Russie - Europe : Poutine bande les muscles

Russie - Europe : Poutine bande les muscles

Vladimir Poutine n’a pas seulement parlé aux journalistes lorsqu’il a affirmé, mardi, que la Russie était «prête dès maintenant» si l’Europe «souhaitait la guerre». Le président russe s’adressait à tout un continent, au moment précis où Washington tentait de rapprocher les positions russes et ukrainiennes autour d’un plan de paix encore fragile.

A Moscou, la mise en scène était millimétrée : d’un côté Poutine, campé dans son rôle de chef inflexible; de l’autre, les émissaires américains venus présenter un projet remanié après consultations avec Kiev et plusieurs capitales européennes.

Cinq heures d’entretien au Kremlin pour conclure qu’«aucune solution de compromis» n’avait encore émergé concernant les territoires occupés. Des propos de Poutine, il ressort une pression directe sur les Européens qu’il accuse de freiner les efforts américains, mais aussi un moyen de contester la légitimité de l’Union européenne dans ces négociations.

En repositionnant Washington comme seul interlocuteur valable, il cherche à marginaliser les Européens, présentés comme incapables d’élaborer un véritable programme de paix et trop alignés sur Kiev pour jouer utilement les médiateurs. Le contraste est d’autant plus fort avec les déclarations du chef de l’OTAN, Mark Rutte, qui se dit convaincu que l’action américaine finira par restaurer la paix sur le continent. La posture agressive de Moscou vise aussi à diviser le camp occidental.

Le plan américain initial en 28 points, perçu comme très favorable à la Russie par plusieurs chancelleries, a d’abord été travaillé sans les alliés européens. Depuis, il a été amendé sous pression de Kiev et de l’UE, ce qui ne plaît guère à Moscou.

En soulignant publiquement ces divergences, Poutine cherche à isoler l’Europe et à montrer que Washington serait prêt à avancer, mais que les Européens s’y opposeraient. Une manière de saper la cohésion du bloc transatlantique et de peser sur les négociations avec les Américains. L’Europe n’a pourtant rien d’un acteur périphérique. Pour Emmanuel Macron, qui recevait lundi 2 décembre Volodymyr Zelensky à Paris, l’enjeu demeure d’obtenir une «paix juste et durable».

Pas une pause, pas un compromis bancal destiné à offrir à Moscou une nouvelle fenêtre d’opportunités, mais un cessezle-feu assorti de garanties véritables. Le président ukrainien, fragilisé politiquement après la démission de son chef de cabinet sur fond de scandale de corruption, insiste lui aussi sur ce point : les pourparlers actuels ne doivent pas devenir une opération russe visant à alléger les sanctions.

La séquence diplomatique est d’autant plus délicate que la Russie a réalisé ces dernières semaines ses avancées territoriales les plus importantes depuis un an, multipliant frappes de drones et offensives sur plusieurs axes du front. Cette dynamique militaire complique la tâche américaine, qui cherche à produire un texte acceptable par Kiev sans renoncer aux réalités du terrain. Elle pèse aussi sur les Européens, qui savent que chaque kilomètre perdu réduit la marge de négociation.

Et pourtant, malgré les pressions, l’Europe dispose d’atouts : sa capacité à soutenir financièrement et militairement l’Ukraine, son poids économique dans le régime de sanctions et l’expérience accumulée depuis trois ans dans la gestion du conflit. C’est pour contourner cette force collective que Moscou hausse le ton.

Une Europe intimidée serait tentée d’accepter un accord imparfait. Une Europe désunie offrirait à la Russie la possibilité de négocier en bilatéral. Une Europe cohérente, au contraire, pourrait imposer ses lignes rouges.

L’avertissement lancé par Poutine n’est donc pas une annonce de guerre, mais une tentative de remodeler le rapport de force. Tout l’enjeu consiste à savoir si l’Occident va céder au climat de peur que Moscou tente d’instaurer ou s’il parvient à transformer cette tension en stratégie cohérente.

 

F.Z Ouriaghli

 

 

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