamaient les ONG et certains pays, dont l'UE. Il se contente de demander à la Haut-Commissaire, Michelle Bachelet, de présenter un rapport écrit au premier trimestre 2022. La belle affaire !
En attendant, la mainmise des forces talibanes sur le pays semble si rodée que tout le monde ploie sous la poigne d’une chefferie qui ne laisse aucune place au hasard. L’histoire nous a appris que nous n’apprenons jamais de l’Histoire et que nous savons tous comment les Talibans pensent et conçoivent leur gouvernance et les mécanismes de fonctionnement de leur société. Ils ont promis le pardon. Ils assurent que les femmes fonctionnaires vont continuer d’assurer le travail, et que les filles iront à l’école... Pour le reste, c’est la loi des Talibans qui a force de persuasion. Du déjà vu ? Pas tant que ça, car si l’Occident n’apprend jamais de ses erreurs, les Talibans, eux, semblent bien apprendre la leçon.