Espérant 1.300 milliards USD, les pays du Sud ont qualifié le financement mobilisé de «trop faible, trop tardif et trop ambigu».
Par Désy M.
Après 2 semaines de négociations, la COP29 baptisée «COP du financement» s’est clôturée sur une note amère. Sur 1.300 milliards de dollars par an réclamés par les pays du Sud, les négociateurs sont parvenus à ne mobiliser que 300 milliards de dollars par an d’ici 2035 d’aide publique pour soutenir la transition climatique. Ce montant, jugé largement insuffisant, a été qualifié d’«accord de compromis» par de nombreux observateurs, certains allant jusqu’à le considérer comme un échec.
Le Commissaire européen chargé des négociations sur le climat, Wopke Hoekstra, a salué «le début d’une nouvelle ère» pour la finance climatique. «Nous avons travaillé dur pour faire en sorte qu’il y ait beaucoup plus d’argent sur la table. Nous triplons l’objectif de 100 milliards, et nous pensons que c’est ambitieux, nécessaire, réaliste et réalisable», a-t-il déclaré. Dans la même lancée, Simon Stiell, secrétaire exécutif de l’ONU Climat, a affirmé que cet accord «permettra de poursuivre l’essor des énergies propres, aidant tous les pays à profiter des avantages considérables qui y sont associés : plus d’emplois, une croissance plus forte, une énergie plus abordable et plus propre pour tous».
Cependant, cette entente reflète avant tout la fracture grandissante entre pays du Nord et pays du Sud. Les premiers, confrontés à des contraintes budgétaires exacerbées par des crises économiques, ont cherché à limiter leur contribution, tandis que les seconds, subissant de plein fouet les conséquences des dérèglements climatiques, espéraient des engagements plus ambitieux. A titre d’exemple, ces fonds couvriraient à peine cinq fois les besoins climatiques estimés pour la France seule, alors que les pays du Sud, confrontés à des catastrophes climatiques de plus en plus fréquentes, doivent se contenter d'une part bien maigre. Espérant 1.300 milliards USD, le groupe africain a, par la bouche du Kényan Ali Mohamed, qualifié ce financement de «trop faible, trop tardif et trop ambigu».
De plus, la question de l’utilisation de ces fonds reste hautement controversée. La Banque mondiale, pressentie pour superviser la gestion de ces fonds, suscite déjà les tensions. Alors que les pays occidentaux insistent sur la nécessité de contrôler l’allocation des ressources pour garantir leur affectation à des projets climatiques, les pays du Sud réclament davantage de souveraineté dans leur utilisation, qu’ils perçoivent comme une réparation des dommages climatiques causés par des décennies d’industrialisation. Les propositions innovantes pour diversifier les financements ont été évoquées, mais largement écartées. Parmi elles, la proposition du président brésilien, Lula, de créer une taxe de 2% sur la fortune des 3.000 milliardaires de la planète, qui pourrait rapporter 250 milliards de dollars par an. Cette idée prônée par plusieurs ONG présentes à la COP a été jugée peu réaliste pour les grands pays occidentaux.
Quelques pas accomplis Ce qui peut s’apparenter à une bonne nouvelle lors de cette COP a été l’avancée concrète de l’opérationnalisation du Fonds pour les pertes et dommages, longtemps attendu par les pays en développement, notamment les petits États insulaires, les moins avancés et les pays africains. Ce mécanisme, doté d’un soutien de 1,5 milliard d’euros, vise à aider les nations les plus vulnérables à faire face aux effets du changement climatique. La COP29 est également parvenue à un accord mondial sur les marchés du carbone, après presque une décennie de travail acharné à ce sujet lors des précédentes COP.
Ce marché, qui représente une autre source de financement pour réduire l’empreinte carbone des pays, reste tout de même sujet à certaines inquiétudes, en ce qu’il peut favoriser le développement du phénomène de «Greenwashing». Alors que le Brésil s’apprête à accueillir la COP30, les attentes se tournent vers la lutte contre la déforestation, un enjeu central pour limiter le réchauffement climatique. Le président Lula milite pour des financements plus équitables, notamment en mobilisant des ressources issues de la taxation des grandes fortunes et de la réorientation des 1.000 milliards de dollars annuels investis dans les énergies fossiles. Pourtant, la tâche s’annonce rude. L’heure est à l’action audacieuse car face à une planète en feu, les compromis ne suffiront plus.