Said Mouline, président de la Commission économie verte à la CGEM, et Directeur général de l’ADEREE, insiste sur la nécessité de mobiliser des financements afin d’atteindre les objectifs escomptés.
Finances News Hebdo : Contrairement à la mise en oeuvre des autres piliers de la Stratégie de développement des énergies renouvelables, qui vont bon train, le pilier relatif à l’efficacité énergétique a pris du retard. L’aboutissement des objectifs fixés est-il compromis?
Said Mouline : Dans le secteur du bâtiment avec la réglementation thermique, le timing a été respecté grâce à l’accompagnement, aux financements qui ont suivi et aux projets pilotes. Pour l’agriculture, le projet du pompage solaire s’est également développé d’une façon très correcte. Concernant le transport, certains axes ont démarré notamment pour les taxis avec la prime à la casse, d’autres sont encore en cours. Pour l’éclairage public, il y a des cas d’école qu’il faudra généraliser grâce notamment aux financements qui sont rentables aussi bien pour le particulier, pour l’industriel que pour l’Etat. Tout le monde y gagne à condition de mettre le paquet pour accompagner ces politiques publiques. Il y a certes beaucoup de mesures, mais du chemin reste à faire.
F.N.H. : Où en êtes-vous aujourd’hui par rapport aux objectifs fixés des 15% d’économie à l’horizon 2020 ?
S. M. : Nous n’avons pas encore mesuré l’impact des actions menées qui, d’ailleurs, ne sont pas encore généralisées. Il est plus compliqué de mesurer, par exemple, le nombre des K.WH produits par les énergies renouvelables. Il faut savoir que l’intensité énergétique de notre pays va être également une mesure-clé de l’EE. Je dois rappeler que le Maroc avait un score qui n’était pas bon par rapport à des pays comparables, comme la Tunisie en 2010, qu’il va devoir améliorer.
F.N.H. : Vous avez insisté sur le rôle du secteur bancaire dans l’accompagnement de la stratégie d’EE, sur la nécessité de changer les modes de consommation et l’implication de tous les intervenants. Qu’en est-il des mesures fiscales mises en place pour encourager davantage les acteurs concernés ?
S. M. : Sur le plan fiscal, nous avons essayé d’avoir une approche plus volontaire. Nous avons commencé par des actions pour les véhicules qui consomment moins. Les droits de douane pour les véhicules hybrides et électriques ont baissé, passant de 28 à 2,5%. Il faut savoir que la fiscalité n’est pas facile à faire évoluer. Chaque année, lors des discussions sur la Loi de Finances, lorsqu’on propose des mesures d’accompagnement, il est signalé que pour le contexte marocain, l’EE est déjà rentable, donc pas la peine d’en faire plus. Mais cela n’empêche qu’il faut encourager davantage. Raison pour laquelle, nous allons nous battre pour présenter des mesures réglementaires, des mesures d’accompagnement financier ainsi que celles d’encouragement fiscal. Sans oublier un point important, à savoir que l’Etat prévoit des subventions pour le volet financier.
F.N.H. : Vous avez évoqué le manque de financement vert dans l’efficacité énergétique.
S. M. : Cela ne concerne pas uniquement le Maroc, mais tous les pays. Le financement vert a accompagné les énergies renouvelables, mais pas l’EE. Il faut qu’on travaille pour qu’à la COP22, l’EE soit également accompagnée financièrement parce que c’est autant de «dioxyde de carbone» évité.
Propos recueillis par Lamiae Boumahrou