En marge de la conférence SolarPaces, Hicham Bouzekri, directeur R&D et intégration industrielle de Masen, aborde les enjeux liés à la maîtrise du CSP, les avantages de cette technologie et les efforts déployés par Masen pour la R&D. Entretien.
Finances News Hebdo : Quels sont les enjeux pour le Maroc d’organiser pour la deuxième fois l’événement international SolarPaces ?
Hicham Bouzekri : Le principal enjeu est d’attirer l’attention sur le développement réalisé par le Maroc dans le domaine de la technologie du CSP (Concentrated Solar Power), de permettre aux équipes opérationnelles d’être au fait des dernières avancées scientifiques, tout en rapprochant le monde académique qui travaille sur le sujet et le milieu industriel.
D’ailleurs, ce rapprochement est au cœur des priorités de Masen R&D. Cette manifestation est une belle opportunité permettant à l’ensemble des acteurs d’être autour d’une même table pour échanger. Il faut savoir que SolarPaces est l’une des plus grandes manifestations de CSP à travers le monde. L’événement a le mandant de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA).
Le fait que SolarPaces ait attribué l’organisation au Maroc suite à la candidature de Masen, est une preuve du rôle important que notre institution est en train de jouer à l’échelle mondiale dans le domaine du CSP. Cette conférence est un rendez-vous prisé à travers le monde. Nombreux sont les pays qui cherchent à l’abriter. Notre pays a réussi à organiser SolarPaces 2018, grâce à son attractivité et aux programmes mis en place. L’un des principaux points d’attraction sera la visite du Complexe Noor Ouarzazate.
F.N.H. : Quel est le degré de maîtrise du Maroc de la technologie CSP ?
H. B. : Au lancement du Programme solaire en 2009, le Maroc n’avait pas d’expérience dans le domaine du solaire en général et celui du CSP en particulier. Grâce à une approche intégrée, Masen a pu acquérir un savoir-faire graduel à travers la construction, le commissioning, et les aspects opérationnels des centrales. En parallèle, Masen mène également plusieurs opérations afin d’augmenter la maîtrise de la technologie. Des Summer Schools sont organisées dans l’optique de permettre aux étudiants d’avoir une fine connaissance et une meilleure maîtrise du CSP.
En partenariat avec l’OFPPT, notre institution a également organisé un atelier de formation pour les techniciens qui travailleront dans les centrales CSP. En définitive, notre approche s’appuie sur l’aspect opérationnel, la recherche et la formation.
F.N.H. : Quels sont les avantages comparatifs du CSP par rapport aux autres technologies ?
H. B. : Masen a une position agnostique par rapport à la technologie dans le sens où un choix technologique n’est pas opéré a priori. L’ensemble des technologies sont évaluées sur la base de leur maturité et leur compétitivité. Les besoins en production d’énergie au Maroc sont dictés par une pointe le soir entre 19 et 22 heures. La technologie la plus compétitive à grande échelle pour adresser ces besoins à partir de sources renouvelables est le CSP. Le Maroc a des conditions idoines, notamment une irradiation normalisée directe élevée pour l’utilisation de cette technologie. Le niveau d’irradiation normalisée directe du pays, l’un des meilleurs au monde, permet de capturer la capacité calorifique du soleil et pas seulement celle de générer des électrons comme c’est le cas pour le photovoltaïque. Nous profitons de l’ensemble de ces avantages comparatifs pour rendre cette technologie efficace et utile au Maroc.
F.N.H. : Quels sont les efforts déployés par Masen pour la recherche et développement ?
H. B. : Il existe plusieurs postures dans le domaine de la recherche et développement. Masen a fait le choix de faire une R&D préindustrielle, orientée marché. A travers ce parti pris, l’objectif est que les investissements en R&D soient pourvoyeurs de postes de travail, tout en permettant à l’industrie locale d’augmenter sa capacité et ses compétences dans le domaine du CSP. Il faut savoir que grâce à ces efforts, 30% de la Centrale Noor Ouarzazate I ont été réalisés par des Marocains. L’objectif pour Noor II et III est de porter ce chiffre à 35%. Sachant qu’il s’agit d’une industrie dans laquelle le Maroc n’avait aucune expérience. Les différents apports du CSP vont au-delà du fait de répondre aux besoins évoqués plus haut, car il s’agit également de créer une filière industrielle. A travers les différents partenariats noués par Masen avec les pays africains frères, nous espérons que ceux-ci bénéficieront de l’expérience marocaine en la matière.
F.N.H. : Comment Masen joue-t-elle le rôle de passerelle entre le monde académique et le milieu industriel ?
H. B. : Masen a créé une plateforme d’échanges avec les industriels, en l’occurrence le cluster solaire basé à Casablanca. L’objet recherché à travers cette initiative est de créer un espace d’échanges ouvert et qui sort des chemins très normés de la relation client-fournisseur, et ce à travers des voyages d’étude et la formation. Ce rôle de passerelle est conforté par l’organisation de Masen Talents Campus à Agadir. Cet évènement a permis aux étudiants d’être en contact direct avec les industriels. Des experts industriels ont assuré la formation des étudiants. Il est utile de préciser que la plateforme de Noor Ouarzazate R&D qui s’étend sur 200 hectares, sert aussi de lieu d’expérimentation terrain aux centres de recherche. La plateforme offre toutes les facilités à même de permettre à une recherche académique de trouver sa place sur le marché. ■
Propos recueillis par M. Diao