Sans des outils financiers, d’accompagnement, de sensibilisation et de formation, les objectifs de 20% d’efficacité énergétique à l’horizon 2030 semblent sérieusement compromis.
Outre le Morseff, une ligne de financement de 80 millions d’euros, la GIZ prépare une autre ligne de 45 millions d’euros destinée aux PME.
Durant les 5 dernières années, les énergies renouvelables ont connu un développement fulgurant, portant le Maroc au rang de puissance mondiale, notamment dans l’énergie solaire. Ce qui n’est pas le cas pour l’efficacité énergétique, deuxième pilier de la stratégie énergétique lancée en 2009, qui n’a pas connu le même succès.
En effet, dans ce domaine, le Maroc traîne le pas dans la mise en œuvre de la stratégie de l’efficacité énergétique. Un retard non sans conséquence pour la réussite de la transition énergique, la dépendance du pays aux énergies fossiles totalement importées et, par conséquent, pour la balance commerciale.
Parmi les secteurs les plus concernés, figure celui du bâtiment, dont la consommation d’énergie avoisine les 33%, avec une part des émissions de GES de 12%. L’enjeu d’intégrer l’efficacité énergétique dans l’une des locomotives de l’économie nationale est de ce fait capital. Cette condition a été rappelée par les différents intervenants nationaux et internationaux qui ont pris part au 1er Colloque national sur la «Construction durable et villes vertes» organisé par l’Institut de recherche en énergie solaire et énergies nouvelles (IRESEN), en collaboration avec l’Agence de développement des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique et l’agence de coopération allemande GIZ.
Cet évènement a été l’occasion de faire un diagnostic et de présenter des solutions innovantes pour la construction durable. Un état des lieux qui révèle la nécessité d’accélérer la cadence de la mise en œuvre de la stratégie pour atteindre l’objectif fixé de 20% d’efficacité énergétique à l’horizon 2030 dans l’industrie, le bâtiment, les transports, l’agriculture et l’éclairage public.
«Le bâtiment est un secteur dans lequel il y a énormément à faire, mais qui est difficile à faire réguler. Aujourd’hui, il n’est pas normal que dans notre pays, qui a adopté une politique volontariste pour les énergies renouvelables et l’économie verte, avec une facture énergétique annuelle importante, nous continuons à gaspiller», martèle Said Mouline, Directeur général de l’Agence marocaine pour l’efficacité énergétique (AMEE ex ADEREE).
Pourtant, le Maroc a érigé l’efficacité énergétique en priorité nationale tout autant que les énergies renouvelables, en veillant, entre autres, au renforcement du cadre réglementaire avec la promulgation de la loi n°4709 relative à l’efficacité énergétique.
Toutefois, le volet réglementaire ne suffit pas à changer les comportements, les habitudes, les conceptions et les visions. Raison pour laquelle, le DG de l’AMEE plaide pour le développement d’outils d’accompagnement, de formation et de sensibilisation et, surtout, financiers pour dépasser au plus vite cette phase de transition.
Accompagnement financier
En effet, le financement est le nerf de la guerre de la stratégie de l’efficacité énergétique, comme cela a été rappelé tout au long du colloque. Investir dans l’efficacité énergétique dans le bâtiment ne figure pas parmi les préoccupations des promoteurs insoucieux des lois existantes. Et pour cause, celui qui va payer la facture en fin de compte sera l’acquéreur. Sans incitations, les promoteurs ne vont pas se bousculer au portillon. Conscients de cette réalité, les pouvoirs publics cherchent à développer des outils financiers incitatifs pour encourager l’investissement dans ce domaine et fédérer les différents acteurs dans ce processus. Parmi les instruments existants, le Morseff, une ligne de financement de l’énergie durable de 80 millions d’euros destinée aux entreprises privées marocaines et financée par la BERD, l’ADF, la BEI et la KfW (Voir entretien).
Outre cette ligne proposée par la BMCE et la Banque Centrale Populaire, une deuxième ligne est en cours de préparation par la GIZ, l’un des principaux partenaires du Maroc dans le domaine des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique. «Lors des dernières consultations de négociations bilatérales entre l’Allemagne et le Maroc, il a été décidé la mise en place d’une ligne de crédit, outre la contribution au Morseff, de 45 millions d’euros destinée aux PME pour financer les projets d’efficacité énergétique», a annoncé Philippe Simonis, coordinateur du secteur énergie à GIZ Maroc, lors de cette rencontre.
Outre le soutien financier, la GIZ apporte un appui technique important au Maroc et elle démarre à partir de 2017 une initiative allemande pour les technologies favorables au climat qui sera focalisée uniquement sur l’efficacité énergétique, avec une composante sur le bâtiment, sur l’industrie et sur le transport. Une composante sera également dédiée à la recherche pour renforcer le lien entre le secteur privé, les instituts de recherche, les universités et les opérateurs de différents secteurs.
L. Boumahrou